Année A : samedi 12e semaine du temps ORDINAIRE (litao12s.23)
Mt 8, 5-17 : « samaritainiser » le pouvoir.
Voilà le récit de quelqu’un qui a le courage de l’authenticité, le courage de laisser tomber le pouvoir qu’il exerce sur les autres et qui préfère la sincérité et l’humilité du cœur. Il faut beaucoup d’humilité pour faire un petit pas d’humanité. Ce n’est pas la tenue vestimentaire et le poste de haut gradé dans l’armée qui impressionne Jésus, mais sa simplicité et sa grande sincérité.
Ce qui fascine Jésus, c’est qu’il rencontre un homme, jouissant d’une réputation de haut gradé, qui sort de le lui-même, qui se place en exode de son ego, de son image de tout-puissant pour vivre le défi de s’ouvrir avec confiance à un autre. Le centurion va à contre-courant de l’image qu’on se fait de lui en étant soucieux des autres, privilégiant l’humain avant d’être homme de pouvoir. Il a « samaritainisé » (pape François) le pouvoir.
Nous sommes tous un peu influencés par la culture égoïste de toutes les époques. L’ouverture et l’accueil des autres ne s’improvisent pas, ne s’édifient pas sur des émotions, des slogans, des événements tragiques, mais seulement à coup d’humanité, d’humilité. Sans accueil, nous risquons de nous encombrer dans la recherche de nous-mêmes. Il y a beaucoup de joie – malheureusement parfois beaucoup d’autosatisfaction – à donner, à rendre service, à être utile aux autres !
Dans son homélie du couronnement du roi Charles 111, l’archevêque de Cantorbury dit que Jésus et cela peut s’appliquer à la démarche du centurion, a créé la loi immuable de la bonne autorité selon laquelle le privilège du pouvoir s’accompagne du devoir de servir. Il ajoute : c’est là une lourde responsabilité. Venir en aide à quelqu’un de vulnérable, c’est l’amour agissant. C’est leur donner des raisons d’espérer.
Le geste du centurion est un bien commun qui doit être protégé. Il n’a pas été un sans-cœur. C’est la base de toute relation authentique, de toute vie en société. Aujourd’hui, parler avec le cœur interpelle radicalement notre temps, plus enclin à l’indifférence et à l’indignation[1]. Notre monde a besoin de centurions capables de bâtir leur vie, non sur des titres, sur des fonctions, mais sur leur capacité de proximité avec les autres. Notre monde a besoin non pas de gens vivant le complexe du paon qui empoisonne nos vies dans le culte des apparences, mais de centurions qui ont du temps à offrir aux autres en puisant même dans leur portefeuille pour leur venir en aide.
Nous devons davantage agir pour faire du bien plutôt qu’agir pour accroître son propre bien-être. Le croyant qui n’agit pas comme le centurion n’évangélise pas. Il est comme un athlète qui se prépare pour les Jeux olympiques en demeurant assis sur son canapé plutôt que de se s’entraîner.
Si les évangélistes ont retenu ce geste, c’est qu’ils y ont vu le courage de l’authenticité, la possibilité de sortir de son rang de notable de l’armée. Ce geste montre que sa grandeur vient de sa charité en acte et non de son noble titre.
Que le Seigneur, comme l’exprime la lecture, ne passe pas près de nous sans s’arrêter pour nous exprimer que nous avons trouvé grâce à ses yeux et qu’il nous veut agir comme lui. Amen
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