Année B : samedi de la 34e semaine du temps ordinaire (litao34s.24)
Mt 4, 18-22 : Voir avant d’entendre.
Deux observations. D’abord la rapidité d’André à répondre à l’appel de Jésus. C’est presqu’une réponse impulsive, irréfléchie, émotionnelle, tellement qu’il risque de regretter. Il délaisse sur le champ son gagne-pain. Sans hésiter, il délaisse aussi Jean-Baptiste pour l’Agneau de Dieu.
L’autre observation se trouve chez Jean. Jésus se fait voir. Il a voulu être visible avant d'être audible. Il a voulu qu’André et Pierre le contemplent de leurs yeux avant que s’ouvrent leurs oreilles. Venez et vous verrez. Ils virent où il demeurait, et ils restèrent auprès de lui ce jour-là (Jn 1, 37-39). Il faut le noter, tout au long de l’Évangile, Jésus se contente d’être présent au point qu'on dira de lui qu’il est le fils du charpentier, de Marie, que nous connaissons sa parenté (Mt 13, 55). Dans le temple, on avait les yeux fixés sur lui.
De ces deux observations, j’en conclus qu’il s’agit d’abord de voir Jésus, de le rencontrer avant de l’entendre, avant de l’écouter. C’est la manière d’agir des amoureux. On se voit avant de s’entendre. Ma question : qu’ont vu les deux disciples André et Pierre pour tout quitter sur le champ et suivre un inconnu ?
Je risque ici deux pistes sans prétendre être les seules possibles.
Première piste. André a rencontré quelqu’un qui l’a profondément ébloui. Hypnotisé. Il fut métamorphosé par la proximité de Jésus. Par son regard posé sur lui. Il a rencontré l’Agneau de Dieu comme on rencontre un ami, un homme, une femme, à qui l'on a donné sa vie, comme quelqu'un qui a changé notre existence et notre route. Tellement fasciné par cette rencontre, tellement homme nouveau qu’il fait communauté avec Jésus. Rencontre avant d’entendre, avant d’être écoute.
La foi chrétienne est soit une rencontre avec Lui vivant, soit elle n’existe pas[1]. André a fait l’expérience d’un Jésus qui comme l’exprime diverses paraboles est semblable au grain de blé qui s’enfouit dans les coeurs, au maître de la vigne qui appelle des non recherchés à sa vigne, qui mange avec tout le monde. Il expérimente un Jésus non dominateur, non contrôlant. Un Jésus qui surprend par la nouveauté de son comportement. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur (Mt 20,25). Il comprend qu’il lui faut être sel de la terre. Enfouissement.
Deuxième piste. Sa rencontre fut d’une telle profondeur qu’il s’empresse de l’annoncer à d’autres (Jn 1, 40-43). André est celui qui montre Jésus. Il montre à Pierre le trésor qu'il ne connaissait pas encore : Nous avons trouvé le Messie (Jn 1,41). Par attraction (Benoit XV1), il montre sa foi au monde grec, son enthousiasme à construire une terre fraternelle.
En regardant la vie d’André, j’en tire une conclusion : on reconnait sa foi par sa fécondité, par sa créativité. Il a même créé une nouvelle forme de croix. Il demanda à être mis sur une croix différente de celle de Jésus. En son cas, il s'agit d'une croix décussée, c'est-à-dire à croisement transversal incliné, qui est pour cela appelée « croix de saint André[2].
À nous maintenant de prendre le relais, de porter la Parole, d’être porteurs de Parole, porte-parole du Royaume, et donc de Dieu lui-même. La Parole doit se porter à plusieurs. Elle a besoin de plusieurs voix pour sonner juste, pour faire entendre une mélodie qui pacifie les gens. Dites paix à cette maison (Lc 10,5). Cela présuppose que nous sommes déjà pacifiés par sa Parole. Transfigurés par sa Parole. Faisons voir Jésus par notre manière de vivre et nous conduirons nous aussi à Jésus. AMEN.
[1] LETTRE APOSTOLIQUE DESIDERIO DESIDERA #I0
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