Année B : jeudi 27e semaine ordinaire (litbo27j.18) 11 oct.
Lc 11, 5-13 ; Ga 3, 1-5 : ne menons pas une vie de schizophrène
Nous aimons évoquer nos racines chrétiennes; nous aimons nous en réclamer et, du même souffle, nous les récusons facilement ou les nions tout simplement quand elles exigent de nous des comportements «hors normes», des comportements aux odeurs évangéliques. Paul vient d’exprimer la même chose aux Galates : nous demandons l’Esprit-Saint […] et nous finissons par un [esprit] de chair. Aux Corinthiens (1 Co 5, 1-8), il écrivait qu’on entend dire partout qu’il y a chez vous un cas d’inconduite, une inconduite telle qu’on n’en voit même pas chez les païens […]. Vraiment, vous n’avez pas de quoi être fiers. L’évangile et l’esprit de Jésus ne permettent pas une double vie. Il n’est pas toujours facile d’avoir des gestes clairs, une parole claire. Qui a une parole à 100% claire ? Une parole à 100% baptismale ?
Le baptême a modifié en nous notre ADN pour implanter en nous l'ADN de Jésus. Nous sommes fils de Dieu et agissons en fils de terrien, sans élévation spirituelle. Nous sommes « nés de nouveau » par le baptême et invités à être des hommes nouveaux. Dire que ta volonté soit faite sans vouloir qu’elle se réalise, c’est créer un véritable court-circuit en nous, une onde de choc. Nous désirons souvent autre chose que ce que nous demandons.
Il est souhaitable, demande Thérèse d’Avila à ses compagnes, que vous sachiez bien ce que vous demandez dans le Pater noster, de façon que, si le Père éternel veut bien vous l’accorder, vous n’alliez pas lui répondre par un insolent refus. Ainsi, examinez mûrement si votre demande est à faire. Autrement, ne la faites pas, et priez Sa Majesté de vous éclairer de sa lumière (Chemin de perfection, chapitre 30, § 3).
L’Esprit-Saint, demande Paul, l’avez-vous reçu pour avoir pratiqué la loi ou pour avoir écouté le message de la foi ? C’est un peu fou, observe Paul, de désirer une chose et de vivre d’autre chose. En langage médical, on appelle cette dichotomie la schizophrénie. C’est souffrir d’une double personnalité, une perte de contact avec la réalité. On dit telle chose et on pense ou agit autrement. On connait bien cette maladie en nous.
Que ce soit pour l’évocation de nos racines chrétiennes ou pour la demande de l’Esprit-Saint, ne pas porter les fruits, c’est dire que je ne veux pas être chrétien. Être saint. C’est mener une double vie. Hypocrite, martèle souvent le pape François dans ses homélies matinales.
Prenons une image : que pensez-vous d’un ami qui vous demande de peindre son salon en vert en vous donnant un seau de peinture rouge ? Au mieux, qu’il est daltonien ; au pire, qu’il teste votre degré d’humour ou d’honnêteté ! Le chrétien d’aujourd’hui n’est pas loin d’être dans la même situation. La réalité lui apparaît plus noire qu’étincelante. Le drame chrétien, son déchirement, c’est qu'étant fils de la lumière, il agit en fils de ce monde (cf. Lc 16, 8).
C’est bien là le drame de notre ami dans l’évangile; il est au lit et on vient l'importuner pour lui demander trois pains parce que des amis imprévus sont arrivés chez lui. L’attitude évangélique aurait été un empressement à se lever et lui offrir avec joie ce service. L’attitude de fils de ce monde a été plus forte, c’est pour s’en débarrasser qu’il lui a donné les pains demandés. Nous vivons une situation qui mène à la schizophrénie. Vouloir être chrétien sans vouloir être un nouveau genre d’humain, c’est se pourrir la vie. Se rendre la vie misérable.
À votre contemplation : demandez et vous recevrez. Demandons de mener une vie le plus possible en harmonie avec celle de notre baptême. Laissons l’esprit de Jésus nous dire : va, prends ton baptême, rentre chez toi, ta foi t’a sauvé. AMEN.
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