Année C: samedi 1ière semaine ordinaire (litco01s.16)
Marc 2, 13-17 : Matthieu... et si c'était moi, le pas correct, qui est appelé
La première image que l'on retient de quelqu'un est celle qui nous marquera pour des années, sinon pour toute la vie. Cette image-là est indélébile et elle influence en filigrane tous nos regards sur cette personne. En interrogeant cette semaine des gens sur qui est Matthieu, la réponse fut unanime : c'est un des évangélistes. Aucun ne soupçonnait son origine d'affairiste véreux, de corrompu, de mépris des pauvres, de son esprit de mondanité.
Ce qui m'impressionne dans le regard des gens questionnés sur Matthieu, c'est qu'ils ont projeté sur lui le même regard que Dieu. On ignorait son oui à l'idolâtrie de l'argent, son oui à la corruption [qui est] du sucre qui donne du diabète (pape François en Ouganda), son oui aux valeurs que la bourse priorise, celle de s'enrichir au détriment des autres. L'image qu'on se faisait de Matthieu était celle d'un passionné de Jésus et non d'un Véreux. Les gens ne voyaient que le «beau Matthieu». Sa rencontre personnelle avec Jésus (E.G. no. 3) chez lui, à sa table, l'a tellement transformé que ce que dit [sa] bouche, c'est ce qui déborde [de son] cœur (Lc 6, 45).
Ce regard du « beau Matthieu» est celui qu'aujourd'hui des chrétiens portent sur lui. Ils ne voient en lui qu'un apôtre, un évangéliste. Que des gens voient amoureusement Matthieu, le plus horrible des pécheurs (François de Sales), m'a profondément impressionné. On peut donc, et c'est une bonne nouvelle, changer son regard sur quelqu'un. Changer d'opinion sur quelqu'un.
Ce Jésus, qui prend soin des moindres cheveux de notre tête (Mt 10, 30), continue de porter ce même regard paternellement maternel sur les plus véreux dont les mass-médias nous inondent. Jésus continue de jeter un sentiment d'amour sur nous jusqu'à nous choisir (devise du pape François) et nous dire: suis-moi. Seul le regard miséricordieux de Jésus peut libérer l'humanité de nombreuses formes de maux parfois monstrueux (Urbi et Orbi, 2015). Dieu peut ouvrir des portes de sorties à des situations humainement insolubles.
Ce regard qui voit belle une personne au passé moins qu'acceptable, sommes-nous en mesure de le poser sur notre monde ? Pas sur notre monde en général, mais sur des personnes réputées être des Lévis notables. Quel est notre premier regard spontané, notre premier souvenir sur quelqu'un ?
Ce regard de Jésus riche en miséricorde, ce regard pénétrant invitant à une transformation radicale, se poursuit aujourd'hui. Je notais récemment dans un petit livre sur le frère François-Marie que son itinéraire dans une secte lui a fait mener une vie misérable. Sa rencontre avec Jésus l'a amené à vivre dans un nouvel environnement, non pollué. Il s'est retourné jusqu'à choisir de vivre en vrai fils de François.
Ce frère François-Marie s'est retrouvé dans les milieux les plus pauvres de Verdun à New York, puis au Cameroun. Il ne se regardait plus, se refusait de mener une vie autoréférentielle. De centré sur lui-même, par sa rencontre avec Jésus, il est devenu humain, d'une bonté étonnante, d'un accueil des autres sans égard à ses besoins. Chaque fois qu'on rencontre Jésus, on s’ouvre aux autres.
À sa mort survenue tôt dans sa vie, on ne voyait qu'un autre François dont il était le disciple et non plus le misérable, le Véreux qu'il était avant sa rencontre avec Jésus. Sa vie fut tellement belle, qu'on l'a racontée (cf. Caron, Anne, Comme une flute de roseau, Éd. Novalis, 2015).
À votre contemplation, ces mots souvent répétés du pape François: je suis un pécheur regardé par le Seigneur. Jésus ne regarde personne sans qu'il reparte plus heureux. Plus encore, il lui donne une place d’honneur près de lui. Tout au long de cette année de la miséricorde, redisons ces mots-prières suggérés par le pape: Seigneur, je suis un pécheur, Seigneur, je suis une pécheresse, Viens avec ta miséricorde. AMEN.
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