Année B: Mardi 2e semaine ordinaire (litbo02m.15)
Marc 2, 23-28 : sabbat ; n'ajoutez rien à la Loi.
Dans le judaïsme on ne parle pas de la foi mais de la Loi, écrit Jean-Marie-Élie Setbon dans De la kippa à la croix, conversion d'un juif au catholicisme, Salvator 2013. Il ajoute que la foi est moins mise de l'avant car la pratique de la Loi est prioritaire. L'auteur sait de quoi il parle parce qu'il a vécu avec une grande honnête, une grande sincérité sa foi judaïque avant d'être touché par un tremblement inexplicable dans sa jeunesse par la vue de la Croix. Il a combattu et caché ce tremblement à ses enfants durant plus de trente ans.
Jésus, de naissance, connait très bien et de l'intérieur comme l'auteur Setbon, la loi de Moïse et l'importance donnée à la pratique de cette Loi. Jésus observe dans l'attitude des chefs religieux que la pratique de la Loi est priorisé au détriment de la relation aux autres.
La grande nouveauté de Jésus, nouveauté qui a tellement choqué et dérouté les chefs religieux, et dont il s'est fait un défenseur énergique, se résume en une seule formule qui contient toute la Loi et sa plénitude : tu aimeras ton prochain comme toi-même (Ga 5, 14). Saint Jacques pose une bonne question quand il se demande à quoi peut bien servir d'observer la loi si on trébuche sur un seul point (Jc 2, 10), celui de privilégier la Loi plutôt que la personne ?
Lorsque Jésus opère des guérisons le jour du sabbat, Il ne viole pas la Loi de Moïse. Il ne manque pas à la sainteté de ce jour. Il en donne, avec autorité, une interprétation authentique : Le sabbat a été fait pour l'homme, et non l'homme pour le sabbat (Mc 2, 27). Pour lui, il est permis ce jour là de faire le bien, de sauver une vie (Mc 3, 4), de manifester de la compassion (Catéchisme, #2172-73). C'est du gros bon sens.
Jésus s'oppose seulement à ce qui a été ajouté par la tradition orale et qui est une transgression de la Loi écrite de Moïse. Il est écrit : Vous n’ajouterez rien à ce que je vous prescris, et vous n’en retrancherez rien ; mais vous observerez les commandements de l’Eternel, votre Dieu, tels que je vous les prescris (Dt 4, 2 ; 12, 32). Si Jésus-Christ avait transgressé le sabbat, Il aurait péché. Or, les Écritures disent qu’Il n’a point commis de péché (1 Pi 2, 22).
Selon Joachim Jérémias, un érudit, les pharisiens considéraient que la tradition orale avait plus de valeur que la « Torah ». Ils ont enfoui la Loi sous une lourde charge d'ordonnances et d'observations extérieures. Cela est surtout évident en regard d'une pratique pointue sinon incongrue du sabbat. Tout est braqué sur l'extérieur.
Jésus ne partage pas cette vision qui transgresse à ses yeux l'esprit de la Loi. Pour lui, la Loi est un chemin pour entrer en relation avec Dieu. Il s'agit plus que de pratiquer une Loi, mais bien d'accomplir la volonté de Dieu qui porte attention à toute personne humaine. Les chefs des prêtres, disait François (homélie du 15 décembre 2014), négociaient tout : la liberté intérieure, la foi, la patrie, tout sauf les apparences, c’étaient des opportunistes à qui importaient de toujours bien se sortir des situations difficiles.
Pour bien comprendre ce que pouvaient vivre les chefs religieux devant l'attitude de Jésus, songeons à ce que certains ont pu vivre lorsque Pie XII a assoupli la loi du jeûne eucharistique. À l'époque une seule goutte d'eau après minuit empêchait d'aller communier. Plusieurs l'avaient traité de traite, criaient au scandale devant un tel changement. Aujourd'hui, quelque cinquante ans plus tard, cette loi d'être à jeun depuis minuit paraît bien démesurée devant la priorité à recevoir Jésus en soi.
À votre contemplation: cette semaine de l'unité des chrétiens nous fait voir différents chemins, différentes manières pour accueillir Jésus. Elle invite à aller, comme l'exprime dans presque toutes ses rencontres le Pape François, à la rencontre de l'autre marchant dans des sentiers différents. Puissent les lois et les pratiques de la foi qui nous divisent se transformer en ponts pour célébrer ensemble celui qui nous donne à boire. AMEN.
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