Année C: mardi 1ière semaine ordinaire (litco01m.16)
Jean 15, 9-15 : Marguerite Bourgeois, une pionnière de la foi chez nous
Le plus grand acte de charité que nous puissions faire pour le monde et pour l’humanité, c’est de lui procurer un saint, que ce saint soit un autre ou nous même (Père Marie Eugène dans Je veux voir Dieu). Qu'est-ce qu'un saint ? Les réponses sont nombreuses mais s'unifient toutes autour de ce qu'exprimait un grand priant, saint Bernard: tous les chercheurs d'eux-mêmes méconnaissent Dieu [parce qu'] ils sont prisonniers de leur volonté propre qui cherche seulement leur avantage et [qui] les empêche de se tourner vers les autres.
La vie de Marguerite Bourgeois confirme ce que percevait ce grand mystique Bernard. Elle ne se regardait pas. Ne s'admirait pas. Ne s'appartenait plus. Elle appartenait à Dieu qui méritait à lui seul toute son attention. Toutes ses pensées. Le grand secret que nous livre son implication sociale tant auprès des jeunes foyers, des malades qu'auprès des enfants, fut de demeurer dans le Christ. Pour l'exprimer avec des mots de ce temps de Noël qui s'achève, elle fut un «sauveur» pour la colonie naissante.
Dieu était son chez soi et son chez soi était Le sien (Jean de Bernières, 1602-1659). Elle était en Dieu plus qu'en elle-même. Plus exactement, elle était hors d'elle-même tant elle vivait son quotidien en Dieu. Elle vivait avec Jésus la même relation que Jésus vivait avec son Père. Elle vivait dans l'intimité de Jésus comme Marie, qui occupait une grande place dans sa vie, vivait dans l'intimité de son Fils.
Cette «demeurance» en Jésus a été son environnement quotidien. Elle a vécu dans une atmosphère d'adoration avec Jésus. Mais attention, adoration non pas en élevant la tête et les yeux pour le voir au plus haut des cieux, mais en baissant la tête et les yeux pour le voir dans les plus petits. Jésus ne voyait que pour le Père. Marie ne voyait que pour son Fils. Marguerite Bourgeois ne voyait que les pauvres et miséreux de la colonie naissante. Le don de soi est la meilleure expression de toute rencontre avec Jésus. Il n'a pas dû être facile de célébrer les louanges de Dieu en un désert, où Jésus Christ n'a jamais été nommé pour citer Lorraine Caza,cnd.
Pour elle, la rencontre de Dieu est impossible sans la rencontre de l'autre. Pour elle, le rapport à l’autre, c’est le lieu où Dieu est déjà là (Guy Paiement, s.j.) Elle fut non pas une copie-conforme de Jésus, une reproduction ou image de Jésus. Elle fut Parole et Visage de Jésus pour les enfants à qui elle a donné sa vie. En le faisant naître dans les cœurs, elle a préparé [chez nous] les voies du Seigneur.
Migrante d'un pays plantureux vers un pays, dirait-on aujourd'hui en émergence, Marguerite Bourgeois laisse voir que tout chrétien, tout baptisé perçoit sa vie en mode migrant. En mode déplacement vers les autres. Un chrétien qui ne sort pas de lui-même pour aller vers les autres, avec amour et miséricorde, n'est pas en mode imitation de Jésus. Nous devons avoir le courage de nous mettre toujours en chemin pour rechercher le visage du Seigneur.
Grande priante, elle a aussi priorisé le service et l'amour des autres, des petits. Elle a trouvé en Dieu l'assurance qu'il fallait pour annoncer au prix de grandes luttes, l'Évangile de Dieu [...] avec plein de douceur comme une mère qui entoure de soins ses nourrissons (1Th 2, 2b, 7).
Que nous resterait-il gravé dans nos mémoires sur cette femme si on éliminait toutes ces personnes fragiles, les malades, les clochards de son temps ? Nous nous demanderions avec raison pourquoi elle a quitté sa terre natale. Elle aurait pu demeurer dans le Christ sans quitter son lieu d'origine. Devant sa passion d'aider les autres et de leur montrer Jésus, peut-être aujourd'hui nous trouvons-nous bien tièdes. Trop réservés aussi.
Que l'oraison d'accueil se réalise en nous : Permets qu'à son exemple, nous puissions par nos paroles et notre conduite proclamer, sur toutes les routes qui mènent à toi, la présence et l'amour du Verbe incarné. AMEN.
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