Année B: Mardi 3e semaine carême (litbc03m.15)
Matthieu 18, 21-35 : nous sommes tous des endettés ...
Quelle belle photographie de Dieu que cette page. Il y a les dix mille talents remis. Il y a ce paralytique que les porteurs amènent : mon enfant, tes péchés sont pardonnés (Mc 2, 5). Il y a le retour du fils prodigue (Lc 15. 11-32). Il y a ce voleur Lévi que Jésus introduit dans son équipe apostolique (Mc 2, 14). Il y a, et non le moindre, ce mécréant criminel qui sur la croix, entend Jésus l'invité à être avec lui dans son Paradis (Lc 23, 43). À lire comment Jésus inonde de sa bonté les endettés qu'ils rencontrent, une conclusion s'impose: rien ne fait plus de bien à Jésus que ceux qui lui font beaucoup de mal (Étienne Binet (1569-1639).
Jésus voit toujours en celui ou celle qu’Il rencontre un lieu d’espérance, une promesse vivante, un extraordinaire possible, un être appelé, par-delà ses limites, ses dettes, et parfois ses crimes, à un avenir tout neuf. Il voit en chaque être humain une possible restauration de la vie. Nous sommes tous des endettés (des pécheurs, dit le texte) non en théorie mais en pratique (Pape François, homélie 2mars 2015).
À travers l'attitude de Jésus remettant les dettes, Dieu confirme que notre état de défiguration, c'est cela dont il s'agit quand la discorde, la haine, la jalousie, la colère nous habite, n'est pas notre état normal ni même un état fatal. Nous ne sommes pas nés pour vivre en état de décadence. Dans le trou noir de la tombe. Nous avons été rendus participants de la nature divine. Nous sommes capax Dei, dit Bernard Feillet.
Ce soixante dix sept fois sept fois martèle que nous n'avons rien à payer de nos dettes parce qu'il les a déjà payées pour nous. En Jésus, Dieu a entrepris de restaurer en nous notre état normal, celui de nos origines ; d'ensemencer nos vies de bourgeons d'avenir. Se profile dans cette page de remise de dette un chemin, et quel chemin, qui nous évite à vivre en état de défiguration de soi et de l'autre. Il y a eu, disait dans une homélie le pape François, la première création... elle fut détournée de sa finalité. Il y a eu une deuxième création, comment y répondrons-nous ? C'est la question à nous poser à mi-temps de notre carême.
Par cet appel à agir comme Lui, Jésus nous habille d'un vêtement neuf, celui de beauté de son humanité. Il fait émerger en nous toute la vitalité de l'eau de notre baptême, nous transfigure en lumière et sel de la terre et nous autorise à être des ambassadeurs du Christ (2 Cor 5, 20).
C'est en ayant sans doute en mémoire cette page, très belle page sur le pardon, que le pape François ouvre son exhortation la Joie de l'évangile en invitant chaque chrétien, en quelque lieu et situation où il se trouve, à renouveler aujourd’hui même sa rencontre personnelle avec Jésus Christ ou, au moins, à prendre la décision de se laisser rencontrer par lui, de le chercher chaque jour sans cesse. Il n’y a pas de motif pour lequel quelqu’un puisse penser que cette invitation n’est pas pour lui (EG, no.3). Sans cette rencontre, cette page n'est que fumisterie.
Évitons cette mode tendance de lire cette page comme adressée aux autres. Nous sommes des endettés de miséricorde. Nous devons tous quelque chose à l'autre. Nous sommes aussi des gâtés de sa miséricorde parce que Dieu, dit la première lecture, ne nous la retire pas. Il ne nous laisse pas dans le déshonneur. Il agit envers nous selon son indulgence et l'abondance de sa miséricorde.
À votre contemplation. Jésus n'a pas dit c'est une société qui a perdu ses repères. Il a simplement dit : Je suis le chemin, la Vie. Ce n'est pas en criant haut et fort que notre société a perdu tous ses repères que nous évangélisons notre monde. C'est en reconnaissant en Jésus toujours prêt à pardonner l'impardonnable le chemin, pour nous redonner notre état normal. Il faut se laisser surprendre par la beauté de ce chemin du soixante-dix sept fois sept fois. AMEN.
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