ANNÉE A: FÊTE DE LA CROIX GLORIEUSE.
Jn 3, 13-17 : la croix éclaire nos croix
Pour l'exprimer avec clarté en ouvrant cette réflexion, cette fête de la croix glorieuse, association plutôt étrange de deux mots, éclaire nos croix. Elle est la plus grande œuvre du Christ (Jean de la Croix).Devant nos yeux de priants, le plus noir des événements de la vie de Jésus - Père, pourquoi m'as-tu abandonné - résonne de l'éclat d'une victoire. Étrange !
Devant nos yeux de priants, ce jour, un livre ouvert dans laquelle nous lisons l'immense désir de Dieu de nous voir bien vivre nos vies. Un chemin capable de nous aider à mourir à une vie en forme de mort. Un signe capable de nous redonner l'espoir, un signe de Jésus lui-même qui s'inviter dans nos vies.
Devant nos yeux, un trésor à contempler. Un chemin formé de quatre petits mots : Dieu a tant aimé. Quatre petits mots qui nous élèvent jusque dans l'intimité de Dieu. Pour nous montrer que nous avions du prix à ses yeux (Is 43, 1-4),non seulement il s'est approché de nous, mais s'est vidé de tout (première lecture). Il nous a aimés. Et aimer, c'est ne plus avoir d'existence propre. C'est tout donner. Zundel définit l'amour comme le sacrement de l'inexistence de soi.
Parce qu'il ne pouvait pas se résoudre à nous voir vivre œil pour œil, à se décider à poser sur nous un regard de condamnation, il nous a aimé. Il nous a donné son Fils. C'est tellement incroyable que c'est peut-être vrai, tellement déraisonnable, que ça ne peut pas être seulement des mots humains. Seul un Dieu pouvait inventer un tel chemin.
Pour nous faire entrer dans l'Éden, pour nous dire son souci historique annoncé par les prophètes de nous vouloir capables de retrouver notre ressemblance perdue, notre dignité, il n'a pas fait d'homélies. Il s'est abaissé jusqu'à la mort de la Croix. Devant une telle initiative d'un Dieu qui ne lâche pas prise sur nous, Jean de la Croix, dont l'expérience de la croix est centrale dans sa vie, pouvait écrire au sortir de son emprisonnement : que le Christ crucifié vous suffise. Si nous savions ce que représente ce chemin, nous comprendrions mieux qu'elle folie d'amour ce fut pour Jésus de nous donner sa vie.
Pour vous, ce matin, ces mots du diacre Éphrem, docteur de l'Église (IVe siècle) : Gloire à toi [Jésus]! Tu as jeté ta croix comme un pont au-dessus de la mort, pour que les hommes y passent du pays de la mort à celui de la vie… Gloire à toi ([Jésus] ! Tu as revêtu le corps d'Adam mortel et tu en as fait la source de la vie pour tous les mortels.
Laissons éclairer nos croix par la Sienne. Celle de notre monde aussi qui s'élève au dessus des ruines de Manhattan comme un immense élan de solidarité, celle où meurent tant de réfugiés de la faim en Somalie, celle aussi des orphelinats, des hôpitaux de Gaza, de Calcutta, c'est là qu'aujourd'hui Jésus a planté sa demeure pour que surgisse à nouveau la vie (préface).
Il ne suffit pas de nous émerveiller devant ces bras étendus qui nous accueillent, qui nous entourent de son amour, devant ce trophée dressé contre le mal (saint Jean Chrysostome), devant cet abaissement de Jésus, il s'agit d'entrer par cette eucharistie, dans ce mystère de Salut (Jn 3, 17). Rien n'est moins évident.
Puisque le Christ s'est tué à nous dire que nous étions faits pour vivre ; puisque son Père l'a ressuscité le troisième jour ; puisqu'il s'offre à nous, maintenant, dans son pain livré pour nous, fléchissons les genoux et proclamons en toute langue : Jésus Christ est Seigneur pour la gloire du Père. Redisons dans le silence de nos cœurs : Jésus-Christ, tu es le Seigneur de ma vie. Fais que je crois et tu seras ma gloire. AMEN.
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