Année B : samedi de la 25ème semaine ORDINAIRE (litbo25s.24)
Lc 9, 43b-45 : annonce d’une vie intranquille.
Intranquillité, c’est le titre que je donnerais à ce passage. Jésus annonce à ses disciples ce que sera leur vie : une irréductible intranquillité. Il ne leur promet pas une vie paisible, une vie sans risque. Avec l’Évangile, comme avec toute naissance, commence l’irréductible intranquillité. Le Fils de l’Homme va être livré aux mains des hommes (Lc 9,44).
N’oublions pas l’environnement où vécu Jésus. L’intranquillité fait partie de sa vie. Jésus vivait en territoire occupé par un puissant adversaire. Il n’était pas un sujet romain. Son ne craignez pas décrit ce qu’il vivait, lui juif palestinien, un sans papier, affrontant un extrémisme religieux et violent. Il appelait sa terre natale à devenir un lieu de fraternité, de paix.
En écoutant Jésus prévenir ses disciples que son itinéraire se terminera dans un échec total, j’entends la demande de Jésus à Pierre avance au large, ne crains pas une vie d’intranquillitée, va affronter la tempête. Jésus invite Pierre, pêcheur expérimenté qui a passé la nuit sans rien prendre (Lc 5, 1-11), de ne pas craindre. Je suis avec toi. Ce sont des mots inconnus (Ps 80). Des mots qui ôte le poids qui chargeait ses épaules (v.7).
Ce chemin que Jésus annonce à ses disciples, personne ne peut le prendre s’il expérimente une distance entre Jésus et lui. Nous ne pouvons pas annoncer Jésus, prendre son chemin si nous nous tenons à distance de lui. Ce ne crains pas, Jésus le répète sans cesse. Marie, l’humble servante, l’a entendu avant d’ajouter que le Seigneur ait fait en moi de grandes choses. Ce chemin est si disproportionné pour nos seules forces humaines que personne ne peut le prendre en se tenant à distance de Jésus.
Lorsque Jésus annonce sa mort prochaine à ses disciples éplorés, il ajoute : il vous est bon que je m’en aille. Si je ne m’en vais pas, l’Esprit ne viendra pas à vous (Jn 16,7). Il comblera toute distance.
Après l’émerveillement de voir l’effet Jésus vient la désolation d’apprendre que tout finira par la déchéance. Après l’engouement de nos premiers pas à suivre Jésus, vient le questionnement de Marie du comment est-ce possible ? C’est la distance entre Jésus et nous qui détruit notre enthousiasme à le suivre. C’est notre proximité avec lui qui rend possible ce chemin. Il y a un temps où l'amour prévaut, puis vient un temps où la haine prévaut. Il y a un temps pour aimer et un temps pour ne pas aimer (Qo 3,8).
Mais la seule chose qui ne passera jamais, c’est l’assurance de Jésus qui nous dit comme à Pierre au retour sur le rivage ne crains pas. L’amour ne passera jamais. Mais les disciples ne comprirent pas parce qu’ils voulaient le succès et non l’intranquillité ; le confort et non le don de soi. La lecture disait tantôt souviens-toi de ton Créateur (Qo 12, 1).
Cette intranquillité nous maintient en vie. En marche. Aujourd’hui, les chrétiens intranquilles dans leur foi, ceux qui ne peuvent suivre un système de pensée, de croyances ou de dogmes non digestibles, d’une Église dont la parole est l’unique vérité à croire, sont nombreux. Ils s’exprimeront au synode qui se vivra au large sur une mer houleuse. Une vie tranquille n’existe pas. On a beau être croyant, être moniale, mais c’est l’intranquillité qui nous maintient debout sur nos barques fragilisées. AMEN.
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