Année C : mardi 5e semaine du carême (litcc05m.16)
Jn 8, 21-30: sommes-nous des chrétiens de pâtisserie ?
Ma question est simple : comment vivre d'en haut en étant d'en bas ? Comment nous extraire de ce recourbement sur soi, de cette vaine gloire, disent les Pères de l'Église, plutôt que de nous tourner vers Dieu ? Comment nous éloigner de la mondanité dont parle souvent le pape François pour privilégier le style de vie de Jésus ? Le tentateur veut nous persuader de juste goûter aux choses d'en bas. Quand nous commençons à juste goûter, nous finissons par ne plus juste goûter à Dieu. Le dilemme de la mondanité, c'est à la fois choisir Jésus et le monde. Vous ne pouvez servir deux maîtres (Mt 6, 24). L'Évangile est l'Évangile. Soyons l'Évangile en action.
Aujourd'hui, la tendance chez plusieurs croyants est d'opter pour vivre l'Évangile sans la Croix, sans renoncer à rien, sans dépouillement. Avec son style imagé, le pape affirme que la mondanité nous fait chrétiens de pâtisserie, une belle tarte, quelque chose de très doux, mais pas de vrais chrétiens (discours à Assise). Pour bien se faire comprendre, le pape utilise des images fortes : la mondanité, c'est un cancer, une lèpre, un ver rongeur qui détruit lentement, une menace plus dangereuse que l’apostasie, car plus subtile. L'apostasie, c'est renier sa foi.
Pour suivre Jésus où il va, je m'en vais et vous ne pouvez pas y aller, il n'y a aucun compromis possible avec la mondanité spirituelle ou le narcissisme chrétien compris comme une recherche de soi sans ouverture aux autres. Il y a l'esprit du monde, obstacle à suivre Jésus. Il y a l'esprit de Jésus, chemin pour aller où il va. Chemin vers un style de vie qui sera béatitude.
Mais cette vie qui est béatitude a une direction, celle que Jésus a suivie et qui passe par son dépouillement jusqu'à la Croix. Rencontrer Jésus, c'est nous dépouiller, non de nos vêtements, mais de l'esprit du monde qui est l'ennemi de Jésus (François, Assise, octobre 2013). L'attachement aux choses d'en bas est un grave danger, une sorte d'esclavage qui nous replie sur nous-mêmes.
C'est notre rencontre avec Jésus qui nous permet de vivre ce bonheur d'en haut les deux pieds sur terre. Notre béatitude consiste à entretenir une bonne relation avec Jésus jusqu'à élever nos regards au-delà de la Croix. Jusqu'à élever nos regards sur une manière de vivre selon les béatitudes. Elle donne de la hauteur et de l'intensité à nos vies. Son style de vie est celui du détachement de tout ce qui est éphémère. Ce qu'il y a de plus profond dans la vie, c'est notre rapport avec Dieu.
Cette page que nous venons d'entendre et qui invite à prendre de la hauteur, de vivre des choses d'en haut, devrait nous ouvrir à l'émerveillement. Notre union à Jésus commence et s'achève dans l'émerveil-lement. Elle nous libère de nos attachements au matériel pour vivre d'en haut.
L’émerveillement suprême est de nourrir notre vie quotidienne de la croix qui fait de nous des chrétiens. Notre refus de La contempler conduit à toutes sortes de récrimination contre Dieu dont parle la première lecture. Quand le désenchantement nous habite, quand ce poison du mécontentement nous paralyse, c'est en regardant la croix que nous en sommes délivrés.
Thérèse de Lisieux, dans une lettre à sa sœur Céline disait : regarde sa Face adorable ! Regarde ces yeux éteints et blessés! Regarde ces plaies, regarde Jésus dans sa Face, là tu verras comme il nous aime.
Élevons notre regard vers la croix. Elle est le chemin de la terre au ciel. Elle nous permet de vivre ici-bas de la béatitude d'en haut. Puissions-nous comprendre que le chemin pour vivre des réalités d'en haut passe par la folie de la Croix. AMEN.
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