Année A : Dimanche 18e semaine ordinaire (litao18d.08)
Matthieu 14, 13-21
Nous avons cette redoutable mission, cette mission inatteignable de « vivre comme des paroles de Dieu ». Cette seule affirmation devrait nous donner du vertige. Notre joie, notre bonheur, notre vocation, n’est pas de savoir quelque chose au sujet de Dieu- les agnostiques aussi connaissent quelque chose de Dieu en le niant- mais de Le posséder en nous-même. Il ne s’agit pas de démontrer l’existence de Dieu mais de Le montrer. Il s’agit - et la manière d’agir de Jésus refusant de renvoyer la foule à jeun le confirme- de nous soucier des autres. « Si le parfum de ceux qui approchent le Christ n’embaume pas », s’interroge saint Jean Chrysostome « comment appellerons-nous alors ce parfum ? » Il précise : « Si tu es chrétien, tu dois dégager l’odeur du Christ ». Comment ? – et cette page de Matthieu nous l’indique - en appréciant la nourriture que Dieu nous offre – du pain et du poisson - et en nourrissant comme Dieu. « Donnez-leur vous-mêmes à manger »
Nous nourrir de Dieu. Nous ne finirons jamais de réaliser que pour nous nourrir de Dieu – cela semble tellement inconcevable dans notre société où tout coûte cher, tout se paie - nous n’avons « rien à dépenser, rien à acheter, nous n’avons qu’à manger de bonnes choses » (1ière lecture). « Vous qui avez soif, venez, voici de l’eau ». Avec beaucoup de réalisme, le texte ajoute nous « dépensons de l’argent pour ce qui ne nourrit pas, pour ce qui ne nous rassasie pas ».
Depuis le début de la Création, Dieu nous a de mille manières, nourris de sa Présence. Loin de refroidir son désir de se rapprocher de nous, de créer des liens avec nous, le comportement d’Adam l’a pressé de sortir à notre recherche. « Après avoir parlé par les prophètes », l’incroyable, l’inimaginable se produit : pour nous dire sa Présence, pour nous exprimer comment il a faim de nous, « il nous a parlé par son Fils ». « Il nous a tout dit par son Fils » (Jean de la Croix). Ce Fils et c’est l’originalité de notre foi chrétienne qui laisse dans l’étonnement les autres cultures religieuses, a vécu une vie pleinement humaine, de la naissance à la mort. Il s’est fait humain. Un Dieu « touchable» « palpable » qui marche, mange, boit, se déplace, parle comme nous.
Jésus ne s’est pas contenté de naître. Il ne s’est pas contenté de se rapetisser, « lui qui était au commencement et par qui tout a été fait » (saint Jean), pour nous prouver à travers les âges qu’il était une Présence réelle sur nos routes, Jésus a inventé ce quelque chose encore plus inimaginable, la trouvaille des trouvailles, il a nourri avec quelques pains une foule sans nombre. Il est devenu un Dieu qui s’est fait nourriture. Dans le désert, Jésus anticipait ainsi ce qui allait devenir le sacrement de sa Présence réelle dans l’histoire. Jésus n’a pas seulement souhaité vivre avec nous, n’a pas seulement souhaité de vivre en nous, Il a choisi, par ce geste du pain multiplié, de nous exprimer qu’il voulait devenir nous, devenir chacun de nous, qu’il voulait être pour chacun de nous une « Présence réelle ».
Si en célébrant Noël, si en célébrant Pâques nous n’avons pas compris que nous étions devant une Présence réelle de Dieu, Jésus nous le fait comprendre en nous disant : « Prenez et mangez ». Jésus a inventé cette immense merveille, ce « joyau incomparable » dit Maurice Zundel pour nous dire qu’il est vivant, qu’il continue à nous nourrir aujourd’hui comme il l’a fait hier dans le désert.
Mais pour que cette merveille, ce joyau de notre foi, cette perle précieuse garde tout son sens, il faut y croire. Le père Buttet, dans son témoignage au Congrès eucharistique de Juin 2008 à Québec, donnait l’exemple suivant : « une petite fille de quatre ans à qui l’on demandait si elle voulait aller à la messe avec ses parents qui fréquentait régulièrement l’eucharistie ou avec sa tante « Toto » répondit sans hésiter : « avec Toto ». Mais pourquoi demande la mère ? Avec toute la spontanéité d’un enfant, elle répondit « parce qu’elle, elle croît ». Et nous ?
Maurice Zundel répétait souvent en parlant de l’eucharistie : « Vivez-en pour qu’on le sente ». Vivons-en de ce pain pour montrer par notre vie « vous tous qui avez soif, venez voici de l’eau ». Vous tous qui avez faim, venez « mangez de bonnes choses, régalez vous d’un repas savoureux ». (1re lecture) Savons-nous nous régaler de ce pain que nous offre cette table?
Agir comme Jésus. En nous disant « donnez-leur vous-mêmes à manger », Jésus nous dit que nous ne pouvons pas partager ce pain dans la liturgie sans donner à manger aux affamés nombreux. Nous ne pouvons pas nous prosterner devant Lui et lui dire durant l’élévation « Mon Seigneur et mon Dieu » sans nous prosterner devant sa Présence réelle cachée en chaque personne rencontrée. Dieu a faim de nous voir devenir comme Lui, EUCHARISTIE. Il a faim de nous voir capable de montrer que la seule chose qui compte, c’est de reconnaître sa PRÉSENCE réelle de jour en jour, de toujours à toujours. Que cette eucharistie nous transforme en Présence réelle de Jésus.
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