Année C : samedi de la 3e semaine de Pâques (litcp03s.19)
Jn 6, 60-69 : pourquoi je demeure chrétien
Qu'est-ce que Jésus a pu dire pour susciter une telle réaction ? Souvenons-nous que Jésus, avec quelques pains et quelques poissons, avait donné à manger à une foule de plus de cinq mille personnes ! Ce n'est pas rien, mais les réactions ne furent pas aussi vives que ce matin. Plutôt que de le quitter pour ce geste étonnant, la foule voulait le faire roi.
Dans le désert, ce geste de Jésus nourrissant la foule avec presque rien était un signe, non un miracle, pour aller plus loin; mais pour aller où ? C’était un geste pour avancer plus en profondeur, mais jusqu’où ? Jean au terme de sa lecture de l’eucharistie, offre une parole tellement rude, dure à entendre, à comprendre, tellement scandaleuse, traduit la bible de Jérusalem, qu’elle fait reculer les disciples. Quelle est cette parole pour aller plus loin ? Plus en profondeur ?
Jésus offre d’entrer dans une relation personnelle et intime avec lui, une relation qui nous introduit dans la vie même de Dieu. Je suis descendu du ciel pour vous dire des paroles qui sont vie. Jésus invite à porter plus haut notre désir de vie. Il offre une nourriture d’éternité. Pour nous éviter de mourir, Jésus nous offre de demeurer en nous et nous en lui.
À la samaritaine, Jésus offre une eau vive jaillissante en vie éternelle. À ceux qui entendent sa parole, il propose un pain qui fait vivre, un pain qui fait participer, élève jusqu’à sa propre vie de fils du Père. . Le Seigneur des surprises [nous] invite non seulement à être surpris, mais aussi à réaliser des choses surprenantes (Pape François, 5/6/19). Ce pain donne de l’avenir à notre avenir L’œuvre de Dieu est de nous rendre participants de sa divinité. Cette foi fait de nos vies des œuvres d’art que le Père a rêvé quand il nous a créés (cf. Exhort. Ap. Gaudete et exsultate, 32)
Pour les proches de Jésus, entendre cela était intolérable. On ne peut plus l’écouter. Plusieurs s’en allèrent, dit Jean. Avouons-le, les paroles de Jésus, qui me mange vivra, ma chair est nourriture, ne sont pas faciles à entendre. Elles s'adressent à nous, ce matin. Allons-nous continuer à l'écouter ? Devant nous, une option : écouter ou cesser d’écouter quand on dépasse les bornes. Voulons-nous partir nous aussi ?
Récemment, dans un livre qui a pour titre Pourquoi je suis demeuré chrétien et resté catholique, Mgr Doré, ancien archevêque de Strasbourg, donnait cette réponse : à cause de Jésus.
Des paroles dures qui nous incitent à choisir, qui nous invitent librement à marcher avec Jésus ou prendre un autre chemin. Ces paroles de Jésus sur le Pain de vie marquent un tournant dans toute vie. Elles obligent à choisir, provoquent une crise, une crise qui est une grâce, une crise qui nous amène plus loin, plus en profondeur, plus en vérité dans notre relation avec Jésus.
Un hymne pascal chante que c’est en goûtant sa chair toute sainte brulée sur l’autel de la Croix, en goûtant le vin de son sang [que] nous vivons de la vie de Dieu. Dès les premiers temps du christianisme, les docteurs de la foi chrétienne écrivaient : si tu comprends, ce n’est pas Dieu que tu as trouvé.
Jésus, ce matin, nous invite à passer d'une foi du merveilleux, celle de la foule nourrie au désert avec presque rien, à celle d’une foi qui appelle à être avec Dieu, à être à Dieu, qui veut devenir notre ami, notre nourriture jusqu’à demeurer en nous et nous voir demeurer en lui. C’est pour parvenir à cette union que Jésus s’est fait pain de vie. Il nous faut beaucoup de temps pour accueillir cette nouvelle, pour ne pas nous aussi quitter Jésus.
Votre retraite vous a conduit à regarder celui qui invite à entrer dans son intimité. Ce matin, écouter ce Jésus ouvre une brèche à la finalité de toute vie. Nous sommes éternels. Ces paroles sont dures à entendre. Elles ouvrent sur l’émerveillement, l’Action de grâce.
Je termine par ces mots que le pape François adresse aux jeunes au début de sa lettre pastorale Christus vivit : il vit et il te veut vivant. Il est en toi, il est avec toi et il ne te quitte jamais […]. Le Ressuscité est là, t’appelant et t’attendant. Amen.
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