Année C : mercredi Octave de Noël 5e jour (litcn05me.21)
Lc 2, 22-35 : mes yeux ont vu ton salut, Jésus.
Les bergers sont venus vers Jésus. Les Mages sont venus adorer l’enfant. Aujourd’hui, l’enfant connait son premier bain de foule en allant au Temple. Aucune publicité pour annoncer sa présence. Aucun coup d’éclat. Aucun ange du ciel pour préparer son entrée officielle comme membre des croyants.
Rien d’impressionnant, rien de brillant, rien de tonitruant pour ce fils de Joseph et de Marie. Il ne veut pas attirer l’attention des journalistes sur son origine hors normes. Un enfant en tout semblable à ses frères (He 2,17), désarmé, sans puissance, sans titre de gloire, se fait remarquer par un vieillard qui élève la voix et pousse des cris de joie. Le prenant dans ses bras, il voit le salut (Cf. Lc 9, 29). Il voit briller la lumière dans les ténèbres, une lumière que les ténèbres n’ont pu vaincre (Jn 1, 4-5).
Dans nos mentalités actuelles, Jésus aurait dû entrer par la grande porte, entouré des grands de ce monde. Aujourd’hui, si quelqu’un veut faire une annonce importante, il s’offre une conférence de presse dans un endroit accessible. Il invite tous les grands médias. Jésus ne recherche pas les applaudissements. Cette entrée ouvre sur le mystère de l’œil. Elle est une proclamation de ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu (Cf. 1 Cor 2, 9). L’essentiel est invisible à nos yeux. Les poètes le chantent : c’est dans le noir que la lumière est belle ; dans le doute qui brille la foi.
Il faut contempler cet effacement de Jésus qui entre dans notre monde, en chacun de nous, par la porte de sa petitesse. Sa grandeur s’offre à voir dans sa petitesse. Laissons-nous traverser par ce scandale de l’abaissement. Le scandale de la mangeoire (Pape François). Jésus ne chevauche pas dans la grandeur, mais descend dans la petitesse. Celui qui embrasse l'univers a besoin d'être tenu dans les bras d’un vieillard. Celui qui a fait le soleil a besoin d'être réchauffé par le regard admiratif d’Anne. C’est la pierre angulaire de notre foi. La grandeur de Jésus a besoin de mystère. On admire mal ce que l’on connaît.
Cette entrée discrète n’est pas seulement une célébration, mais annonce la trajectoire de toute évangélisation. Combien de fois rêvons-nous de plans apostoliques, expansionnistes, méticuleux et bien dessinés, typiques des généraux défaits ! (Cf. EG # 96). Nous devons nous convertir à la sobriété. Il ne s’agit pas d’avoir de la visibilité, de s’autoriser tous les pouvoirs sur les autres, de se créer des espaces de pouvoir (Cf. EG # 222). Notre présence chrétienne doit être une étincelle de lumière au milieu des opacités, des questionnements, des tempêtes qui assaillent notre Église. L’effacement porte les germes de la fécondité. Le sommes-nous ?
En accomplissant la loi, les parents de Jésus n’ont pas seulement amené leur fils à la lumière, ils ont apporté la lumière dans notre monde. La Lumière qui brille dans les ténèbres, que les ténèbres ne peuvent vaincre (Cf. Jn 1, 4-5). Dans sa récente visite en Grèce, le pape disait que la rédemption ne commence pas à Jérusalem, ni à Rome, mais dans l’effacement. Ce n’est pas étonnant que Jésus soit si facilement oublié jusqu’à vivre sans le voir dans nos vies.
Il n’est pas facile de comprendre que la petitesse est la porte d’entrée de Jésus pour venir vers nous. Son entrée incognito dans le temple rappelle que nous devons avoir le courage de « descendre » de nos idées de grandeur, de pouvoir et que seuls des gens simples comme Syméon et la prophétesse Anne peuvent le reconnaître. Cette entrée ouvre sur une vérité inconfortable et déconcertante : quel avantage, en effet, de gagner le monde entier si nous passons nos vies hors du Temple or de nos temples intérieurs où il nous attend ?
Après avoir désiré toute sa vie ce contact intime avec Dieu, Syméon, aujourd’hui, a senti tout contre sa poitrine la chaleur d’un bébé qui gazouille tout en étant le Logos éternel et la Lumière des nations. Partageons son immense soulagement et sa joie en clamant nous aussi que maintenant nos yeux mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples, lumière pour éclairer les nations et gloire de ton peuple Israël. Ne refusons pas à Dieu de trouver ses délices avec les fils des hommes (Pr 8,31) jusqu'à désirer habiter dans nos petitesses, dans tout ce qui n'est pas brillant de lumière en nous. AMEN.
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