Année A : Toussaint 2011
Matthieu 5, 1-12a : un bonheur écrit pour toi
Dites-moi : de quel pain avons-nous besoin, de quel pain quotidien, de quelle matière avons-nous besoin? Quelle eau vive nous est indispensable pour mener une vie de bonheur? La Parole de Dieu ce matin, celle des Béatitudes, en est la plus somptueuse réponse.
Notre métier de chrétiens, de chrétiennes, si je puis m'exprimer ainsi, est de nous donner comme occupation majeure de devenir des saintetés. Cette Parole de Dieu en est le chemin. Elle nous conduit à habiter chez Dieu, à y faire notre demeure. Cette Parole suggère une direction de bonheur, avouons-le, éloignée de celle de notre monde. Elle est une sorte de pot-au-feu qu'il faut laisser mijoter à longueur du jour et de la nuit pour en éprouver une boulimie insatiable. Que vois-tu Jérémie ? Je vois une marmite qui bouillonne. (Jr 1, 13)
C'est nous condamner à l'anémie, à refuser de compter parmi cette foule immense, que de ne pas nous en alimenter aujourd'hui. Tout de suite. Chaque jour. Nous n'avons pas deux métiers, bien vivre notre quotidien et bien vivre notre vie de foi. Nous n'avons qu'un seul métier que nous retrouvons dans ceux et celles que nous célébrons ce matin, celui d'être le plus parfaitement possible des paroles de Dieu. Des évangiles vivants. Des heureux en permanence parce que la joie de notre cœur vient de Lui (Ps 33, 21).
Quand Dieu s'adresse à nous, quand il nous offre d'entendre sa Parole, c'est pour nous faire entrer dans les vues qui sont les siennes pour nous. Il nous offre d'être de cette foule immense que nul ne peut dénombrer. Dieu, son Logos, nous veut heureux. Par où commence ce bonheur ? Quand Tes paroles se présentaient, je les dévorais. Ta Parole est mon ravissement et l'allégresse de mon cœur (Jr 15, 16).
Les béatitudes nous offrent l'un de ces «espaces verts» dont notre monde ressent de plus en plus le besoin. En réponse à cette publicité de notre radio nationale (Canada) qui clame écouter pour voir, nous venons d'entendre un autre appel, celui de nous retourner pour voir la Voix qui nous parle (Ap 1, 12). Nous retourner pour non plus nous retrouver devant un simple livre - celui de la Parole de Dieu devant moi présentement - pour non plus seulement entendre une lecture peut-être trop connue et donc méconnue, mais pour voir la Voix qui nous offre une synthèse qui transforme nos vies en lettre écrite de la part de Dieu (1Pi 4, 11).
Il faut respirer au plus profond de nous-mêmes de ce bonheur du détachement de la gloire éphémère, savourer d'être des humbles artisans de paix, respirer de douceur et de compassion envers les blessés, cette autre foule immense invitée elle aussi aux noces de l'Agneau.
Cet itinéraire de bonheur est à ce point contraire à nos aspirations «naturelles» qu'il nous faut en permanence nous souvenir de cette Parole, - heureux - la ruminer, la «retricoter», la «repasser» (Paul Claudel), la laisser «mariner», la conserver comme Marie dans nos cœurs (Lc 2, 19), si nous voulons être en mesure de passer par ce chat d'aiguille, prendre ce chemin qui nous introduit à notre domicile permanent. Nous sommes faits pour habiter dans la Parole. Dans cette parole de bonheur.
A la différence d'autres chemins de bonheur, Jésus a vécu cet évangile le premier. Il en est le chemin qui ne s'arrête qu'en Dieu. Le prendre, c'est mourir à nos désirs d'honneur, de gloire, de puissance à la manière de ce monde pour mener une vie louange et gloire à la mode de Dieu. Aujourd'hui nous faisons mémoire de ceux et celles qui ont tenu parole, qui ont vécu leur foi en sainteté intérieure, en demeurant en permanence dans ce chemin de bonheur.
Entendons Jésus nous dire tout au long de cette eucharistie : réjouissez-vous, soyez dans l'allégresse... lorsque prendra fin notre pèlerinage sur la terre, accueille-nous dans la demeure où nous vivrons près de toi pour toujours. Il n'y a pas de plus grand désir de bonheur que celui-là. AMEN.
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