Année B: 4e dimanche de l'AVENT (litba04d.11)
Luc 1, 26-38 : être «grosse» de Dieu.
Imitez-la, disait un peu avant sa mort la petite Thérèse qui questionnait la tendance de son époque à présenter Marie inabordable dans ses privilèges alors qu'elle est imitable dans sa manière d'accueillir Jésus. Imitable dans son invitation : faîtes tout ce qu'il vous dira (Jn 2, 5).Imitable dans son Fiat, qu'il me soit fait selon ta Parole (Lc 1, 38).Imitable dans sa manière de vivre la prière de son Fils : que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Tout au long de cette semaine « mariale», Marie est là devant nos yeux, dans sa vie réelle plus mère que reine, pour citer à nouveau la petite Thérèse (Derniers entretiens), pour nous apprendre comment laisser naître Jésus en nous, comment se laisser prendre sa vie (saint François de Sales). Elle est là comme chemin pour nous apprendre à engendrer son Fils. Quelle mère, et je cite encore la petite Thérèse, ferait disparaître la gloire de ses enfants ! Et notre gloire, c'est de resplendir de la beauté d'être (permettez-moi de le dire en des mots imagés) «grosse» de Dieu pour diffuser la beauté de Noël.
Noël est la réponse à la première question du catéchisme de l'Église catholique : pourquoi Dieu nous a-t-il mis sur la terre ? Pour faire naître en nous. Nous sommes le paradis de Dieu (Grignon de Montfort). À quoi bon confesser le Christ qui vient dans la chair, s'interroge un grand bibliste de l'antiquité, Origène d'Alexandrie, s'il ne vient pas aussi dans notre propre chair. La permission que Dieu demande à Marie de naître en elle s'adresse aussi à chacun de nous.
Noël n'est pas seulement la fête de la naissance d'un fils à Marie, fut-il le fils de Dieu. C'est aussi l'incarnation de Dieu en chacun de nous. Comment cela peut-il se faire ? Comment naître à nouveau après avoir pris tant de faux plis [étant vieux] ? Comment entrer une seconde fois dans le sein de sa mère (Jn 3, 3-4) ? Un des quatre évangélistes cisterciens, Guerric abbé d’Igny, répond : veillez sur vous-mêmes jusqu’à ce que le Christ soit pleinement formé en vous. Veillez à ce qu’aucun choc extérieur trop rude ne vienne à blesser ce fragile fœtus, veillez à n’absorber en votre ventre, c’est-à-dire en votre cœur, rien qui tue l’esprit que vous avez reçu. Ayez égard, sinon à vous-mêmes, du moins au Fils de Dieu que vous portez [...] (Sermon 2 pour l’Annonciation).
Le récit que vient de nous faire entendre Luc nous montre Marie en état d'effacement qui renonce à elle-même -que ta volonté soit faite. C'est l'expérience de toutes les mères qui s'effacent devant leur nouveau-né. Elles n'existent plus que pour l'enfant. En état d'oraison aussi devant cette annonce pour le moins inattendue de l'ange : mon âme exalte le Seigneur.
Saintetés, devant l'éminence de la réalisation de la promesse de cette naissance de Dieu en nous, la voie contemplative s'impose. Bien que déroutante, elle ouvre sur l'irrésistible émerveillement. Hier, c'était David (première lecture), puis Marie (évangile), aujourd'hui ce sont nous, des saintetés imparfaites, que le Seigneur a choisis pour lui construire sa maison. Paul précisait : voilà le mystère qui est maintenant révélé (Rm 16, 25).
L’enfant qui doit naître par nous dans notre monde est déjà en nous, nous travaillant par sa présence réelle en nous. La liturgie syrienne chante -et c'est très beau- quand Dieu entre en nous, il est le Verbe, quand il en sort, il devient par nous, le Verbe incarné. Voilà où nous conduit notre contemplation tout au long de cette semaine préparatoire à Noël. Irrésistible émerveillement que de reconnaître que nous ne sommes plus dans l'ordre du comment faire mais du comment être ! Dans l'ordre du mystère d'un Dieu qui délaisse des espaces infinies pour venir habiter dans un si petit cloître (Thérèse de Lisieux).
À votre contemplation : propose toi, dit le mystique de l'intériorité Jean Tauler (XIVe siècle), de méditer (cette semaine) ce qui te semble t'exciter le plus (Avent à l'école des saints 2011, p. 66) dans cette annonce faîte à Marie. Vivons ces derniers jours avant Noël en état d'oraison en conservant dans nos cœurs la parole de Dieu et nous deviendrons des «demeures» nouvelles de la Parole dans notre monde. Nous serons des «incarnations» vivantes de sa parole. AMEN.
Ajouter un commentaire