2021-B-Lc 20, 27-40- samedi de la 33e semaine du temps ORDINAIRE- sept frères
Année B- samedi de la 33e semaine ordinaire (litbo33s.21)
Lc 20, 27-40 ; 1 M 6, 1-13 : les sept frères morts
Il faudrait se demander si les sept frères avaient bien compris ce qu’est la résurrection. À bien lire la description qu’en fait Luc, nous saisissons un appel à passer de la mythologie à la foi. Les sept frères partageaient une nébuleuse croyance qui allait engendrer une guerre en eux et entre eux. De qui est-elle l’épouse fait surgir une autre question : en quoi ces sept frères croyaient-ils ? Dit autrement : qu’advient-il après la mort ?
La mort des sept frères a mis à nue leur foi, leur désemparement sur leur avenir. Leur foi n’était pas acclamation de la parole de Dieu comme on le dit au terme de chaque évangile. Leur mort dégageait une odeur de mort et non de ressuscité. Ils accrochaient leur « nouvelle vie » à celle de leur « ancienne vie », en mode confinement, en mode physique, replié sur eux-mêmes. Ils n’étaient pas désarmés d’eux-mêmes et surtout pas des disciples de la voie (Cf. Ac 9, 2), épris de Jésus tant ils étaient épris, centrer sur eux-mêmes. Leur mort n’était pas passage de la vie à la Vie. Elle a dévoilé le vide d’une vie basée sur des croyances plutôt que sur la foi.
Beaucoup de chrétiens – j’évite de dire notre Église - comme les sept frères en restent aujourd’hui au stade mythologique. Il faut nous débarrasser de tout ce bavardage impertinent sur l’au-delà, nous défaire de tous les plis qui en faussent notre compréhension, nous libérer de nos fausses croyances pour rencontrer, pour la première fois peut-être, l’inouï de la Parole.
Que nous dit cet inouï de la Parole sinon le fait, la certitude qu’une « nouvelle vie » s’ouvre à nous et qui est plus importante à reconnaître que la forme dont elle prendra, plus importante que les motivations intimes de chacun, plus importante que les projets nuptiaux légitimes poursuivis par chacun des sept frères.
Cette « nouvelle vie » est ouverture radicale sur la Vie obstruée par les frontières humaines. La mort des sept frères n’épuise pas leur vie. La vie. Elle leur enlève l’utopie d’une manière de vivre sans ouverture radicale à la transcendance, au dépassement de leur « moi » replié pour être avec celui par qui nous avons la vie, le mouvement et l’être (Cf. Ac 17, 8).
La foi et non la croyance en cette « nouvelle vie » n’est pas une valeur surajoutée. Elle n’apporte pas un plus à la vie. Elle n’est ni de droite ni de gauche. Elle donne de la profondeur à la vie. C’est là que tout se joue. Que la vie de foi se joue. Les sept frères vivent leur relation d’une manière superficielle, sans profondeur. Ils ont échangé sur cette « vie nouvelle » sans pénétrer dans la région de leur profondeur, là où se trouve l’inouï de la foi.
Cet inouïe se retrouve dans ce passage de l’épitre aux Hébreux (7, 15-22) et s’applique non seulement à Melchisédech, mais à chaque croyant : il n’est pas devenu prêtre (croyant) d’après des règles relatives à la puissance humaine, mais par la puissance d’une vie qui n’a pas de fin. Tu seras prêtre (à comprendre vivant) pour toujours. L’ancienne loi a été abolie, elle était faible et inutile […] elle n’a rien amené à la perfection. Une espérance nouvelle nous a été accordée, Jésus est celui qui nous garantit un avenir meilleur.
C’est cette profondeur qui nous manque le plus. Nous bavardons, nous campons nos vies dans l’accessoire futile et superficiel. Nous manquons de conversation en profondeur entre nous sur celui qui est en nous alors que nous ne sommes pas en lui. Cela transpire des Confessions d’Augustin (X, 27, 38).
Bien tard je t’ai aimée, ô beauté si ancienne et si nouvelle, bien tard je t’ai aimée ! Et voici que tu étais au-dedans, et moi au-dehors, et c’est là que je te cherchais […] Tu étais avec moi et je n’étais pas avec toi ; […] Tu as appelé, tu as crié et tu as brisé ma surdité ; tu m’as touché et je me suis enflammé pour ta paix.
À votre contemplation : élevons nos cœurs. Donnons de la profondeur à notre foi sur cette nouvelle vie qui s’offre à nous à chaque lever du jour. AMEN.