Année B: Mardi 4e semaine de l'Avent (litb04m.14)
Luc 1, 57-66 : un homme remarquable, Jean le Baptiste
Qui es-tu ? Que dis-tu de toi-même ? Questions qui ouvrent l'évangile de saint Jean. Nous connaissons bien que ce nom a été «imposé» à ses parents parce que personne dans la famille ne portait ce nom. Mais connaissons-nous l'homme qui porte ce nom ? Contemplons-nous assez cet homme ?
Naissance inattendue, merveilleuse, à l'heure où le soleil est à son plus faible et que la nuit est à son comble. Nom étonnant qui laisse pressentir l'irruption radicale d'une nouveauté inédite, d'une autre naissance qui l'a fait tressaillir de joie dans le sein de sa mère. Existence marquée par un destin exceptionnel : être la voix d'une Parole. D'une Parole à proclamer jusqu'au martyr.
Malgré cela, la question demeure : qui es-tu ? Matthieu nous montrera un Jean qui se cherche tant il se demande si Jésus est vraiment celui qui doit venir (cf. Mt 11, 2-11). Qui es-tu ? C'est une question à contempler.
Les Écritures nous rapportent que Jean est quelqu'un de grand, même le plus grand des enfants des hommes, dont la grandeur ne lui a pas servi tant il a connu une fin misérable. Quelqu'un de grand, mais qui ne souhaitait qu'une chose : disparaître, s'effacer, faire de la place à un autre. Il faut que je décroisse. Quelqu'un de grand, mais dont le regard perçant lui a fait voir un plus grand que lui, quelqu'un que vous ne connaissez pas. Quelqu'un de grand qui remet le monde en route en lui interdisant de se replier sur lui-même. Quelqu'un de remarquable, d'une grande élévation (saint Augustin) et qu'il faut admirer en ces précédentes heures de Noël.
Il nous faut contempler longuement la manière de vivre de cet homme. L'admirer dans son refus de se prendre pour un autre. D'être considéré comme quelqu'un d'important. D'être lumière. L'admirer dans son incapacité à taire une voix plus forte que la sienne. L'admirer pour son regard pénétrant (Nb 24, 3) [qui] voit ce que le Tout-Puissant lui fait voir, [qu'] il tombe en extase et ses yeux s'ouvrent (Nb 24,4). Une telle admiration est rarissime de nos jours.
Admirons son regard et sa capacité à regarder au delà du visible. Il nous faut admirer son appel à saisir que la plus merveilleuse façon de montrer quelqu'un est de se cacher. De s'effacer. Aujourd'hui, nous ne rêvons que d'actions éclatantes, de visibilités, d'exploits. Devant nos yeux, un homme dont la seule réussite fut l'effacement. Un homme qui nous dicte un chemin d'évangélisation.
Chemin difficile à comprendre pour nous à l'heure où tout se voit. Pour comprendre cela, il faut consacrer beaucoup de temps à nous retirer à l'écart et saisir que l'important demeure souvent invisible au regard superficiel. Nos yeux sont éblouis, aveuglés par l'étincellement extérieur.
Jean-Baptiste aurait facilement signé ces mots d'une mère de famille dont on ignorait tout sur son intense vie spirituelle jusqu'à la découverte en 1994 de son journal intime. Elle y écrivait: le mot exister, c'est quand je n'existe plus qu'il est vrai. Je sens que je n'existe plus mais qu'Il existe.
Le message que nous lance ce prophète-précurseur de Jésus n'est pas facile, celui de ne plus exister pour donner toute la place à l'autre. Celui qui est uni à Dieu est de la même ossature [du même esprit] que le Christ (cf. 1 Co 6, 17) qui n'avait d'autre existence que de montrer le Père. Une vie d'effacement, c'est le seul chemin pour voir celui qui vient nous sauver.
À votre contemplation: je le redis, la plus merveilleuse façon de montrer quelqu'un est de se cacher. C'est le chemin que nous propose Jean. C'est le chemin emprunté par Jésus. En se faisant homme, il s'est rendu visible à nos yeux, mais ce fut aussi une redoutable façon de nous cacher son visage divin. AMEN.
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