Année B: Samedi 1er semaine AVENT (litba01s.14)
Matthieu 9, 35-10,6-8 : allez en périphérie : foule sans berger
Voici le chemin, prends-le, vient de nous dire le prophète Isaïe. Mais la question surgit, instantanée: de quel chemin s'agit-il ? C'est celui qui conduit en périphérie, là où est né Jésus. Le temps de l'Avent nous prépare à sortir de nos sécurités, à nous arracher de nos conforts, pour aller en périphérie, dans nos Bethleem. Dans nos Galilée. Ici, cela signifie vivre cette mystique, le mot est dans la lettre de François adressée à tous les consacrés, de communion dans la prière.
Le lieu de la naissance de Jésus indique où nous conduit le chemin. Ce chemin est un saint pèlerinage (Exhortation apostolique La joie de l'évangile, #87) interrompu vers cette foule sans berger, en attente de sortir d'une périphérie où domine une panoplie de souffrances, de conditions dégradantes. La naissance de Jésus, dehors en pleine nuit d'hiver, nous redit blanc sur noir, que c'est en proximité qu'il faut se tenir. Demeurer.
Nous n'avons plus le luxe de la sédentarité ni celle d'une vie emmitouflée dans nos édredons, cette couette où nous nous réfugions pour ne pas entendre les cris de notre monde. Nous vivons un temps où il nous est très indiqué de veiller, disait le Père Jacques de Jésus, carme, à la veille de la seconde guerre mondiale. Noël est la réponse d'un Dieu au cri de détresse de son peuple. Pourquoi, Seigneur, nous laisses-tu errer hors de ton chemin (Is 63, 16b).
Jésus l'exprime par ces mots : Allez vers les brebis perdues ... sur votre route proclamez que le royaume des cieux [qu'une terre fraternelle] est proche. Tendre la main à l'être humain de notre temps, tendre la main de Celui qui seul peut apporter lumière, paix, le pape François décrit ce mouvement d'exode comme la joie de l'Évangile. L'Eternel dit: J'ai vu la souffrance de mon peuple. Les cris que lui font pousser ses oppresseurs… je connais ses douleurs (Ex 3,7).
Aucun découragement dans ce regard de Jésus pris aux entrailles par l'immensité des besoins qu'il voit. Aucun doute non plus sur la fragilité des envoyés. Ce qui domine, chez Jésus, c’est son regard plein de compassion, de miséricorde comme nous le rappelait la première lecture.
La grande révélation ou révolution de l'évangile : allez. C'est la dernière parole que Jésus a adressé aux siens chez Marc (Mc 16,15). Par son souci de la foule fatiguée, abattue, Jésus démontre qu'il y a une limite au sans limite actuel de tout miser sur soi. De tout miser sur son seul bien-être. Ne vous repliez pas sur vous-mêmes, ne vous laissez pas asphyxier par les petites disputes, ne restez pas prisonniers de vos problèmes (Exhortation apostolique,#4). La lettre ajoutait : j'attends de vous des gestes concrets (#4) [...] que toute forme de vie consacrée s'interroge sur ce que Dieu et l'humanité demandent (#5).
Allez, faire exister l'autre. Allez expulser cette maladie de l'auto-référencement, comme le rappelle souvent François. Les crises que nous connaissons, écologiques, sociales, planétaires, sont les conséquences de la démesure du moi, de l'affaiblissement de l'existence de l'autre. En régime chrétien, l'autre (l'étranger, le prisonnier, etc.) n'est pas là pour promouvoir nos bonnes œuvres. Il n'est pas le client de nos bonnes actions. De notre charité. L'autre est de notre race, de notre fraternité. Il est notre frère à qui porter attention, envers qui pratiquer la communion de nos biens matériels et spirituels...le respect des personnes les plus faibles (Lettre apostolique, #3). Jésus nous envoie faire exister l'autre en nous proposant une seule attitude: emmenez avec vous la joie.
Comme final de l'évangile, ce matin, Jésus ne propose pas d'élaborer de grands plans de communication, des campagnes de pub mais de nous engager à fond dans la mission qui est la vôtre ici : Priez le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. AMEN
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