Année C : Ascension de Jésus 2022
Lc 24, 46-53 oui, je le veux
Je commence par une question, une question que j’entends souvent aujourd’hui. Si Jésus vivait de nos jours, que dirait-il, que ferait-il ? Je donne la réponse suivante : Jésus a fait sa part, faisons la nôtre ! (Bernard Feillet)
Jésus vivait à une époque qui n’est pas la nôtre. Les problèmes qu’il rencontrait étaient différents des nôtres. La mondialisation n’existait pas. Il ne s’agit pas d’imiter Jésus. La répétition n’est pas un critère de fidélité à quelqu’un. Jésus n’est pas là à nous souffler à l’oreille que penser et que faire pour être fidèle à l’esprit qui l’animait. Nous ne sommes pas des marionnettes entre ses mains. Il s’agit maintenant de s’inspirer de sa façon d’agir.
Comment a agi Jésus ? Jésus ne déresponsabilisait pas les gens en les manipulant. Il n’imposait jamais aux gens de le suivre. Il n’a jamais recommandé aux gens en situation précaire d’aller prier au temple comme solution. Il n’a pas demandé aux gens de regarder le ciel, comme solution pour changer, améliorer leur situation.
Jésus a risqué d’être humain dans une société où l’exclusion était la règle. Quand on porte attention aux écrits évangéliques, nous observons que Jésus était bon envers tout le monde, qu’il saluait tout le monde, prenait le temps de manger avec tout le monde. Il a risqué de s’asseoir au puits de Jacob pour parler avec une Samaritaine, aux tables des prostituées, des voleurs. Il a risqué de dire qu’on peut être une bonne personne sans fréquenter les temples. Il a risqué d’être le défenseur des exclus, des femmes. Il fut poète de la compassion.
En retournant là demeurer chez son Père, Jésus nous demande de s’inspirer de lui pour que se réalise son rêve d’une terre fraternelle, juste. Il ne nous envoie pas pour agir comme lui, c’est un impossible. Il nous propose de s’inspirer de son message, de son écoute. Pour nous aider à nous inspirer de sa manière de vivre, il nous assure qu’il sera toujours avec nous.
Le message le plus important que Jésus laisse à ses disciples en les quittant est son engagement à maintenir une solide relation avec eux. Je serai toujours avec vous au milieu de vos moments de joie comme au milieu de vos « enfers » aussi. Jésus, à scruter les évangiles, est celui qui fut tout sa vie avec nous, pour nous nourrir, guérir, pardonner, relever, cheminer. Il fut aussi avec ceux qu’on laisse sur le bord du chemin ou qui ne répondent pas aux normes de la bienséance. En nous quittant, Jésus nous fait une promesse nuptiale, oui je le veux.
Nous sommes incapables d’imaginer la profondeur de son oui, je le veux. Rien, aucune trahison, aucune distance avec lui ne va briser cette relation nuptiale avec nous. Sa relation avec nous est un oui d’amour inconditionnel. Son oui redresse nos courbatures (cf. Lc 10, 13-17), réchauffe nos relations refroidies, nous fait renaître une 2e 3e 4e fois (cf. Jn 3, 4). Ses yeux sont trop purs pour briser son oui, je le veux, sa relation avec nous.
Paul exprime cela autrement. Nous avons été saisis, mais nous n’avons pas saisi (cf. Ph 3, 12). Son départ appelle un autre regard, celui de la foi. Jésus échappe aux regards visibles des disciples. Il s’engage, oui je le veux, à ne pas les quitter. Il se donne à croire. Il est venu, mais signe de son immense respect pour notre autonomie, il ne s’impose pas. Notre béatitude, c’est de lui dire reviens, reste avec nous, le jour décline (cf. Lc 24, 29).
Jésus annonce qu’il fait semblant de briser la relation. Saint Bernard offre cette réflexion. Avec discrétion, il entre en relation avec moi, mais moi, je ne l’ai pas senti chaque fois. Jamais je n’ai eu le sentiment ni de son entrée ni de sa sortie. Tant que je vivrai, j’userai familièrement cette parole de l’épouse, reviens.
Jésus est venu un jour, c’est pour toujours. Une mystique béguine dit cela : c’est en s’éclipsant qu’il se laisse trouver. S’il se cache, il nous révèle ses secrets. De la même manière que vous l’avez vu partir, il reviendra (cf. Ac 1, 11). Lisons ce départ comme une promesse de fidélité, oui, je le veux. Le Cantique des cantiques présente cet engagement comme l’histoire d’un baiser, signe d’une nuptialité inédite de Dieu avec nous.
Personne ne peut nous ravir cette joie (Jn 16, 22) de savoir que oui je le veux, Jésus ne le reniera jamais. AMEN.
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