Année C : Mardi de la 30e semaine ordinaire (litco30m.16)
Luc 13, 18-21 : de petit à grand
Le message de la graine de moutarde est peu compliqué. C’est dans les petites choses de chaque jour, dans les petits gestes anodins, que prennent naissance de grandes choses. À maturité, le petit grain de moutarde s’élève à trois ou quatre mètres. Il est devenu un arbre. Le chemin des petits gestes ouvre sur de grandes réalisations. Jésus, le premier, a promu les petites choses au rang de la sagesse. Ce qu’il y a de fou dans le monde, dit Paul, c’est ce que Dieu a choisi pour confondre les grands (1 Co 1, 27).
Mais nous portons notre attention sur de grandes choses, de grands projets. Nous ne sommes pas immunisés contre le smog de la grandeur. L’évangile nous apprend à nous méfier de tout ce qui est puissant. Toute vie spirituelle commence par la semence en nous d’un grain de blé, de moutarde ou encore semée en nous par quelqu’un d’autre. Par Jésus. Par sa parole qui, mine de rien, s’enfonce en nous.
Petites choses. Tout dans l’évangile élève la petitesse en chemin de grandeur. Nazareth était un petit village sur une carte géographique. De Nazareth peut-il sortir quelqu’un de grand (Jn 1, 46) ? Et plus petite encore que Nazareth, Bethléem est un lieu où l’histoire culbute dans une aventure inédite. Toute la vie de Jésus est imprégnée de la culture du plus bas. De la dernière place. Il a pris la condition d’esclave.
L’évangile nous montre comment avec de petites choses se réalisent de grandes merveilles : quelques pains, et deux poissons (cf. Mt 14, 15-20), un grain de moutarde (cf. Mc 4, 30-32), un grain de blé qui meurt en terre (cf. Jn 12, 24), un seul verre d’eau donné (cf. Mt 10, 42), deux piécettes d’une pauvre veuve (cf. Lc 21, 1-4), l’humilité de Marie, la servante du Seigneur (cf. Lc 1, 46-55). Ce sont là des petites voies qui ouvrent sur de grandes réalisations inattaquables par les mites de ce monde.
Petites choses. Petites gens. Dieu n’a pas choisi comme apôtres les plus intelligents de son temps. Il a choisi des illettrés qu’il a rendus capables de parler la langue du Christ pour citer la belle formule de l’académicien Max Gallo.
La théologie de ce qui est petit est une catégorie fondamentale du christianisme. Notre foi part du principe que la grandeur particulière de Dieu se révèle précisément dans l’absence de puissance. […] La plus petite force d’amour est plus grande que la plus grande force de destruction (Benoît XVI).
Ce n’est pas par des pensées élevées et beaucoup d’étude, mais par la petitesse d’un coeur humble et confiant que l’on connait Dieu. Ce n’est pas en accumulant honneurs et prestiges, biens et succès terrestres, mais en se vidant de soi-même qu’on porte du fruit. C’est en développant la révolution de la fragilité.
Jésus, disait la grande petite Thérèse, ne demande pas de grandes actions, mais seulement l’abandon et la reconnaissance (Manuscrit B, 1). Malheureusement, écrivait-elle, [et c’est aussi vrai aujourd’hui], Dieu trouve peu de cœurs qui se livrent à lui sans réserve, qui comprennent toute la tendresse de son Amour infini (ibid.).
Nous doutons du réalisme de message central de l’Évangile. Regardons l’Église. Elle est née en format plus que petit. Elle est maintenant un arbre qui abrite tous les oiseaux du ciel. La Parole de Dieu touche tellement en profondeur les humains qu’ils viennent se loger dans l’arbre Jésus. S’y abriter.
Ce grain de moutarde n’a pas encore atteint son plein développement. Il continue à croître jusqu’au retour du Fils de l’homme que cette fin de l’année liturgique nous annonce. AMEN.
Ajouter un commentaire