Année B : samedi de la 29e semaine ORDINAIRE (litbo29s.24)
Lc 13, 1-9 ; Ep 4, 7-16 le temps que je bêche.
VVoià une page qui nous sort d’une orthodoxie rigide où Dieu est vécu comme insensible aux drames humains et loin de nos préoccupations. Elle nous sort d’images punitives de Dieu toujours bien ancrées en nos mémoires et ouvre une fenêtre sur un Dieu de l’autre possibilité pour utiliser une belle image du pape François. Ils n’ont rien fait de mal, ces Galiléens.
Beaucoup de chrétiens voient Dieu comme un simple résolveur de problèmes, quelqu'un qui nous protège. Nous ne voyons pas assez Dieu comme Souffle divin. Pour l’exprimer dans un langage imagé, l’attitude de Jésus nous fait voir les tragédies avec une nouvelle paire de lunettes.
Nos regards sont encombrés de scènes tragiques. Ils ont besoin de se convertir à la beauté. Laisse-le, le temps que je bêche. Nous trouvons dans cette affirmation tout le message de Jésus : transmettre la vie. Nous devons malheureusement constater avec tristesse que, dans de nombreuses situations, cette vision fait défaut [1](Bulle # 9).
Ça prend du temps, le temps que je bêche, pour comprendre que Dieu s’est fait l’un de nous pour que nos regards deviennent le sien sur le monde ; pour qu’ils s’ouvrent à l’espérance qui ne déçoit pas (Rm 5, 5), dis la bulle de l’année sainte. Ça prend du temps pour que nous ayons la vie en abondance (Jn 10,10). Ça prend du temps pour passer d’un dieu vertical, tout-puissant à un Dieu auprès de nous, d’un Dieu qui sait tout (je savais que tu étais exigeant, dit le 3e serviteur Lc 19,22) à un Dieu totalement présent dans le chaos, la souffrance et la confusion que nous vivons. Ça prend du temps pour devenir disciple et de ne plus vivre sous la crainte d’un Dieu écrasant. Ça prend du temps au vigneron, des années de travail pour que sa vigne porte du fruit. Le vigneron n’a pas détruit sa vigne. Il est tellement plus facile de détruire que de bâtir.
Cette tour de Siloé qui tombe, ce figuier qui épuise le sol nous fait rencontrer un Dieu qui danse avec nous (Père Richard Rohr ofm). Il est avec nous, auprès de nous et non au-delà de nous. Il fait alliance avec nos situations. Et Paul précise que c’est chacun de nous, pas seulement la courte liste dont il mentionne dans sa lettre, qui a la capacité de diviniser son regard pour voir autre chose que désolation et tristesse.
Devant les drames d’aujourd’hui, chacun de nous peut devenir pèlerins d’espérance. Chacun a reçu le don de voir et de présenter un autre Dieu au visage moins punitif, moins autocrate. Ce Dieu nous donne le temps pour renaître de son Esprit. C’est dans le monde réel avec ses guerres horribles que chacun de nous expérimentons un Dieu dont la patience est inatteignable et inimitable.
Quand saint Paul écrit je vous exhorte, il appelle chacun de nous à rester en tenue de service, à demeurer fidèle et avisé (Lc 12 42), tendu vers Dieu et capable de regarder les réalités quotidiennes dans toute son épaisseur, sa laideur parfois et de rester aussi les deux pieds sur terre et traduire pour aujourd’hui l’espérance de l’Évangile.
Laissons-nous nous émerveiller par ce Dieu de l’autre possibilité qui malgré notre connaissance imparfaite (1 Co 13,12), nous veut responsables de montrer à une population devenue indifférente son vrai visage. AMEN.
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