Année C : mercredi de la 18e semaine ORDINAIRE(litco18me.22)
Lc 9, 28-36- Jr 31, 1-7 ta foi est grande.
Dans toute vie, il se produit une situation, un événement qui oriente autrement notre manière de penser, de vivre. Ce peut être une visite, un séjour dans un monastère, une tragédie, une maladie, la mort d’un proche. Le philosophe François Julien nomme cela dé-coïncidence. Cet événement nous décolle de ce qui nous colle à la peau, de notre manière de penser. Il change nos habitudes de vie. En régime chrétien, on nomme cela une conversion.
Jésus a vécu cette rencontre avec ue telle puissance intérieure qu’il change radicalement sa manière de vivre. Le "grand dé-coïncidant" qui fissure sa manière de penser fut sa rencontre avec une femme qui a fait basculer sa vie dans une autre direction.
Revoyons la scène. Une femme dérange Jésus parce qu’elle n’est pas une « croyante», parce qu’elle est une « outsider ». Son statut officiel de païenne dérange. Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues d’Israël.
Même si Jésus a des paroles dures contre les scribes et les pharisiens, il se sait membre du peuple d’Israël. Même s’il prend ses distances devant une forme de pratique religieuse, il ne rate pas une occasion de s’adresser à eux. Il n’hésite pas à répondre à leurs questions même piégées.
Jésus perçoit cette femme peu sympathique. Elle n’est pas de sa race. Elle vit dans le territoire de Tyr et de Sidon, considéré comme lieu des agnostiques, des incroyants. Jésus ne veut rien savoir d’elle.
L’attitude de Jésus est celle de toute personne enclavée, confinée dans une culture spécifique. Elle ressemble à l’attitude des complotistes qui ferment la porte à toute discussion tant ils croient avoir raison. Comment comprendre cette sortie de Jésus envers une femme qui ne lui a fait aucun mal, qui n’a jamais parlé en mal de lui ? Comment comprendre l’indifférence de Jésus devant tant de douleur, lui qui n’est que compassion devant la souffrance des autres ? Comment comprendre le cœur de pierre de Jésus devant celle qui casse les oreilles de ses disciples ? Comment comprendre que Jésus puisse traiter cette femme de petit chien ?
À première vue, l’attitude de Jésus est celle de tout automate qui décline ce qu’il a appris de la religion, du catéchisme de son enfance. Sa réaction est « normale » pour la mentalité de l’époque. Jésus montre où conduit un comportement bâti sur la religion, sur la non-écoute, sur la fermeture et l’exclusion. Il n’y avait aucune communication possible entre Jésus et cette femme qui lui criait sa souffrance.
Ce comportement se rencontre aujourd’hui dans ce vaste mouvement de la théorie du grand rassemblement dit d’extrême droite, identifiés sous le populisme, complotistes, nationalisme, protectionnisme, suprématie fasciste, totalitarisme. Aucune communication, aucun rapprochement n’est possible tant leur maître-mot est fermeture, exclusion. L’attitude de Jésus ressemble à la guerre que se livrent les religions entre elles quand le dialogue œcuménique n’existe pas.
Cette femme « décolle », déconnecte Jésus de son éducation. Son attitude de confiance lui impose de se dé-coïncider d’avec lui-même, de fissurer sa mission qui n’était que pour le peuple élu. Elle pousse Jésus à lui déclarer femme ta foi est grande ou confiance en moi est grande. La femme aurait pu lui répondre : toi, aussi, ta foi ou ta confiance en moi est grande.
Message de cette rencontre : faire confiance, croire en l’autre, croire qu’autrui est capable de bonté, ne pas en faire un monstre d’indifférence et de dureté, croire contre toute apparence, se contenter des petits signes de partage, croire qu’autrui cache aussi en lui de la bienveillance, de l’humanité, voilà qui convertit Jésus à devenir le Jésus de tout le monde alors qu’il se voit un Jésus réservé au peuple d’Israël. AMEN.
Commentaires
Merci pour ce Jésus qui se
Soumis par Marielle Marleau le jeu, 08/04/2022 - 16:53Merci pour ce Jésus qui se convertit à tout le monde.
Toujours SE CONVERTIR.
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