2024-B- Dimanche de la 14e semaine ORDINAIRE (litbo14d.24)
Mc 6 1-6 : de quel prestige s’agit-il ?
Un mot est vieux comme le monde : résistance. Les trois lectures attestent qu’il y a de résistance à devenir une terre de justice et d’amitié entre nous. Nous étonner du contraire serait une fausse nouvelle. Mais cela ne doit pas freiner nos énergies à proclamer notre espoir (1 Tim 1, 1) d’une terre fraternelle.
Les résistances à la Parole de Dieu ne sont pas seulement une réalité extérieure de nous. Cette terre fratricide, divisée n’est pas seulement une réalité extérieure. C’est aussi une réalité profondément ancrée en nous. Que l’on songe à l’appui que nous donnons à ce mouvement de fermer nos frontières aux étrangers et au migrants. Ce mouvement fait et défait des gouvernements. Toute résistance à l’accueil des étrangers est une attaque frontale avec ce geste d’accueillir ces gens de toutes races et couleurs qui frappent à nos portes. J’étais sans pays et vous m’avez accueilli.
Jésus a mené un combat permanent contre l’injustice, l’exclusion non en écrasant les autres, mais en vivant la parabole du bon samaritain (Lc 10, 25-37) qui est une contestation d’une culture du rejet des étrangers. Les trois lectures nous offrent un panorama de différentes sortes de résistance à la parole de Dieu. Le prophète Ézéchiel, l'apôtre Paul et Jésus lui-même ont affronté beaucoup de résistance.
Ézéchiel a mal été accueilli par les gens. Il a expérimenté de la résistance. Les fils ont le visage dur et le cœur obstiné. L’histoire qu’on appelle sainte est parsemée d’opposition et l’entêtement du peuple à ne pas écouter la loi du Seigneur. Elle est une longue histoire de résistance au rêve de Dieu d’un monde sans guerre et sans division.
Paul a résisté toute sa vie à cette tentation de se surestimer qu’il appelle son écharde. Il a refusé d’être un super héros. J’accepte mes faiblesses, les insultes, les contraintes, les persécutions. Quand je suis faible, je suis fort. Il y a quelque chose de plus grand qu’un fort qui tient ferme : c’est un faible qui met tout son cœur à se relever[1].
En Haïti, dans Cité Soleil où règne des gangs de rue, une religieuse, Sœur Paësie, rayon de soleil dans la nuit, se fait régulièrement voler son auto : Je finis toujours par aller les voir, complètement démunie. Je crois que ça les flatte, ainsi que leur autorité[2]. Et elle retrouve son auto indispensable à son travail dans cette cité, la plus pauvre d’Haïti.
Jésus a affronté les puissants législateurs qui dénigraient sa « performance » dans le temple. D’où lui vient cela ? Qui prétends-tu être ? Jésus se présente dans le temple comme une petite graine, une perle précieuse, un trésor caché, une poignée de levain (Mt 13, 1-33), comme quelque chose de précieux et de riche, mais en même temps quelque chose de petit et de discret. Sa parole n’est pas entendue.
Ézéchiel, Paul et Jésus ont résisté à devenir tout-puissant, d’avoir du succès. Ce chemin n’est pas spontanément le nôtre. Ce matin, les lectures nous interpellent et pas à peu près. Acceptons-nous d’être des évangélisateurs impuissants ? Des grands-parents impuissants ? Résistons-nous à la tentation de la visibilité. Ce chemin est une écharde, notre écharde quotidienne.
Partager l’Évangile, dire notre foi, est difficile, voire suspect. Avant de parler, il faut comme l’a fait un inconnu, un soir marchant sur le chemin d’Emmaüs, écouter. De quoi parliez-vous en chemin (Lc. 24,17) ? Cette fraternelle curiosité de cet inconnu change l’esprit de la mission. Il s’agit moins d’apporter des réponses préexistantes que d’écouter, d’aider les marcheurs de la vie à formuler et approfondir les questions qui les habitent.
L’heure n’était sûrement pas à la démission. Plutôt à une variété de chemin. Présence affectueuse de la grand-mère, repas convivial avec un voisin, un bref échange imprévu sur Jésus, etc. Une certitude : attention aux missionnaires « professionnels » qui assènent un message sans prendre le temps ni les moyens de l’écoute. AMEN.
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