Année C: Dimanche de la Trinité (litctri.13)
Jean 16, 12-15 : UNE PORTE DE LA FOI, SE SOUVENIR DE DIEU
Un chrétien qui ne sait pas faire mémoire de Dieu n'est pas un chrétien, affirmait récemment le pape François (14 mai dernier). Il est plus important de se souvenir de Dieu que de respirer, disait un autre pape, saint Grégoire le Grand. Et nous sommes ici justement pour nous donner une mémoire qui vient du cœur, pas seulement de notre intelligence, nous donner une mémoire pour nous souvenir que nous avons été baptisés au nom du Père, du Fils et de l'Esprit. Nous sommes ici pour respirer deux bonnes nouvelles, celles qui sont le cœur et le centre de notre foi : notre Dieu est pluriel ; nous sommes le ciel de Dieu. Nous ferons notre demeure en lui.
Nous souvenir, c'est le premier acte qui conduit à la foi. C'est la porte de la foi. De l'émerveillement. Nous avons reçu la mémoire pour porter notre Dieu en nous et au monde. Cette fête de la mémoire nous fait humer un Dieu qui transforme nos vies. Ce matin, regardons, méditons, contemplons ce Dieu trois fois saint, ce Dieu dans la beauté manifestée en Jésus, beauté d'une manière nouvelle de vivre entre nous.
Fête de la mémoire, fête aussi de la purification de nos mémoires blessées. Nous avons souvent de Dieu une mémoire de personne blessée. Nous parlons de Dieu non pas à partir de ce qu'il est mais tel que nous pouvons le saisir à travers notre vécu personnel. Nous avons souvent la mémoire d'un Dieu qui nous a blessés.
Pour dire ce Dieu de notre foi, nous avons des mots usés. Des mots vieillis qui sont devenus inaudibles pour la plupart de nos contemporains. Peut-être pour nous aussi. Dieu, qu'est-ce que ce mot veut dire aujourd'hui ? Dès que ce mot est prononcé, il ouvre sur de multiples interprétations. Dieu n'est pas ce que nous croyons. Comment parler de Dieu ? Comment nous parler de Dieu ? Le défit actuel vient que tous nos mots pour dire Dieu sont d'une autre époque, d'une autre culture. Parler de Dieu dans le langage des premiers siècles, c’est se condamner à n’être pas entendu.
Les mots Dieu, créateur, Père, Fils, Esprit/souffle, tous ces mots sont soumis à des malentendus. Le message chrétien est devenu inaudible ou illisible (Christoph Théobald). Arrive un jour, écrivait Lise Lachance dans le livret du Carême dernier, où nous prenons conscience que toutes ces images que nous avons données à Dieu ne lui conviennent plus. Le temps est venu de lui enlever les masques dont nous l'avons affublé. Paul, l'apôtre, dit qu'il nous faut oublier ce qui est en arrière et nous élancer vers ce qui est en avant. Je ne me souviendrai plus du passé (Is 43,25).
Dieu, ce mot provoque-t-il en nous le vertige ? Vivons-nous comme si ce mot n'existait pas en nous ? N'habitait pas en nous. Je trouve beaucoup de sens dans la position de nos frères juifs, nos ainés dans la foi, pour citer Benoît XVI, pour qui le nom de Dieu est imprononçable. Nos mots humains ont tout pour rapetisser ce Dieu, pour trahir ce nom de Père, créateur de nos vies, ce nom de Fils, recréateur d'une nouvelle manière de vivre et ce nom de l'Esprit, cet inconnu qui nous aide à faire mémoire de Dieu (François).
Or, avant de quitter ce monde, Jésus lève le voile sur la proximité qui l'unit au Père et à l'Esprit. Il est dans le Père. Jésus n'a rien de lui-même. Il dit ce qu'il a appris du Père. L'Esprit aussi ne fait que redire tout ce qu'il a entendu du Père et du Fils. Prononcer le nom de Dieu, Père, Fils et Esprit oblige en une manière de vivre à l'opposé de nos manières à nous. Contrairement à nous qui insistons sur nos «moi», Dieu se définit comme ne possédant rien. Le Père a tout remis au Fils. Le Fils n'agit que dans le Père. L'Esprit nous dit tout ce qu'il a entendu du Père et du Fils. Il nous introduit dans la vérité tout entière (Jn 16, 13).
La nouveauté des nouveautés, et qui sera toujours une bonne nouvelle, c'est que Jésus en quittant ce monde nous a dit que désormais Il habiterait notre monde en faisant en nous sa demeure. Il nous propose comme projet de vie, la manière de vivre qui est celle du Père, Fils et de l'Esprit. Chemin de bonheur qui se trouve à l'opposé de l'individualisme, au chacun pour soi qui marque nos vies. Chemin de bonheur que de vivre en relation d'intimité avec notre Dieu-trinité. Désormais, le ciel est en toi, disent les grands priants. Communier, c'est devenir ce que nous sommes, des participants de la nature divine. Des demeures de Dieu dans notre monde. Oui, gloire au Père, au Fils et au Saint-Esprit. AMEN.
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