Année B : samedi de la 11ième semaine ORDINAIRE (litbo11s.14)
Mt 6, 24-34 : réussir à s’oublier.
Nous sommes invités à faire confiance. Malgré nos sottises, dit Julienne de Norwich, je m'émerveille beaucoup que le Seigneur me regarde avec tant de prévenance. Il est question d’un Dieu qui, dans les mots de François de Sales, nous prend par la main, s’occupe de nous, pourvoit à nos besoins. Appuyez-vous, dit-il, totalement sur la providence de Dieu… travaillez néanmoins de votre côté pour coopérer avec elle. Cette confiance est si grande qu’elle exclut les inquiétudes de toute sorte […] puisque le Fils de Dieu ne veut pas que l’on s’inquiète même pour les choses absolument nécessaires, comme pour le manger, le boire et le vêtement.
Aujourd’hui, il y a un divorce avec ce langage d’un Dieu qui prend soin de nous. Le Dieu où tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre (Mt 28,18), qui contrôle tout, est remplacé par tout pouvoir nous appartient sur la terre.
L’heure n’est pas à la confiance ni à s’abandonner entre les mains d’un autre. La méfiance est partout. La défiance est devenue un dénominateur commun. Moins la confiance existe, plus la peur nous habite, plus on devient autoritaire. Plus la méfiance est grande, plus le repli sur soi grandi. À qui faire confiance ? Quelle autorité croire ? On se méfie les uns des autres. Des chefs politiques comme religieux.
Pourtant, c’est quelque chose d’essentiel, quelque chose comme le soubassement de notre vie. C’est la première des béatitudes (Mt 5,3). Ne perdons pas cette béatitude de nous savoir dans sa prévenance. Si nous sommes remplis de nous-mêmes, il n'y a pas de place pour un autre, et certainement pas pour Dieu.
Regardez les oiseaux du ciel. Il est question de se sentir lier à d’autres. De réussir à s’oublier (Thérèse de Lisieux) De se désoccuper de soi. C’est la boussole, la pierre angulaire de toute vie. De toute vie spirituelle. C’est un appel à vivre le sacrement du moment présent (Jean Pierre de Caussade). À vivre la puissance du maintenant. Il me semble que le cantique nouveau est d’être délivré de moi-même (Élisabeth de la Trinité). Mais ce n’est pas spontané que de mourir à ce moi pour que vive en moi un autre moi…meilleur pour moi que moi-même (Thérèse d’Ávila, acclamations X111). Déjà Jean-Baptiste observait qu’il lui fallait se faire petit pour que le Christ grandisse en lui (Jn 3,30) ?
Tous les soirs, à l’heure des complies, nous chantons Père, entre tes mains je remets mon esprit. Tous les soirs nous vivons l’expérience des oiseaux du ciel. Nous jetons tous nos soucis de la journée en Dieu, nous nous élevons au-dessus de nos soucis, car il prend soin de nous. Il faut du temps pour ne pas tricher avec cette prière du soir qui résume la profondeur de notre vie spirituelle.
Si nous vivons comme les oiseaux du ciel, nous prêcherons l’évangile sans prêcher, nous ressentirons moins le poids du jour, nous porterons beaucoup de fruits de joie. Le meilleur moyen de manifester que Dieu prend toute la place dans notre vie ainsi que les autres, est de tout accepter avec joie. Un cœur joyeux est le résultat normal d'un cœur embrasé par l'amour.
Elle est puissante cette affirmation de Thomas de Celano qui affirme que dans l’esprit de François, pour contrecarrer toutes les machinations, tous les soucis, la meilleure défense est encore l’esprit de joie. Il ajoutait ce qui fait la joie du diable, c’est de nous ravir notre joie. Ce poison mortel des soucis ne peut rien dans un cœur gonflé de joie.
Je termine par ces mots du père François Cassingena-Trevidy Les temps obscurs que nous traversons ne découragent pas la joie, mais nous invitent à la chercher au plus profond de nous-mêmes. Notre seule vocation, c’est de demeurer dans la joie. Amen.
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