Année A : Vendredi 23e semaine ordinaire (litao23v.08)
Luc6, 39-42 la paille et la poutre
S’il y a une page d’Évangile qui nous décrie très bien, c’est celle que nous venons d’entendre. Jésus met le doigt sur une réalité à laquelle nous sommes tous confrontés. Que nous le voulions ou non, nous sommes doués d’une vue extraordinaire pour voir les défaillances chez l’autre. Nous jouissons de grandes habiletés pour faire voir ce qui nous trouble et cela au nom dit-on, de la « correction fraternelle ». Jésus nous dit aujourd’hui qu’un tel comportement est faux.
Nous sommes tous d’accord pour affirmer que nous ne sommes pas « parfaits » en théorie. Nous reconnaissons que nos regards sont embrouillés par nos « nous-mêmes », qu’ils prennent beaucoup d’espace, qu’ils souffrent de cataracte. Mais quand vient le temps de le reconnaître, c’est autre chose… c’est l’autre qui n’est pas parfait. Voilà bien l’erreur. Ce qui est de terrifiant dans cette page de la « paille et de la poutre », c’est que nous ne cessons pas d’être humain, alors que nous pouvons l’être autrement.
Depuis l’événement Jésus, nous savons que nous vivons dans un monde qui est saint, bon, réconcilié, « sauvé dès maintenant en espérance » (Rm2, 24). Pourtant, nous persistons à ressusciter le mal qui a été mis à mort, à ne voir que « la paille dans l’œil de notre frère ». Même si nous savons que tout brille de la lumière de Pâques, nous persistons à maintenir vivant le « vieil homme » qui a pourtant cédé la place en nous à une « créature nouvelle ».
Cette page nous confirme, - comme si nous en avions besoin! - que ce qui nous est spontanément naturel – nos regards accusateurs, le vieil homme – refait continuellement surface en nous alors qu’a été déposé, par pure grâce, un autre regard : celui de la beauté.
Mais pour que ce regard-là, ce regard de beauté du monde, regard divin, puisse refaire surface en nous, il faut nous réconcilier avec la beauté qui se cache dans tout être humain. Nous avons le regard de ce que nous lisons, de ce que nous voyons. Selon ce que nous lisons, le Journal de Montréal, la Presse, le Devoir, nous ne voyons pas la même chose. Ces journaux ajustent nos regards à leurs regards sur les événements. Nous pouvons aussi avoir le regard de ce que nous sommes. « Ne portez pas, dit Paul (1 Cor4, 4) de jugement prématuré, mais attendez la venue du Seigneur ». Jésus n’a-t-il pas suggéré de ne pas séparer l’ivraie du bon grain? N’a-t-il pas suggéré la patience jusqu’à attendre l’heure de la récolte? Que serions-nous devenus si nous avions été « arrachés » trop vite?
Au nom du Christ, et je paraphrase Paul, laissons-nous réconcilier avec la beauté invisible de notre monde, de chacun d’entre nous. Offrons-nous des yeux de beauté, des yeux de Pâques, parce que par grâce, Dieu nous a réconciliés en Jésus avec lui. Il nous a rendus beau pour que nous voyions beau. Ne soyons pas naïf, mais refusons ne de voir que le mal, que la faiblesse dans l’autre, cette faiblesse dont vient de nous dire Paul qui est notre seule force.
Saintes femmes, nous sommes divisés entre « le bien que nous voulons faire et le mal que nous ne voulons pas et que nous faisons » (Rm7, 21-23) Nous sommes déchirés entre ce désir de « mieux vivre », de mieux être des « paroles vivantes de Dieu », des « autels vivants » (Benoît XV1 à Sydney) en ne voyant pas la poutre dans l’autre et en même temps, nous éprouvons ce « malaise de vivre » en ignorant la paille dans nos regards? Nous sommes divisés entre l’égoïsme et l’amour, entre nous servir et servir. Qui pourra nous réconcilier avec notre identité d’image et de ressemblance de Dieu?
À votre contemplation : La poutre que nous voyons si facilement prend racine dans nos cœurs. C’est en nous que ce combat prend naissance. C’est en nous-mêmes qu’il y a des divisions. C’est de là que naissent querelles et discordes que nous observons dans notre société! (Gaudium et Spes # 10) Quotidiennement, nous faisons l’expérience de nos limites tout en désirant nous offrir une vie de « sainteté ». Une eucharistie pour que nos cœurs se dilatent, se transforment en Évangile parce nous avons à cœur de nous laisser brûler au feu de son Amour. AMEN
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