2022-C-Mt 20, 17-28 - mercredi de la 2e semaine du CARÊME- En nous, des métastases de pouvoir
Année C : mercredi de la 2e semaine du CARÊME(litco2me.22)
Chacun de nous est habité par la tentation de la prise de pouvoir et de domination. En chacun de nous sommeille, toujours prêt à s’éveiller, le petit « monarque », le petit « prêtre », la petite « sœur », le petit « important », le petit « expert » qui prétendra s’imposer aux autres. Il y a beaucoup de jeu de pouvoir, d’intrigues, de complots dans la société comme dans l’Église pour se frayer ou obtenir promotion et meilleure place.
Dans toute institution humaine et dans notre Église, nous retrouvons le souci de la première place, de la jalousie, de l’envie, de machinations d’intrigues, de complots, d’arrangements et accommodements. L’Évangile n’a pas peur de révéler qu’existaient chez les disciples, les proches de Jésus, de vives tensions entre eux. Ils ne formaient pas une communauté de disciples parfaits. L’un voulait être à droite, l’autre à gauche. Les disciples n’étaient pas des personnes « désincarnées ». Ils lorgnaient des postes de prestige. C’est humain. Ce n’est pas évangélique.
Les disciples veulent se donner du galon. Ils se voient comme les premiers ministres de Jésus, revêtus de pouvoir et de gloire, honorés comme « seigneur » « monseigneur », exerçant une autorité d’en haut (Cf. Mc 10. 42). Dans sa réponse, Jésus décrit un autre style de vie, non dans la recherche de notoriété, mais dans l’abaissement. Les disciples veulent émerger, paraître. Jésus veut s'immerger, disparaître. Logique du monde. Logique évangélique.
L’attitude de Jésus fut un coup de grâce dans les deux sens du terme. Coup de grâce dans le sens d’un coup fatal à leur désir de se donner un pouvoir totalitaire. Coup de grâce dans le sens d’une chance pour relancer ses disciples à bâtir un beau projet, celui de tout quitter même leur désir de grandeur.
Aujourd’hui, c’est justement ce pouvoir totalitaire que revendiquaient les disciples qui se trouvent mis à mal. Nous aussi avons reçu un coup de grâce dans les deux sens du terme, coup fatal et coup de chance quand nous avons reçu le baptême. Recevoir le baptême, c’est plus qu’une petite goutte d’eau sur la chevelure qu’on s’empresse d’essuyer. C’est une plongée dans la manière de vivre de Jésus pour respirer du souffle de l’Esprit de Jésus et non du nôtre. C’est changer de mentalité, de passer de la convoitise du pouvoir à la joie de servir.
Dans sa lettre au cardinal Ouellet, passée plutôt inaperçue, intitulée les laïcs, messagers de l’Évangile, le pape écrit noir sur blanc que nul n’a été baptisé prêtre ou évêque, mais laïc[1]. Le baptême signifie immersion en Jésus. Il nous fait passer de la mentalité de prestige à celle de service, de remplacer l’instinct de domination sur les autres par un empressement à se soucier de leurs besoins. Il donne un coup de grâce à nos désirs de tout contrôler, même la Parole de Dieu et ensemence en nous un projet de solidarité jamais atteint. Coup de grâce que de vivre de l’Esprit de Jésus !
Notre vraie gloire est de vivre le même baptême que celui de Jésus. La grande renommée de Jésus se trouve dans le service et non dans la recherche de tout contrôler. Une tentation commune observe Jean de la Croix est de donner plus de goût à soi-même qu’à Dieu. Il y a en nous des métastases de pouvoir qui risquent de se transformer en un cancer incurable qui fait du ravage en chaque humain et dans l’Église aussi. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur (Mc 10, 43). Jésus a été très clair : il ne doit pas en être ainsi (Cf. Mc 10, 43). Nous ne devons pas être obsédés par le pouvoir, déclarait en 2015 le pape François à l’Église italienne. Le centuple que Jésus promet n'est pas la richesse et la puissance selon le monde.
Je vous offre en terminant cette prière du cardinal Wyszynki : aide-moi, Père, à ne plus attendre de ma vie le contentement et la satisfaction, l’assouvissement de mes désirs personnels. Apprends-moi comment me comporter pour savoir renoncer à des sentiments trop égoïstes qui ne profitent à personne, ni à Toi, ni même à moi.
AMEN.