Année C : samedi de la 2e semaine AVENT (litca02s.21)
Mt 17, 10-13 : Si 48, 1-4.9-11 Le sacrement du silence.
La première image qui me vient en parlant d’Élie est celle de la brise légère (1 Roi 19.12). Le Seigneur n’était pas dans le bruit, dans la majesté. Il n’est pas là. Dieu se fait entendre à Élie dans un doux murmure. L’amour ressemble presque toujours au bruit que fait une poussière tombant par terre. Le fil sonore de silence fait plus d'effet que toutes les puissances. Ce petit murmure ressuscite. Notre vie, c'est l'histoire de la bataille entre le bruit de nos activités et la recherche de ce fin silence. Dieu ne nous rejoint pas dans les applaudissements. Il nous rejoint dans nos déserts, ces lieux d’inquiétudes, pour nous faire sortir à sa rencontre. La rédemption ne commence pas à Athènes, pas à Rome, mais dans le désert (Pape en Grèce le 5 décembre dernier).
Du fond de lui-même, au milieu de son désespoir, il ressentit une grande chaleur et une voix intérieure qui lui dit que fais-tu, ici, Élie (1 Rois 19, 9) ? L’auteur du livre du Siracide précise qu’Élie se leva comme un feu, sa parole brûlait comme une torche (Cf. Si 48,1). Il sort de sa caverne, il sort de lui-même, de tout ce qu’il y a de tourment, de peur. Sa vie culbuta.
C’est bien connu dans la littérature spirituelle, Dieu, peu importe l’image que nous avons de Dieu, entre généralement par la porte d’un murmure d’une brise légère, par la porte d’un fil sonore de silence.
La seconde image est celle d’un homme agité, déprimé qui souhaitait même la mort (1 Rois 19, 4). Il n’en pouvait plus. Il était au bout du rouleau, comme on dit. Alors, il entend un appel à se lever et manger (v. 5). Il est sorti de son tombeau et une lumière s’est allumée dans sa noirceur.
Ses deux images présentent beaucoup de similitudes avec ce que nous vivons en ce temps de l’Avent. L’étourdissement du bruit, l’épuisement, le découragement, la déprime, l’impression d’une vie vide en recherche de sens, sont des chemins que l’Éternel, que le Réel l’autre nom pour dire Dieu aujourd’hui, emprunte pour naître, renaître en nous.
Matthieu se sert d’Élie et de Jean-Baptiste pour éclairer la figure de Jésus. Comme eux, Jésus indique un chemin, une direction : sortir de nos déserts pour éviter de vivre renfermé sur nous-mêmes. Ce fil sonore de silence est beaucoup plus que de se taire. Il offre de cheminer vers l’intérieur du désert de nos vies en descendant dans nos profondeurs.
Cette descente, pour utiliser une belle image du pape, nous évite de boiter des deux pieds, d’avoir un pied partiellement appuyé sur le monde divin et un autre fermement rivé sur celui de la mondanité. Si nous sortons de nos grottes, de nos repliements, si nous repoussons ce temps de course contre la montre, quelque chose comme une brise légère, quelque chose comme de sentir Dieu dans les choses les plus simples, à la maison, dans notre quotidien, transformera cette période comme une torche […] en parole de feu.
Plus notre foyer intérieur est ardent, plus nous devenons comme une torche […] une parole en feu. Et voilà bien l’appel de ce temps : dépasser le folklore de Noël pour devenir une torche, une parole de Dieu.
Cette histoire du retour d’Élie n’est pas à prendre à la lettre comme tous les faits rapportés dans l’évangile. Qui peut croire aujourd’hui qu’Élie reviendra ? Ce récit d’Élie doit être entendu comme un retour aux sources qui met ou remet debout après un temps d’épreuve. Il nous met en relation avec l’invisible qui surgit de nos profondeurs et qui nous fait rebondir dans la vie.
Ce que nous célébrons à Noël, c’est le plus humain de l’homme (Maurice Bellet), quelqu’un dont on ne voit pas le visage, dont aucune photo ne peut nous le faire imaginer, mais dont la lumière éclaire nos visages, nos vies (Jean Sullivan), quelqu’un qui dépasse l’homme (Pascal) et qui nous invite à expérimenter la transcendance de son être dans notre quotidien.
À votre contemplation : apprenons à nous taire, nous sommes dans le temps du sacrement du silence qui ouvre sur le sacrement de l’abaissement de Jésus. AMEN.
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