2023 A-Mc 16, 9-15 -samedi de l'octave de PÂQUES- ténébreuse lumière

Année A : samedi de l’octave de Pâques (litap00s.23)

Mc 16, 9-15  Des ténèbres lumineuses.

Il y a une troisième réalité. Il vit ! Il faut le rappeler souvent, parce que nous courons le risque de prendre Jésus-Christ seulement comme un bon exemple du passé, comme un souvenir, comme quelqu’un qui nous a sauvés il y a deux mille ans. Cela ne nous servirait à rien, cela nous laisserait identiques, cela ne nous libérerait pas. Il est quelqu’un qui vit^[1]. Pâques est la vraie jeunesse d’un monde qui a vieilli^[2].

Nous terminons l’octave de la fête de toutes les libérations passées et à venir. Fête de la renaissance. Il faut décrypter, déformater notre image de Pâques souvent déformée. Nous ne célébrons pas la réanima­tion physique du corps de Jésus. S’il y a une certitude dans les écrits de Paul à qui nous devons les premiers textes du Nouveau Testament, c’est que Pâques ne signifie pas que Jésus a été rendu à la vie de ce monde. Il a été relevé d’entre les morts (cf. 1 Cor. 15,3-4).

Ce qui est proclamé à l’origine de la foi est que Jésus est relevé en Dieu et par Dieu à une nouvelle dimension de la vie que Paul ne décrit pas. Il précise seulement que Jésus s’est dépouillé, à entendre de sa vie humaine. Dans l’esprit de Paul, le moment fondateur de la foi n’est pas un tombeau vide qu’il ne mentionne pas. Il insiste sur une nouvelle dimension de la vie. Christ, relevé d’entre les morts (cf. Rm 6, 9). Élevé, il est apparu (cf. 1 Co 15, 3-8).  Il s’est relevé (cf. Mc 16,6).

Ne matérialisons pas Pâques. La résurrection n’est pas d’abord une affaire matérielle. C’est une affaire (Moingt) de regard qui privilégie l’autre. Nous terminons une semaine qui ouvre sur un monde plus grand, inimaginable à vue humaine, sur une vie dont nous n’avons pas le contrôle, une vie dont nous n’avons pas besoin de paraître, une vie dans un environnement nouveau que les mystiques appellent ténèbres lumineuses, une sorte de noirceur lumineuse. Pâques ouvre sur une spiritualité de ténèbres lumineuses. Des ténèbres jaillit la lumière du Christ.

L’absence de Jésus est vécue comme faisant noir dans la vie de Marie-Madeleine. Autrefois, elle était ténèbres, maintenant, elle est lumière (cf. Ep 5,8). Une seule chose l’habitait : sortir de ce fonds d’opacité, sortir de sa tristesse. Elle ignorait que c’est là quand elle touche le fond que la lumière l’attendait. Elle vibrait de ténèbres lumineuses. Là, elle ne voyait rien, mais voyait tout.  Dans la pénombre du matin, elle voyait un Soleil radieux. Elle éprouva soudainement une montée de lumière, une bouffée de chaleur qui l’a fait courir annoncer qu’il est vivant. Le refus des apôtres de croire en elle l’a énergisé. Elle est devenue femme nouvelle.

L’urgence aujourd’hui est de ne pas taire la lumière au milieu des ténèbres. Les Actes des apôtres débordent d’exemple de gens qui, sans culture, de simples croyants sans nomination officielle, avec audace et courage, annoncent Jésus. Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile. Les menaces des officiels du culte n’ont pas réussi à les faire taire tant, précisait le pape dans une homélie^[3], leurs cœurs étaient fermés, durs, corrompus. Voilà bien le drame d’aujourd’hui, voir partout des menaces à ce qui a toujours été fait ou dit comme ça.

Pâques ne s’adresse pas seulement aux autres, mais à nous-mêmes, à l‘Église. Vivons-nous ce que nous croyons ? Croyons-nous ce que nous annonçons ? Prêchons-nous ce que nous vivons ? (cf. Evangelii nuntiandi). Cherchons avec le même courage de Marie-Madeleine à trouver Jésus aujourd’hui en sortant de notre acidité intérieure et reconnaissons que c’est avec une sorte de noirceur lumineuse que nous dirons à notre monde : nous avons vu le Seigneur. Amen.