2020- B- Immaculée conception
Lc 1, 26-38 : nous sommes des innocentés par Dieu.
Je ne crois pas me tromper en disant que Bernadette Soubirous n’a pas compris grand-chose de cette dame qui lui déclarait : je suis l’immaculée conception. Cette déclaration n’est pas compréhensible non plus à nos oreilles de croyants pour qui la préservation du péché originel n’est plus audible aujourd’hui, écrit Joseph Moingt.
Ce qui est plus facile à comprendre, dans cette déclaration de Marie se présentant comme l’Immaculée Conception, c’est le sens qu’en donne Georges Bernanos dans Le journal d’un curé de campagne. Il écrit que la Vierge était l’Innocence avec un I majuscule. Bernadette Soubirous disait que Marie était une femme belle, belle, belle. N’est-ce pas le plus beau nom que nous puissions donner à Marie! À cette fête. Une femme belle. Cela est plus acceptable aujourd’hui que de dire qu’elle est sans péchés.
Charles Péguy utilise des mots très poétiques pour décrire que Marie était l’Innocence. Une femme belle. Écoutez :
Elle est infiniment riche, parce qu’aussi elle est infiniment pauvre. Infiniment haute, parce qu’aussi elle est infiniment descendante. Infiniment grande, parce qu’aussi elle est infiniment petite. Infiniment humble […]. Infiniment jeune, parce qu’aussi elle est infiniment mère […]. Elle est toute Foi et toute Charité, parce qu’aussi elle est toute Espérance.
Attention. Marie n’est pas une diva qu’on porte sur les nuages. Elle dévoile au grand jour dans sa personne notre propre grandeur humaine. Nous sommes, par bienveillance, des innocentés de Dieu. Nous portons constamment notre regard sur nos failles, nos «inhumaineries». Rarement, nous chantons notre magnificat parce que nous sommes sauvés dans l’espérance qui nous permet d’affronter la vie quotidienne. Cette expression de Paul aux Romains (8, 24), le Pape Benoit XVI en a fait le titre de son encyclique : sauvés par l’Espérance.
Ne nous laissons pas voler la beauté de cette fête. Nous sommes des innocentés par Dieu. Cette fête est la nôtre. Elle est celle de chacun d’entre nous. Alors que ce petit virus, comme on l’a écrit, nous communise, nous place sur un pied d’égalité avec la mort[1], cette fête nous communise, introduit chacun d’entre nous à la vie même de Dieu, comme l’exprime Paul dans la lecture : béni soit Dieu; il nous a bénis et comblés des bénédictions de l’Esprit […] il nous a choisis […]; il nous a prédestinés à être avec lui […] Ainsi l’a voulu sa bonté. Ce sont des mots inaudibles, des mots de foi, tant ils dépassent l’entendement humain.
L’essentiel de notre vie n’est pas dans la grandeur des choses ni dans le spectaculaire. L’essentiel de toute vie, et je reprends les mots de saint André de Crète, est de prendre conscience que Dieu, à partir de cette Vierge, refit à neuf notre existence. Marie est le prototype de notre innocence première. Le pape François dans sa lettre sur la sainteté appelle cela un combat. Pour utiliser la terminologie de l’Avent, c’est sortir de notre sommeil.
Tous les instants de notre vie comme chaque respiration sont une avancée vers ces retrouvailles avec notre innocence première, notre beauté originelle au cœur même des défis, des tracas, des blessures ou déchirures que nous avons à vivre non comme un poids insupportable, une culpabilité paralysante, mais comme des bûches de bois que l’on met dans la cheminée de notre vie intérieure pour alimenter le feu de l’Amour qui désire nous rendre à son image et ressemblance.
Une question surgit en nous : comment cela peut-il se faire ? Comment retrouver notre innocence première ? Et la réponse de l’Ange s’adresse à nous : l’esprit du Seigneur viendra sur toi, la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre.
Signons nos vies de ces mots que nous avons acclamés tantôt : chantons au Seigneur un chant nouveau, car il fait des merveilles en nous. AMEN.
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