2018-B-Jn 5, 17-30 -mercredi 4e semaine carême- entendre pour voir
Année B : mercredi de la 4e semaine du carême (litbc04me.18)
Jn 5, 17-30 : entendre pour voir
Mon Père est à l’œuvre. Laisser l’œuvre de Dieu, son chemin, se réaliser en nous est la vraie et la seule perfection. Le Fils ne peut rien faire de lui-même. Que cela est beau ! Une question monte spontanément en nous : menons-nous une belle vie, celle de laisser Dieu accomplir son œuvre en nous, sa volonté en nous, comme il le veut et où il veut ? Ce chemin, ne rien faire par nous-mêmes est un chemin de régénération, de mort à l’«humainerie» en nous.
Le défi de foi est d’entendre pour croire. Qui entend ma parole et croit (v. 24). Entendre est l’un des mots clés qui révèlent et réveillent la possibilité de voir l’œuvre du Père s’accomplir en Jésus et en nous aussi. Ce défi nous conduit à faire des prouesses et à réduire à néant (cf. Ps 107,34) nos «humaineries». Entendre dévoile à nos yeux l’identité de Jésus. Il agit selon la volonté de son Père. Y a-t-il désolation plus grande que de ne pas entendre ? Posons-nous la question : savons-nous entendre Jésus ? Savons-nous entendre pour écouter, pour croire et faire nôtres les sentiments qui sont dans le cœur de Jésus (Ph 2, 5) ?
Ce mot clé de la foi ouvre un chemin qui nous sort de nos tombeaux (v. 28). C’est le point départ pour faire de notre vie un fiat permanent, celui de redire: me voici, pour faire ta volonté (He 10, 7). Entendre ouvre en nous un espace pour Jésus et conduit à vivre avec lui l’inouïe de son heure. À goûter sa volonté de n’être que dans le Père. Questions : sommes-nous de ceux qui pour ne pas entendre Jésus entrer dans son heure, donnent toute la place à nos bruits intérieurs ? Poussons-nous de grands cris pour ne pas entendre le désir du Dieu d’en haut de nous voir tellement semblables à son fils qu’il a peine à nous distinguer de lui, tant nous sommes des jumeaux identiques ? Si cette page n’est pas une gifle (homélie, pape François, 26 janvier 2018) pour nous sortir de nos surdités, c’est qu’il y a en nous une distance entre ce que nous entendons et ce que nous disons entendre et en vivre. Sans entendre, nous ne voyons rien, nous ne vivons rien de cette belle vie de Dieu en nous.
Nous avons l’habitude de dire qu’il faut vivre pour entendre. Jean propose un retournement-provocation. Il faut d’abord entendre pour vivre l’œuvre de Dieu en nous qui consiste à ne rien faire par nous-mêmes. À ne pas vivre juste pour nous-mêmes. Ces mots sont à des années-lumière de la mentalité d’aujourd’hui. Des mots-mystères qu’on ne cherche pas ni à entendre ni à comprendre. Nous entendons plus facilement nos besoins, nos caprices, nos intérêts que d’obéir – le mot n’attire personne- à sa volonté. Qu’il est difficile d’obéir, de porte-attention à l’action de Dieu en nous !
Notre défi est de nous occuper de Dieu (saint Silouane). Comment ? Par le rapetissement d’être moins préoccupés de notre santé physique et plus de notre vie spirituelle. Qu’il meure ce moi et que vive en moi un autre moi meilleur que moi-même (Thérèse d’Avila, excl. XVI). Facile à l’heure de «l’égolatrie» ! Telle est le chemin pour mener une belle vie à la ressemblance de celle de Jésus. Une vie transformée en la sienne. L’épitre aux Hébreux synthétise cette belle vie en des mots qui nous introduisent au cœur et au centre de l’œuvre du Père en Jésus. Bien que fils de Dieu, il a pourtant appris l’obéissance par les souffrances de sa passion (He 5, 8).
Pour Jésus, cette vie transformée en celle de son Père n’en est pas une de soumission, genre militaire ou celle d’enfants face à leurs parents, mais de ressemblance. Pour lui, l’œuvre de son Père n’est pas quelque chose d’abstrait. C’est très concret, voire charnel. Ma nourriture est de faire la volonté de mon Père (Jn 4, 34). Je fais toujours ce qui lui plaît (Jn 8, 29). Je dis ce que le Père m’a dit (Jn 12, 50). Notre responsabilité baptismale n’est pas de nous soumettre à Jésus, mais de lui ressembler par pure grâce. D’être des fils du monde à venir, précise le Talmud.
À votre contemplation : que son œuvre en nous, que sa volonté en nous, se réalise et nous serons, dit Isaïe (Is 62, 5), la joie de ton Dieu. AMEN.