Année C : samedi de la 5e semaine de Pâques (litcp05s.19)
Jn 15,18-21 : unis dans la diversité
Un monde homogène n’existe pas. Ce qui existe, c’est un monde aux multiples différences ou facettes. Unis dans la diversité, la devise européenne peut apparaître pour beaucoup, aujourd’hui comme hier, comme un vœu pieux ou une formule creuse tant nos réflexes de peur et d"égoïsmes sont profondément enracinés en nous. Vivre ensemble sans nous diviser est le miracle qu’on attend de nous. La question soulevée par l’évangile du jour est peu compliquée : quelle société voulons-nous construire entre nous ? Sur quel roc voulons-nous la construire ? Le roc de l’égocentrisme ou celui d’une existence pacifique qui requiert l’amour fraternel.
Le pape François dans son exhortation sur l’appel à la sainteté (no71) écrit ceci : ce monde, depuis le commencement, est un lieu d’inimitié, où l’on se dispute partout où, de tous côtés, il y a de la haine, où constamment nous classons les autres en fonction de leurs idées, de leurs mœurs, voire de leur manière de parler ou de s’habiller. En écrivant sa lettre, le pape ne visait qu’un seul but : éveiller à un comportement évangélique. En visite au Panama (2019), il disait aux jésuites que notre société se façonne autour d’un climat préoccupant de haine et de cruauté. L’évangéliste Jean précise un aspect de ce comportement : ne pas entretenir de la haine entre nous. Mais la haine est-elle bien morte en nous ? La vision de Paul dans la lecture, rejoint ce même projet : passe en Macédoine et viens à notre secours.
À la veille de quitter les siens, Jésus les presse de passer de la tolérance à l’amour, d’une société encourageant un climat de haine et de cruauté à un vivre en gardiens de la fraternité. Rappelez-vous la parole que je vous ai dite […], c’est de vous aimer les uns les autres. À l’heure où se vit chez nous le débat sur la laïcité, il n’est pas suffisant de tolérer nos divergences. Il faut être capable d’accueillir l'autre, d’être respectueux, ouvert à comprendre l’autre. La tolérance prépare souvent la guerre et laisse subtilement monter la haine.
Jean Vanier qui vient de nous quitter disait : la relation est au centre de notre identité. Cela nécessite que chacun lutte en lui-même contre des puissances de peur et d’égoïsme, contre les besoins tenaces de posséder et de contrôler. Être en relation aux autres est dangereux. Nous devenons vulnérables aux rejets. Jean Vanier offrait aux plus démunis une médication plus bienfaisante que n’importe quel traitement, son amour.
Jésus, en donnant de l’importance et le droit d’exister à ceux à qui la religion de son temps enlevait ce droit, fait de la coexistence pacifique universelle la pierre angulaire de son message. Aucun homme n’est une île, dit le proverbe. Jésus n’est pas venu prendre soin d’une religion ni d’une classe privilégiée de la société, mais sauver l’humanité qui se replie sur elle-même. Son humanisme fut sans faille. Son anticonformisme l’a conduit à la mort. Le serviteur n’est pas plus grand que son maître.
Aux yeux de Jésus, sur le terrain de la coexistence pacifique, de l’ouverture aux autres, la médiocrité et la demi-mesure n’ont pas leur place. Vivre en harmonie, en relation mutuelle demande beaucoup de courage alors que la tolérance ne nécessite pas cette forme de courage. L’autre, qu’il soit musulman, de couleur ou de culture différente, même si je ne comprends pas sa culture, si elle questionne la mienne, a le droit d’exister.
Rarement dans l’histoire récente, la haine a été aussi présente. Que ce soit le meurtre du Père Jacques Hamel, la tragédie de la mosquée de Québec, et plus récemment à l’occasion de la journée de la liberté de religion le 27 octobre 2018, celle à la synagogue Tree of life de Pittsburgh, les crimes haineux éclatent de partout. Tous les Juifs doivent mourir, criait Robert Bowers, avec un fusil d’assaut et trois armes de poing à la main. La montée de l’antisémitisme, la plus ancienne forme de haine du monde, reste un sujet de grave préoccupation[1].
Nous vivons actuellement une sorte de régression qui favorise, pour citer le philosophe Thomas Hobbe, la guerre de tous contre tous[2]. Dans ce modèle prime l’individualisme sur le bien collectif, le repliement sur soi plutôt que l'ouverture à la différence des autres. Et savons-nous ici passer de la tolérance à l’amour ? C’est pour parvenir à cet amour et pour bâtir une terre fraternelle que Dieu nous a créés. Puisse son Esprit nous venir en aide. AMEN.
Commentaires
Oui mais il y a des petits
Soumis par Carole Gingras le ven, 05/24/2019 - 06:48Oui mais il y a des petits lieu où les gens essaye de vivre en communauté dans le respect de l’autre dans le respect que l’autre existe. Il y a des maisons communautaire. Je garde espérance que nous y arriverons . Je suis consciente qu’il est dure de prendre parole et d’exprimer nos besoins par des mots dans les dettes et d’offrir à l’autre ce lieu aussi pour prendre parole et d’exprimer ses besoins par des mots. Il me semble que c’est cela le combat oser être vrai oser être soi et permet à l’autre de vrai et de soi. Merci pour vos beaux bons mots
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