Année B : samedi de la 1ière semaine Avent
Mt 9, 35 – 10, 1.5a.6-8 : Jésus, tu as ravi mon cœur
Nous entrons dans l’année de la prière demandée par le pape en préparation de l’année jubilaire 2025. Une année préparatoire pour apprendre à regarder Jésus, à contempler un regard qui n’exclut personne tant sa grande compassion est, permettez-moi de le dire ainsi, un sacrement qui nous transforme en profondeur.
Regarder, on ne sait plus regarder. Je lisais récemment qu’un commerçant avait placardé près de sa caisse enregistreuse cette note : Nous ne servons plus les clients qui sont au téléphone portable afin de ne pas les déranger. Il voulait voir leur visage. C’est ça l’être humain.
Le mot clé de la vie de Claire d’Assise est regarde-le et non dévisage-le. Observons le Christ ! Ne gardons pas nos yeux fixés sur nous-mêmes, ne nous scrutons pas les uns les autres ! Regardons-le, chacun à son rythme avec son histoire, ensemble pas individuellement, mais en communauté. C’est seulement en le regardant ensemble que nous pouvons marcher ensemble, insistait le pape en ouverture du synode récent.
Que voyons-nous en regardant et non en dévisageant Jésus ? Un regard qui n’est ni froid ni distant, qui n’écrase pas, qui ne nous regarde pas de travers, ne désespère jamais de personne. Un regard qui invite à relever la tête. Cela ne fait plus sens de se cacher quand on découvre que ce regard de Jésus ressemble au soleil qui ne connaît pas l’obscurité parce qu’il n’est que soleil et qui ne voit en nous que des rayons de lumière, rien d’autre.
C’est le regard du berger qui prend soin de ses brebis, qui part à la recherche de celle égarée pour la porter sur ses épaules, lui signifiant combien précieuse elle est pour lui. Il suffit de le regarder pour qu’il nous donne tout. C’est ce regard qu’a reconnu le centurion sur la Croix pour s’entendre dire : aujourd’hui tu seras avec moi au paradis (Lc 23, 33-45). Ce regard réveille nos vies assoupies, arrose ma sécheresse, éclaire mes ténèbres, ouvre ce qui est fermé, enflamme ma froideur, redresse les sentiers tortueux, aplani les endroits rugueux (Is 40,4), écrit saint Bernard. Le livre du Cantique utilise une expression à ne jamais oublier : tu as ravi mon cœur d’un seul de tes regards (Ct 4,9).
Et ce ravissement à le regarder, ce ravissement d’un seul de tes regards, Claire d’Assise en a fait la tâche première de votre vie. Pour elle, c’est une question de vie ou de mort. C’est même le sommet de la béatitude. Contempler ce regard suffit pour accepter de tout sacrifier pour lui et de déclarer comme l’aveugle de naissance, rencontrant ce regard pour la première fois : je crois, Seigneur (Jn 9, 35-38).
C’est ce même regard que Jésus posa sur Lévi, de très mauvaise réputation, et qui le transporta jusqu’au 7e ciel en s’entendant dire : suis-moi. Jésus voit Lévi puis va vers lui. Pas suffisant de voir, il faut aller vers, descendre dans la rue, aller dans les lieux où les gens vivent, fréquenter les espaces où les gens souffrent[1]. Subito presto, il se leva, quitta tout pour marcher avec Jésus, l’accompagner et porter à son tour – quelle conversion ce fut pour lui - sur les gens le même regard de miséricorde que Jésus avait posé sur lui.
Regarde-le. Pour demeurer ici, il faut être saisi de tressaillements de joie par ce regard, ce regard de l’humain parfait qu’est Jésus, ce regard qui vous révèle quelque chose de plus grand que vous-mêmes, qui ne cesse de vous surprendre et qui vous remet à marcher ensemble, à vivre ensemble en mode synodal.
Ce regard est une mission, votre mission, notre mission. Il est parole, parole de Dieu pour aujourd’hui. Avons-nous ce regard de Dieu sur les Lévi de notre monde ? Avec ce regard, nous passons du camp de la dent pour dent, de la haine à celui de la compassion. Se laisser regarder et regarder comme lui. Et si c’était ça, la meilleure part dont proposait Jésus à Marthe. Non pas quitter son travail de préparer un repas, mais de vivre sous le regard de Dieu en qui ont été créés toutes les choses, celles du ciel et celles de la terre, Celui en qui tout subsiste (Col 1,16-17).
Pour voir Dieu, il suffit de regarder dans l’Homme ce qu’il y a de plus profond (Christian Bobin). Offrons à notre monde nos regards émerveillés d’avoir rencontré le regard de Jésus et cela nous suffit. AMEN.
Accueil : demain ce sera les 75 ans de la Déclaration des droits de l’homme rédigée après les horreurs de la Shoah, acte de barbarie sans précédent et fondé sur un acte de foi en la dignité de la personne. Son application semble dérisoire tant gronde les guerres, les famines, les déplacements de toute sorte. Faisons le choix de Jésus. Embauchons les non-embauchables, redonnons-leur d’espérer de retrouver leur dignité.
Évangile:
Année:
Pérode:
Date:
Mardi, 5 décembre, 2023
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