2021-B-Lc 13, 22-30- mercredi de la 30e semaine du temps ORDINAIRE- chemin d'humanté

Année B- mercredi de la 30^e semaine ordinaire (litbo30me.21) 27 oct-

Lc 13, 22-30 ; Rm 8, 26-30 : porte étroite, un chemin d’humanité.

 Pour plusieurs, l’évangile de la porte étroite n’est pas une bonne nouvelle tant il faut « arriver » à se dépasser, à être tous les jours meilleurs si l’on veut passer par cette porte, dite étroite. Mal compris, ce texte présente l’image d’un Dieu pervers, punitif, moralisateur, rejetant les non-purs. Songeons au beaucoup [sont] d'appelés et peu d'élus (Cf. Mt 22,14).

Ces images ne collent pas avec d’autres passages d’un Père accueillant les mal-aimés, généreux pour l'ouvrier de la dernière heure, pardonnant l’égarement de la brebis, compatissant le désarroi des disciples d’Emmaüs.

Bernard Feillet apporte sur ce passage un regard plein de fraîcheur. Pour lui, il ne s’agit pas de se demander qu’ai-je fait de ma vie, mais plutôt que suis-je devenu ? Suis-je devenu moi ? N’entendons pas ici ce moi comme un repliement sur soi. C’est un appel à devenir humain. La porte étroite a le visage d’un chemin d'Humanité. Nous avons besoin de sauver notre humanité.

Jésus a « modélisé », un chemin d’Humanité débordant de présence intense aux autres et totalement donné. Il est l’homme nouveau, qui sera toujours nouveau. Le salut qu’il apporte équivaut à « guérir » notre inhumanité. Et il y a beaucoup à guérir en nous pour naître à son humanisme qui nous divinise tant nous ne sommes pas totalement dans son « enclos » et qu’il est toujours à notre recherche.

 Ce chemin d’Humanité est accessible à tous ceux et celles (croyants ou pas) qui deviennent chaque jour un peu plus humain et qui font exister l’autre. Devenir chaque jour plus humain est un travail de toute une vie. Devenir chaque jour aussi humain que Jésus est presque inatteignable. Cette porte étroite se referme quand l’inhumain nous habite, quand mon apport à « l’avoir » de mon moi s’accroît. Difficile est le chemin qui mène à la Vie.

 Chacun a sa porte d’humanité. Chacun est unique pour la passer. La porte étroite est une porte personnalisée. À chacun de se désencombrer, de se délester pour glisser vers un humanisme intégral, vers une vie nouvelle, une nouvelle naissance. C’est à chacun de s’interroger sur ce qu’il lui faut délester de la recherche de son moi, pour arriver à l'essentiel, pour atteindre le soi qui est en moi (Dominique Collin). Paul affirme que ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ (Cf. Ga 4,20). On n'a jamais fini ce boulot de bâtir un moi [qui] est un Autre, pour citer Maurice Zundel. La connaissance de soi est le travail d'une vie (Thierry Janssen).

Travailler sur soi n’est jamais fini. Travailler notre devenir Jésus n’est jamais accompli parfaitement en nous. À force de creuser, à force de se connaître chaque jour un peu mieux, émerge une pépite, une brindille qui nous propulse en avant, nous oblige à avancer, à toujours avancer pour ne pas reculer. C'est journellement que nous devons passer par une porte étroite, celle de devenir qui je suis. 

Dans une lettre qu’il publiait à l’occasion du 7^e centenaire de la mort de Dante, le pape s’est arrêté sur un mot clé de son œuvre : « Transhumaner^[1]. Ce qui signifie que le poids de l’humain ne détruise pas le divin qui est en nous, et que la grandeur du divin n’annule pas la valeur de l’humain. C’est l’inouï de l’appel pour un humanisme évangélique (Moingt), le nouveau nom de la porte étroite.

Que l’Esprit saint vienne au secours de notre faiblesse pour diviniser l’humain en nous et humaniser le divin. Voilà le chemin, voilà la voie sacrée qui nous fait passer par la porte étroite, prenons-le. AMEN