Année C : mercredi de la 3e semaine du CARÊME (litcco3me.22)
Mt 5, 17-19 ; Dt 4, 1.5-9 : retrouvons la voie de Jésus.
Quel renversement de perspective que l’attitude de Jésus en regard à la loi ! Nous assistons avec cette déclara-tion je suis venu non abolir, mais accomplir à une sortie de la religion (Marcel Gauchet) qui au temps de Jésus était axée sur une sorte de comportement du maquillage. Paul invite les Galates à ne pas se remettre sous le joug de l’esclavage (Cf. Ga 5,1). Commentant l’épître aux Galates, le pape observait que le Christ est venu nous libérer de l’esclavage du légalisme . En répétant par sept fois, vous avez appris, moi, je vous dis, Jésus dicte un chemin d’humanité pour devenir homme nouveau, créature nouvelle. Il trace les contours de ce qu’est l’esprit du christianisme (Joseph Moingt).
Étonnant, Jésus n’encourage pas ceux qui l’écoutent à être de bons pratiquants ni à se soumettre aux normes et aux prescriptions comme se laver les mains, ne pas arracher le blé un jour de sabbat. Il ne dit pas qu’il faut faire ceci ou faire cela du catéchisme de notre enfance. Il a rompu avec la paralysie de la normalité .
Pour Jésus, la religion doit transformer l’homme de l’intérieur et lui offrir la possibilité de devenir une meilleure personne […] si elle ne réussit pas cela, elle perd son sens . Jésus a incarné le changement qu’il voulait apporter autour de lui. Il en donne l’exemple en « désobéissant » à des pratiques sans âme et sans cœur comme arra-cher le blé, guérir le jour du sabbat. Question : Jésus, comment réagirait-il aujourd’hui devant une éducation millénaire qui valorise la rigidité : il faut faire ceci et non cela ?
Nulle part dans l’évangile, Jésus ne se prononce pas si la loi est bonne ou mauvaise. Il affirme seulement que la beauté d’une vie, la qualité d’une personne, repose sur sa capacité non de s’affranchir des règles, mais de les posséder au point de pouvoir les dépasser (Hector de Saint Denys Garneau). C’est en gardant vivant notre proximité avec Jésus comme il l’a fait avec son Père, que nous évitons de faire des choses, des prières, des sacrifices, seulement parce que cela est prescrit.
La loi nouvelle ne fait pas la promotion d’un paradis céleste que nous n'aurions pas commencé à bâtir sur la terre. Il revient à chaque chrétien de « sauver » l’esprit de la loi nouvelle. Jésus n’a d’autres mains que les nôtres, d’autres voix que nos voix, d’autres yeux que nos yeux. Il ne nous demande qu’une chose tout au long des évangiles : venez m’aider à humaniser le monde.
C’est à nous de le ressusciter en nous, à nous de faire vibrer de son esprit, à nous d’ensemencer l’esprit de nouveauté qu’apporte Jésus. Les mains du Christ, le regard du Christ, la tendresse du Christ doivent désor-mais passer par nos mains, nos yeux et notre cœur.
Ce n’est pas Dieu qui est responsable de la lenteur à instaurer cette attitude nouvelle. De la déconfiture ac-tuelle de la foi. Cessons d’engueuler Dieu pour les retards ou lenteurs à l’insérer dans notre monde, dans notre Église aussi, parce que c’est à nous qu’est demandé de l’ensemencer en nous et autour de nous. C’est ainsi qu’il faut comprendre la grande aventure de la synodalité que nous vivons présentement.
Ce n’est pas la loi qui nous soutient aux heures sombres où le cri de Jésus retentit en nous : pourquoi m’as-tu abandonné ? Sans intimité vibrante avec Jésus, son attitude d’ouverture devient un fardeau. Parfois, c’est la pauvreté de notre vie de prière qui rend son esprit nouveau compliqué. La seule chose que nous pouvons faire dans les moments difficiles est de réveiller le Christ, qui est dans notre cœur. Il dort, mais il est présent . Si nous croyons vraiment en cette attitude nouvelle de Jésus, attitude qui dépasse les frontières de toutes les reli-gions, elle finira bien par « s’installer » en nous.
La première lecture exprime bien l’esprit de Jésus : vous les garderez, vous les mettrez en pratique ; ils seront votre sagesse et votre intelligence aux yeux de tous les peuples […] garde-toi de ne jamais oublier […]ne le laisse pas sortir de ton cœur un seul jour. Enseigne-le à tes fils. AMEN.
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