Année C : samedi de la 3ière semaine AVENT (litca03s.24) 21 dec.
Lc 1, 39-45 : lueur d’aube
Le cœur est le lieu de départ et d’arrivée de toute rencontre. La devise du Cardinal Newman le cœur parle au cœur nous donne une indication de l’inexprimable que vivait Marie et qu’Élisabeth a bien ressenti en la déclarant bienheureuse entre toutes les femmes. Alliance de cœur. Mariage de cœur. L’irrésistible émerveillement de Marie fit voir à Élisabeth quelque chose de l’irrésistible émerveillement qu’elle vivait à l’âge avancé.
C’est à partir du cœur que l’oreille entend. Seul le langage du cœur peut exprimer l’inexprimable bonne nouvelle que Marie venait d’entendre. Nul mot humain ne peut verbaliser l’émerveillement qu’elle a dû éprouver. Cette rencontre fut vécue au-delà des mots humains, dans un cœur qui parle à un cœur. Quand l'éternité rentre dans le temps, les mots humains déraillent et ne sont plus audibles. Puissant le langage du cœur. Ce fut celui du président élu des États-Unis alors que sa rivale s’adressait à la tête.
Tellement touchée, ébranlée par l’inédit de ce qui lui arrive, Marie dit le texte se lève. C’est le mot de la Résurrection. Elle part en hâte, c’est la réponse du peuple hébreu lors de la Première Pâque.
Il ne faut pas regarder cette scène de Marie allant visiter sa cousine comme un événement de plus à ajouter dans la liste de notre histoire sainte. Cette visite annonce un grand bouleversement. C’est l’affirmation d’une femme aux pieds sales, assise sur le sable du monde, avec des sandales usées, et tant de fatigue dans les veines[1]. Dans l’échange des cœurs entre Marie et Élisabeth se perçoit l’arrivée d’un nouveau Dieu. D’un Dieu qui vient parler à notre cœur.
Langage du cœur aussi que les mots d’Élisabeth annonçant à Marie ce qu’elle vit : l'Esprit viendra sur toi […] Heureuse es-tu parce que tu as cru. Langage du cœur que la réponse de Marie mon âme exalte le Seigneur.
L’empressement de Marie n’est pas d’aider sa cousine Élisabeth. Le texte dit que Marie est revenue avant la naissance de Jean-Baptiste. Son empressement vient de l’intensité de la joie qui l’habite. Elle ne peut retenir sa joie. Elle doit en parler à quelqu’un.
C’est frauduleux de souligner cette visitation de Marie, cette sortie de Marie si elle ne conduit pas à vivre ce que nous célébrons. Aller vers les autres, c’est stimulant pour ne pas s’installer dans la médiocrité et continuer à changer (EG # 121).
En ces heures de grandes intensités, sommes-nous empressés de montrer comme l’exprime la mystique d’ici Dina Bélanger que je vis en son adorable présence […] que le Christ vit à ma place ? De montrer que Dieu [est] en moi et moi en lui (Élisabeth de la Trinité). Au terme de son roman, le curé de Campagne, l’auteur Georges Bernanos écrit et cela me dérange que nous sommes morts à l’intérieur de nous si nous ne vivons pas comme Jésus dont la vie a montré qu’il était habité par le Père.
La lecture du Cantique nous met en mode visitation. Sors pour aller goûter la beauté du printemps. Lève-toi, mon amie, ma toute belle et vient. Regarde l’hiver est passé. Quitte les cachettes des rochers de tes servitudes, va à sa rencontre. C'est la demande d'un Dieu qui est tombé amoureux de nous, qui se fait mendiant de notre amour, qui descend au plus bas pour pouvoir nous trouver. Voilà le mystère caché de Noël. Comment ne pas être stupéfaits ? Émerveillés ? AMEN.
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