2016-C-Lc 14, 1, 7-11- samedi 30e semaine ordinaire - savoir-vivre
Année B : samedi de la 30e semaine ordinaire (litbo30s.16)
Luc 14, 1, 7-11 ; Ph 1, 18-26 : une belle leçon de savoir-vivre
Quand quelqu’un t’invite à des noces. De quoi s’agit-il ? De quoi Jésus parle-t-il donc ici ? Offre-t-il un traité des bonnes manières ecclésiastiques ou un manuel de savoir-vivre à l’usage des chrétiens ? Ce qu’évoque Jésus dans cette parabole, c’est lui-même.
Pour comprendre que Jésus parle de lui-même, reprenons son itinéraire. Jésus, le maître du monde, c’est très fort comme message, commence son pèlerinage vers nous dans une grotte. Ne trouvant pas de place dans une hôtellerie, il prend refuge dans une étable en compagnie d’animaux. Jésus, le non créé, a tellement pris la dernière place que personne ne peut plus la lui enlever (Charles de Foucauld).
Tout l’itinéraire de Jésus est imprégné par une dégringolade vers le bas. Comme me l’exprime un lecteur de mes textes, c’est toujours à moi que ça arrive. Il a pris la condition d’esclave. Il a payé l’impôt à César (Mc 12,17). Au bord du Jourdain, il reçoit le baptême des pécheurs. Et puis comme dernière place, il y a cette mort, lui l’immortel, entre deux criminels notoires. Comme le dit Saint-Paul : il s’est anéanti en prenant la condition d’esclave ; il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort sur une croix (Ph 2, 7-8).
Itinéraire vers le plus bas; comme si tout cela ne suffisait pas encore, Jésus est descendu encore plus bas, dans les ultimes profondeurs de notre humanité. Il a passé un grand et long shabbat, un samedi saint, aux « enfers », comme nous le disons dans le Credo. Étonnement sublime, c’est au coeur de cet enfer qu’a retenti la voix du Père : Mon ami, monte plus haut. À comprendre : Mon Fils bien-aimé, je t’élève, je te ressuscite, je te glorifie. Il a tellement descendu bas que Paul écrit : c’est pourquoi Dieu l’a exalté et lui a donné le Nom qui est au-dessus de tout nom (Ph 2, 9).
Oui, cette parabole dessine le trajet qu’a suivi Jésus. Ce n’est pas le trajet recherché par notre monde pour qui c’est le premier qui existe et qui nous pousse à nous comparer aux autres pour démontrer notre valeur.
L’itinéraire de Jésus le conduit naturellement à vivre comme ceux qui n’avaient aucune place aux tables des clubs sélects, des gens de haut rang : un ramassis de pauvres, d’estropiés, de boiteux, d’aveugles, de migrants sans terre, comme vous et moi.
Pour citer Saint-Paul, autour de cette table, il n’y a pas beaucoup de sages selon la chair, pas beaucoup de puissants, pas beaucoup de gens bien nés ; mais ce qu’il y a de fou dans le monde, ce qu’il y a de faible dans le monde, ce qui dans le monde est sans naissance, voilà ce que Dieu a choisi (cf. I Co 1,26-28). Autour de cette table, et Jésus était de ceux-là, il n’y avait que des «anéantis» par les jouisseurs d’eux-mêmes de ce monde.
Beauté inatteignable, le faire-part de Jésus à sa table nuptiale s’adresse à ceux qui ne peuvent l’inviter à leur table parce qu’ils n’en ont pas (Lc 14, 12). Chacun de nous peut dire avec le psalmiste : comment rendrai-je au Seigneur tout le bien qu’il m’a fait ? (Ps. 115-116,12). Comment ? J’élèverai la coupe du salut en invoquant le nom de Dieu (ibid., 13). Aucun de nous n’a de quoi rendre à Jésus ce dont il nous gratifie.
L’abaissement est le trajet suivi par Jésus du commencement au terme de sa vie. Et pour citer saint Pierre, il nous a laissé un modèle afin que nous suivions ses traces ( I Pi. 2, 21). C’est le sens de notre eucharistie où Jésus nous offre son «savoir-vivre». Il s’agit d’apprendre à vivre notre existence chrétienne, en suivant son itinéraire : va, et toi aussi fais de même ! (Luc 10,37). Robert Lebel décrit bien cet itinéraire quand il écrit : comme lui, savoir dresser la table, comme lui, nouer le tablier, se lever chaque jour et servir par amour comme lui. AMEN.