Année B- samedi de la 30e semaine ordinaire (litbo30s.21) 30 oct.
Lc 14, 1.7-11 : Rm 11, 1-2a.11-12.25-29 : notre futur moi.
Chacun est appelé à faire sa part. Et quelle est la part de Dieu ? La réponse nous est donnée dans ce passage que nous venons d’entendre. Celui qui s'abaisse sera élevé (Lc 14 :11). Jésus offre un nouvel art de vivre. Il présente une alliance nouvelle, un monde sans rivalité ou personne n’écrase personne, où il n’y a plus ni esclave ni homme libre (Cf. Ga 3, 28). Il présente notre futur moi, pour citer le titre d’une conférence internationale en avril 2017, où l’avenir est profondément lié à celui des autres et qui surmonte la différence sociale entre les deux sexes, établissant une égalité entre l'homme et la femme[1].
Pour promouvoir son projet de société, son royaume, Jésus expérimente le changement qu’il veut voir établir autour de lui (Gandhi). Toute réforme commence à l’intérieur de soi-même. Plutôt que de donner un conseil de bonne éducation, Jésus se lance dans l’aventure de faire sa part pour changer les regards. Plutôt que de perdre son temps à dénoncer l’attitude de ceux qui portent des phylactères, qui prêchent haut et fort, Jésus vit une belle proximité avec toute sorte de monde. Jésus ne fait pas fait semblant de se tenir à la dernière place, pour être invité à monter plus haut, ce qui serait de l’hypocrisie.
Jésus initie un mouvement citoyen qu’il appelle fraternité où chacun doit faire sa part pour améliorer un vivre ensemble épanouissant pour tout le monde. Sa grande humanité impressionne tellement que les gens se disent : c’est génial, il faut faire pareil. Voilà le commencement d’une bonne nouvelle.
À travers l’image des invités aux noces, Jésus ajoute de la pression à un système basé sur la recherche de la première place, sur la loi du plus fort, de la compétition qui génère de l’exclusion pour privilégier un vivre fraternellement, sans ambition de tout contrôler. Il sème une petite graine dans le sol et elle produit du cent pour un. On pourrait même publiciser sa démarche : filiation humanitaire. Chacun apporte ce qu’il est. Génial.
Cette parabole est une invitation à une prise de conscience, à une nouvelle conception du monde. Ce n’est plus la force et l’exclusion qui dominent, c’est la collaboration et l’inclusion. De génération en génération, on transmet la croyance erronée que la meilleure place est en haut de la pyramide. Jésus inverse les regards. Il offre à voir une sobriété heureuse (Pierre Rabhi).
Par l’exemple de la dernière place, Jésus confirme qu’il est vraiment tout-puissant, c’est-à-dire capable de tout jusqu’à se faire petit, sans voix, sans résidence hautement protégée par des gardes armés, soumis à ses parents et qu’il termine sur une croix, comme un esclave.
L'Incarnation, c’est la dernière place. C’est Dieu qui se défroque des vêtements de puissance et de gloire. Voilà la surprise que Dieu nous réserve. Il se rencontre dans les plus bas de l’humanité. Tant qu’on n’a pas compris que la toute-puissance de Dieu est une toute-puissance d’effacement de soi, tant qu’on n’a pas expérimenté dans sa propre vie qu’il faut plus de puissance d’amour pour s’effacer que pour s’exhiber, tout ce que je viens de dire est littéralement inintelligible[2].
La dernière place est un chemin d’excellence qui n’est pas synonyme de suffisance ni de médiocrité. L’excellence, c’est d’être à notre place. Le seul futur qui mérite notre attention, c’est d’inclure tout le monde[3]. En prenant la dernière place, Jésus nous fait comprendre son héritage le plus précieux qu’il nous lègue. Notre futur moi se réalise par cette sortie de nous-mêmes pour rencontrer l’autre dans le but de l’aimer pour ce qu’il est, sans condition. Paul décrit cette sortie de soi à travers l’image de l’olivier sauvage qui greffé sur l’olivier blanc, devient fertile. Il commence une nouvelle existence qui, subitement et par enchantement, devient « merveilleuse ». Incroyable, mais vrai, la dernière place fait surgir l’image de quelqu’un tellement tout-puissant qu’il opte pour élever les autres plutôt que de s’élever.
Dans sa réflexion pour la fête de l’Assomption, le pape François a posé une question qui rejoint cette parabole : demandons-nous, chacun dans son cœur : comment se porte mon humilité ? AMEN.
[1]https://www.vaticannews.va/fr/pape/news/2021-09/audience-generale-8-septembre-2021-pape-francois.html
[2] François Varillon Joie de croire, Joie de vivre, éditions du Centurion, 1982, pages 76-77.
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