Année B: Mardi 8e semaine ordinaire (litbo08m.15)
Marc 10, 28-31 : avoir plus en ayant moins
Vraiment, qu'a donc ce Jésus de si différent des autres pour accepter de quitter maison, frères, sœurs, mère, père pour Lui ? Qu'a-t-il de meilleur que les autres “messies” à nous offrir ? Pourquoi n’avoir rien de plus précieux que Lui ? Pourquoi Le privilégier à tout le reste ? Pourquoi ne rien préférer d'autre que Lui, dit la règle de saint Benoît ? Songeons aussi à cette question du Cantique des cantiques : Qu'a donc ton bien-aimé de plus que les autres? (Ct 5, 9).
Nous pourrions multiplier indéfiniment ces questions que tout chrétien et spécialement les personnes qui font profession de tout quitter, doivent se poser. Mais ce sont nos réponses personnelles qui nous poussent sur le chemin d'un détachement de tout superflu pour devenir compagnon de Jésus. Le texte dit suivre Jésus.
Toutes nos réponses, quelles qu'en soient leur formulation, font ressortir que c'est la beauté de Jésus qui fascine et nous attire à prendre ce chemin de la dépossession. Cette beauté est la beauté visible de la Beauté, de cette beauté qui est la beauté originelle, la beauté absolue, la beauté dont toute créature, même la plus belle, n'est qu'un reflet. Elle est si grande que nos yeux humains n'en perçoivent qu'une infime parcelle.
Saint Augustin écrit dans son commentaire du Psaume 84 : Pensez, frères, à ce que doit être la beauté [du Seigneur]. Toutes ces belles choses que vous voyez, que vous aimez, c’est Lui qui les a faites. Si elles sont belles, qu’en est-il de Lui ? Si elles sont grandes, Lui, combien plus ! Dépassons ces choses que nous aimons pour Le désirer, Lui, davantage...
Il ne suffit pas d'admirer cette beauté d'abord manifestée dans un petit enfant puis jusqu'à la croix pour le suivre. Il faut la préférer aux beautés, si admirables soient-elles, des choses d'en bas. C'est notre regard posé longuement, intensément sur la manière de vivre de Jésus, tout tourné vers les autres et l'écoute de la beauté toute simple et humaine de sa Parole, qui nous pousse vers Lui comme l'exprimait saint Jean-Paul II dans sa lettre ouvrant le millénaire (6 janvier 2001, no 16-28),
L'expérience nous le démontre, je peux posséder ce qui est le plus beau au monde sans être capable de ne rien préférer d'autre. Si je ne perçois pas ce qu'a Jésus de plus et de meilleur que les autres, si je ne le préfère pas à tout le reste, Jésus n'est pas alors ce qui m'est le plus précieux au monde. Je peux bien admirer cette beauté comme étant extérieur à moi sans désirer la posséder. Si je veux la posséder au plus intime de mon être, il me faut la préférer. Il me faut m'approcher de lui, le laisser demeurer en moi. En paraphrasant ce que le renard dit au Petit Prince de Saint-Exupéry, on ne possède vraiment que ce qu’on possède avec son cœur, par amour, par préférence.
Nos difficultés à vivre cet appel à choisir Jésus, meilleur que tous les autres «messies» ou idoles tant recherchés, viennent de nos divertissements, selon le mot de Pascal, à vouloir d'autres beautés que celle d'être disciples de Jésus. Jésus n'est pas le seul à nous attirer. À nous séduire. Dans nos préférences, il y a tantôt Jésus, tantôt la recherche éhontée de soi. Vous en conviendrez, notre liste de préférences risque d'être longue.
Notre plus grand défi de chrétiens, de croyants aujourd'hui, défi de tous les temps, est celui de préférer Jésus, d'une préférence non de goût, mais d'amour. Pour que Jésus soit attirant, pour qu'il nous attire vers lui, c'est de lui demander chaque jour qu'il nous entraîne près de toi (cf. Ct 1, 4).
Je termine par cette réflexion d'un chartreux qui disait que s'attacher à sa volonté plutôt qu'à celle de Jésus est un collier plus étouffant que le joug de faire la volonté de Dieu. Que de le suivre. AMEN.
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