Année A : dimanche de la 24e semaine ORDINAIRE (LITAO24D.23)
Mt 18, 21-35 - une plongée dans l'humain
Soixante-dix fois sept fois, cela signifie quatre cent quatre-vingts fois. C’est le prix à payer pour inaugurer la civilisation de l’amour dont parlait Paul V1 à l’ONU. C’est le prix à payer pour rendre notre monde plus humain (GS # 40). Paul invite les Éphésiens à se supporter les uns les autres avec charité (Ep 4,2). Pardonner, c’est plus qu’une exigence évangélique. C’est un chemin incontournable pour devenir humain, plus humain. C’est un chemin de solidarité qui coûte très cher. C’est plonger dans un autre monde que celui de l’œil pour œil. L’évangile nous propose un grand plongeon dans l’humain.
Le pardon n'est pas une bonne action que l'on peut faire ou ne pas faire: c'est une condition fondamentale pour devenir humain. Nous ne vivons pas, dit Paul dans la lecture, pour nous-mêmes. Le livre de la sagesse disait tantôt que nous sommes passés maîtres en rancune, en colère. Le texte ajoute : voilà des choses abominables.
Chaque jour nous disons : pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés. Jésus nous demande de faire quelque chose de totalement radical, d’humainement impossible, mais de divinement humain. Pour le croyant, devenir divinement humain, c’est un incontournable.
À nous regarder agir, nous sommes plus dépendants de la vengeance, de la rancune que souffrants de dépendance à la miséricorde. Dieu a fait de ce maître-mot de l’agir humain, l’attitude première du chrétien. Et pour nous dire cela, il nous montre que son agir envers nous n’est pas conditionnel à notre manière d’agir envers les autres. Dieu ne nous traite pas comme nous traitons les autres. Dieu ne nous écrase pas comme nous écrasons les autres.
Ce dont parle Jésus, ce dont il témoigne par toute sa vie, c’est que le pardon n’est pas une affaire de justice, mais de vie. C’est une affaire de plongeon dans la profondeur de l’humain. Le psaume disait qu’il est Seigneur de tendresse et de pitié, lent à la colère et plein d’amour. Il n’est pas toujours en guerre contre nous.
Pour dépolluer notre environnement du chacun pour soi, Jésus nous offre l’oxygène qui purifie l’air pollué par nos revendications permanentes. Il est plus facile de partir à zéro, de commencer une relation nouvelle que de recommencer à s’apprécier après une blessure, des injustices, des injures, des trahisons. Il est plus facile de créer du neuf, que de se recréer neuf quand la confiance a été détruite en nous.
Rien n’est aussi difficile que pardonner et plus encore s’il s’agit de pardonner, non pas seulement une erreur ponctuelle, une distraction, mais des offenses répétées, jusqu’à septante fois sept fois. Rien n’est aussi difficile que pardonner, surtout s’il s’agit de pardonner « du fond du cœur », ce qui suppose une guérison intérieure ! Il y a là quelque chose qui dépasse la mesure, qui est plus que de l’héroïsme, qui dépasse la nature humaine. Dieu seul peut pardonner !
Le pardon nous guérit des poisons du ressentiment. C’est le moyen de désamorcer la colère et de guérir tant de maladies du cœur qui contaminent la société. Être bon exige beaucoup d’effort. Il est plus facile de se haïr que d’être bon. Plus facile de revendiquer ses droits sur l’autre que d’oublier qu’il nous doit de l’argent.
En conclusion : que Dieu nous pardonne nos manques de pardon.
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