Année A: Samedi 6e semaine de Pâques (litap06s.14)
Luc 1, 39-56 : Visitation
Il ne s'agit pas de comprendre le sens de cette visitation de Marie mais d'entrer dans ce mouvement de sortir pour aller vers les autres. Mieux encore, il faut que cet évangile entre en nous. Il faut qu'il inscrive en nous ce mouvement permanent de démontrer que nous portons en nous-mêmes un secret, une bonne nouvelle. Nous portons en nous Dieu.
Ce secret, Marie l'a reçu d'un envoyé du Ciel. Elle ne savait sans doute pas comment l'annoncer. Elle ne savait pas non plus si elle devait en garder le silence ou en parler. Elle ignorait sans doute comment s'y prendre pour le livrer sans en trahir l'invraisemblable.
Mais elle déborde tellement de joie qu'elle sort de «sa» visitation pour aller porter son aide à une femme âgée, guérie de sa longue stérilité. Elle sort emportant celui qui la porte et qu’elle porte. Se produit alors cette merveilleuse, bienheureuse rencontre non à deux, non à quatre, mais à cinq : Jean-Baptiste, Jésus, Marie, Élisabeth et l’Esprit-saint. Elle sort heureuse d'avoir crû l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur.
Plus qu'une visitation d'amitié, c'est une révélation mutuelle que cette visitation. Chacune révèle à l'autre le mystère de leur étonnante maternité. Marie révèle à Élisabeth qu'elle porte Dieu. Élisabeth révèle à Marie qu'elle sera mère du Sauveur. Au bonheur d'Élisabeth de sentir l'enfant tressaillir en elle, Marie répond par un chant d'exultation.
Élisabeth et Marie, l’une comme l’autre, sont conscientes qu’un mystère les habite. Loin de tout bavardage mondain, une stérile et une vierge enceinte, c'est un beau sujet de bavardage n'est-ce pas ? Loin d'une simple conversation, Élisabeth et Marie entament une véritable liturgie d'action de grâce, dans un cœur à cœur de très haute densité.
Mon bonheur à moi, dit Élisabeth, remplie de l'Esprit-saint, c’est de sentir que mon enfant tressaille d’allégresse dans mon sein, en présence de ton enfant, le fruit de ta confiance dans les promesses de Dieu. Mon bonheur à moi, dit Marie, c’est de savoir que mon enfant sera un cadeau de Dieu pour les humbles qu’il élèvera, pour les affamés qu’il comblera de biens, pour tout le peuple des craignant-Dieu, dont le Très-Haut va se souvenir dans son amour.
Cet empressement de Marie à sortir pour aider sa cousine sans pour autant savoir comment lui annoncer SA nouvelle, c'est l'aventure de notre Église, de chacun d'entre nous. En nous, au sein de nos communautés chrétiennes, il y a un empressement à aider, à rendre service tout en éprouvant ne pas savoir comment s'y prendre pour annoncer ce que nous portons en nous. Cette scène résume toute la vie de l'évangélisateur.
Comme Marie, nous sommes porteurs d'une nouvelle. Comme elle, nous ignorons comment l'exprimer. Toutes les Élisabeth que nous rencontrons, sont, elles aussi, porteuses d'une bonne nouvelle, quelle qu'elle soit. Marie a simplement salué Élisabeth, mais c'est Élisabeth qui a déclenché cet admirable échange.
La simple salutation de l'autre éveille, fait vibrer quelque chose de profond en lui et dans ce quelque chose de profond se trouve les premiers pas de toute évangélisation. Évangéliser, c'est d'abord un chemin de visitation, un chemin de salutation de l'autre, de rencontre. Souvent évangéliser commence quand j'accepte de donner un coup de pouce à l'autre. Quand je me mets à son écoute. Et très vite, l'évangélisateur réalise que ce que l'autre porte au plus profond de lui-même, c'est Celui que nous voulons lui annoncer.
À votre contemplation, ces mots de François : nous sommes ici pour rencontrer le regard de Marie qui reflète le regard du Père qui en fit la mère de Dieu. Il ajoute ces mots-prières : Marie, donne-nous ton regard. Tourne notre regard vers les autres. Pour toutes ces rencontres qui aujourd'hui libérera le Magnificat des évangélisateurs, devenons Eucharistie, le chant par excellence des porteurs de Dieu. AMEN.
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