2022-C-Lc 11, 27-28 -samedi de la 27e semaine ORDINAIRE- sacrement du silence
Année C : samedi de la 27e semaine ORDINAIRE (litco27s.22)
Lc 11, 27-28 ; (Ga 3, 22-29) : le sacrement du silence.
J’ai retourné mes yeux, pour regarder en moi. J’ai fermé mes oreilles pour écouter profond. L’encombrement bruyant de ma ville intérieure, m’assailli soudain et j’ai cherché la paix. Lorsque je la perds, je repars à nouveau vers le silence ami. Ces mots-appels d’un poète- Gérard Bessière- indiquent le chemin pour entendre le rêve de Jésus pour l’humanité. Son rêve n’est pas utopique.
Jésus, dans sa réponse au sujet de sa mère, dessine à ceux qui l’écoutent un projet de vie. Encore faut-il écouter, L’écouter. Heureux ceux qui écoutent. Ceux qui m’écoutent. L’auteur du livre de la Sagesse écrit que l’oreille n’a jamais fini d’entendre (cf. Sg 1,6). Souvent, notre mode de vie pleins de bruit, en faisant du bruit, empêche de comprendre en profondeur cette déclaration de Jésus. Nous nous plaignons du bruit, mais nous ne pouvons pas nous en passer, comme le drogué ne peut se passer de sa dépendance. Désastre !
Il est normal qu’au milieu du bruit, nous élevions la voix et plus le bruit est strident, plus nous crions plus fort pour se faire entendre. Nous vivons d’un cri à l’autre. Nous sommes esclaves du bruit et cela nous rend sourds. Pour laisser rebondir en nous la réponse de Jésus, il faut aller à contre-courant, taire tous nos bruits extérieurs et intérieurs, prêter attention aux mots, les peser, les distinguer, en différencier le ton utilisé. Seul le sacrement du silence (Wilfred Monod) permet de laisser entrer en nous ce que l’oreille n’a jamais fini d’entendre (cf. Sg 1,6). Ce sacrement se trouve partout, dans un abri bus, sur une piste cyclable, au fond d’une église, à condition de le chercher.
Marie est déclaré heureuse parce que Jésus voit en sa mère une femme de silence qui conserve, rumine à longueur du jour ses paroles. Sa vie fait entendre une mélodie toujours nouvelle, celle du Magnificat, un chant qui sort d’un cœur non bavard. Heureuse aussi parce qu’orientée vers les autres plutôt que de rechercher la première place.
Question. Que disons-nous de plus une fois avoir entendu Jésus proclamer heureux ceux qui écoutent ma parole ? Il ne suffit pas d’entendre cette déclaration belle, étonnante, provocatrice aussi, pour qu’elle porte fruit. Elle demande à être « activée » et « non archivée ». L’écoute n’est pas magique.
Nous le réalisons peu, ceux qui nous côtoient, ne fréquentent probablement pas l’Église. Ils nous fréquentent. Cela suffit. Nous sommes pour eux des paroles de Dieu. Il y aura toujours quelqu’un qui ne fréquente aucun autre chrétien que nous. Nous sommes responsables de faire entendre la mélodie que nous écoutons, de faire résonner cette parole de Jésus : heureux qui écoutent. Jésus peut entrer dans la vie d’une personne à travers nos paroles issues de notre écoute. Cette conviction, la démarche synodale la démontrée me semble-t-il, est encore assez peu ancrée en nous.
Ici, vous avez mission d’être des expertes en silence qui conduit à l’écoute. Des expertes en écoute qui conduit à la Parole. Cela exige d’entendre chaque mot, chaque note haute ou basse, chaque détonation de la voix. Ce travail d’écoute, de faire silence n’est jamais fini. L’oreille n’a jamais fini d’entendre (cf. Sg 1,6). C’est l’essence de votre vie.
L’important dans votre vie, et ce sera toujours un combat, n’est pas de crier plus fort, toujours plus fort, c’est d’être une chorale avec un seul cœur et une seule âme […] Ce n'est pas une utopie[1]. C’est d’être une symphonie plutôt qu’une cacophonie de voix.
Nous n’en finirons jamais d’entendre en profondeur que nous sommes tous coopérateurs avec Dieu. Coopérer, ce n’est pas simplement exécuter. C’est discerner avec et décider avec. Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; mais je vous appelle mes amis, parce que tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître (cf. Jn 15, 15). AMEN.