Année B : Lundi 24e semaine ordinaire (litbo24l.12)
Lc 7, 1-10 le centurion romain -un incroyant-croyant
À lire cet épisode ce matin, monte en moi cette réflexion de Madeleine Delbrel la vraie vie de foi se tient et se développe [aussi] en milieu athée. Dans des coeurs athées et agnostiques aussi. Cet itinéraire du centurion pour qui la foi valait plus que tout autre bien du monde, a été rapporté par les évangélistes pour que la foi en Dieu prenne racine en nous. Cette foi non achetable parce que sans prix, a poussé un incroyant, c'est ce qu'on disait de lui parce qu'il ne fréquentait pas les temples ou synagogues, à faire des choses qui n'ont pas d'allure. À délaisser son travail, ses responsabilités pour saluer ce Jésus dont la rumeur de bonté est parvenue jusqu'à lui. Une salutation avec espoir de résultat.
Nous avons entendu ce texte plusieurs fois. Aujourd'hui il risque de bouleverser nos vies si nous l'entendons comme un appel personnel à marcher vers Jésus. Comme un appel adressé à tous les humains. Le centurion, ne l'oublions pas, était au fond de lui-même un incroyant-croyant. Il se tenait loin de toute religion tout en étant «dedans». Paul Tihon (pour libérer l'Évangile Cerf, 2009, chapitre 3, surtout les pages 60-63), suggère qu'il n'y a pas d'incompatibilité à affirmer qu'il y a, et ils sont nombreux, des incroyants-chrétiens comme il peut y avoir des musulmans chrétiens, des juifs chrétiens, peut-être des agnostiques chrétiens ? Une telle réflexion devrait nous permettre de voir notre monde «autrement croyant». Autrement chrétien.
L'auteur veut signifier par là qu'il ne faut pas nécessairement être dans la religion catholique pour vivre l'évangile de Jésus. Pour croire en Jésus. Cela fait du bien à entendre ! Pour lui, Jésus n'a pas fondé une religion. Devenir disciple de Jésus, devenir croyant en la capacité de Jésus de nous ouvrir à une plénitude de vie comme le centurion, cela n'oblige pas à changer de religion (P.64). Ouvre-toi disait Jésus au sourd (Mc 7, 31-37). Ouvre-toi à imaginer l'Église autrement. A imaginer la foi autrement.
Ne l'oublions pas, Matthieu a fait dire à Jésus à la suite de l'épisode de la femme syro-phénicienne, je vous le dis beaucoup viendront du levant et du couchant prendre place au festin d'Abraham....tandis que les héritiers du royaume resteront dehors (Mt 8, 11-12). Cela est redit dans la parabole des invités (Mt 22, 1-14).
Alors que se répand autour de nous l'impression que la foi se meurt, qu'elle ne sert qu'à bien mourir, qu'elle est comme une assurance vie, la démarche du centurion est bouleversante tant elle apparait plutôt comme un chemin qui remet en vie. Qui sert à réussir pleinement sa vie. Quelle belle invention que la foi de cet homme qui le fait marcher vers Dieu, vers une vie neuve, à partir de son chemin existentiel ! Tout est possible à celui qui croit (Mc 9, 23).
Tellement croyant, ce païen, tellement conscient de sa petitesse devant la renommée de Jésus, je ne suis pas digne que tu viennes chez moi, tellement conscient de la force qui se dégage de cet homme plus qu'humain qui s'approchait de sa ville, que Jésus n'a pu taire la beauté de ce qu'il percevait. Même en Israël, je n'ai pas trouvé une telle foi (Lc 7, 9).
Saintetés, ne nous arrêtons pas comme on le fait souvent malheureusement au prodige que fait Jésus en sachant bien que notre enthousiasme devant un geste merveilleux n'a pas empêché la foule de réclamer sa mort quand il a perdu en intensité. Vous ne saisissez pas encore, vous ne comprenez pas ? Vous avez le cœur endurci. Vous avez des yeux pourtant ! Vous ne voyez pas ? Vous avez des oreilles et n’entendez pas ? (Mc 8, 17).
La foi nous fait voir que la Parole ne se laisse pas enchaîner (2 Tm 2, 9). Que le grain de blé ne s'arrête pas de germer même si le semeur ne sait pas trop comment (Mc 4, 27). À l'aurore de l'année de la foi, cette exclamation de Jésus étonné de la beauté de la foi du centurion nous pousse à cette demande qui est loin d'être déraisonnable, ajoute-nous de la foi (Lc 17, 5-10). Nous éviterions ainsi de nous faire rabrouer par Jésus et par les spetiquies de notre milieu ... si vous en aviez....gros comme une petite graine. Amen.
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