2015-B-Lc 14, 1, 7-11-samedi 30e semaine ordinaire - avons-nous vraiment compris l’Évangile ?
Année B : samedi 30e semaine ordinaire (litbo30s.15)
Luc 14 1, 7-11 ; Rm 11, 1-2, 25-29; avons-nous vraiment compris l’Évangile ?
Jésus remarqua. Jésus a un regard raffiné sur la société de son temps. À toutes les époques, le bien le plus précieux recherché est l’honneur. Nous voulons faire bonne figure. Bien paraître et non être humiliés devant les autres. Il y a en filigrane de cette parabole la conviction très profonde que Dieu honore, donne du prestige à ceux qui n’en ont pas. Il élève les humbles.
En priant cette page me revenait en mémoire cette liste des quinze maladies que le pape François observait dans sa garde rapprochée. La septième maladie parle de la rivalité et la vaine gloire guidée par la recherche des apparences et des honneurs. Il invitait ses plus proches collaborateurs à ne pas jouer au seigneur. À devenir plus humbles. Même dans l’équipe de Jésus, nous trouvons ce même combat de coq entre des disciples qui veulent s’assurer d’être l’un à sa droite et l’autre à sa gauche (cf. Mc 10, 30-35).
La culture du sport qui est celle de rechercher la première place, se retrouve dans tous les secteurs de la société. Elle se trouve aussi subtilement enfouie dans nos vies spirituelles. Aujourd’hui, c’est le pôle position qui compte. On ne parle que du vainqueur. Rarement parlons-nous de ceux qui atteignent à force d’efforts et de luttes, le point d’arrivée. Le meilleur nous fascine. Notre regard ne voit que les arrivés. Les victorieux.
Une question me taraude : avons-nous vraiment compris l’Évangile ? Le registre de l’Évangile n’est pas celui de la priorisation de soi, mais plutôt celui de ne pas se presser à faire voir que j’ai plus d’esprit que les autres, que je suis plus aimé qu’un autre. Le registre de l’Évangile, et j’emprunte cela à la première règle de François (#17) est de rechercher la religion et la sainteté intérieures de l'esprit, [alors qu’] on veut et désire une religion et une sainteté extérieures bien visibles aux yeux des hommes. Ceux-là ont déjà leur récompense (Mt 6, 5).
Ce qui doit nous rassurer dans nos échecs à vivre le mieux possible cette règle de François, c’est, vient de nous dire Paul, que Dieu ne nous rejette pas. Je suis moi-même une preuve. Il ajoute : Dieu trouve dans nos échecs un encouragement à ne pas nous laisser tomber. C’est très fort et encourageant aussi.
Êtes-vous en mesure de signer en l’adaptant à votre vie de moniales ce que Madeleine Delbrel écrivait : Je ressens un besoin profond de passer parmi les hommes de différents milieux humains en me confondant et en disparaissant avec eux, afin de les connaître et de les aimer tels qu’ils sont. L’Évangile dit : Les grands leur font sentir leur pouvoir. Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur. Le pape François nomme cela la culture de la joie de servir.
Ce temps de retraite que vous débuterez ce week-end vous plongera dans l’esprit de François d’Assise et de François, l’évêque de Rome, dont leur spiritualité dégage de ne rechercher ni pouvoir, ni la première place. C’est à cause justement de ce chemin qu’ils occupent la première place dans les cœurs de beaucoup de chrétiens et de non chrétiens.
À votre contemplation, ces quelques mots d’une prière que je vous remettrai tantôt : Ô doux Jésus et humble de cœur, délivre-moi du désir d’être recherché, loué, approuvé, consulté ; délivre-moi de la crainte d’être oublié, soupçonné, humilié ; accorde-moi de désirer que d’autres soient plus estimés, préférés, saints que moi pourvu que je le sois autant que je puis l’être ; Seigneur, je veux me réjouir d’être dépourvu de perfection naturelle, qu’on ne pense pas à moi ; qu’on ne me fasse jamais de compliment. Et la liturgie demain nous dira : heureux les doux et humbles de cœur. AMEN.