2023-A-Lc 20, 27-40 samedi de la 33e semaine ORDINAIRE- un possible quinous dépasse
Année A : samedi de la 33e semaine du temps ordinaire (litao33s.23)
Lc 20, 27-40 : un possible qui nous dépasse.
Il s'agit de voir ailleurs, autrement. Il s'agit de voir à partir du cœur, au-delà de nos peurs, au-delà des apparences, au-delà de la mort. Cette veuve nous projette dans un autre monde, au-delà de ce que notre imagination peut imaginer. Elle nous fait voir une certitude partagée par la majorité des humains : il y a une autre vie possible. Tout pour ainsi dire est « recyclé », tout devient début et principe de nouveaux surgissements de vie. Cette veuve nous pousse à voir l’impossible.
Mais qu’est-ce que l’impossible ? Un poète Angel Valente (1929-2000) définit l’impossible comme le possible qui nous dépasse infiniment. Croyants comme incroyants, nous sommes tous liés par un horizon possible, accessible à tous, bien qu’impossible à imaginer puisqu’il nous projette hors du monde, hors de notre monde, hors du temps et de l’espace qui est nôtre. Jésus n’a-t-il pas dit que rien n’est impossible pour celui qui croit (Mc 9, 23).
Nous sommes tous appelés à un surgissement de vie. La scène de la veuve appelle à un élargissement, un enrichissement de la vie. Elle appelle à bien vivre la vie qui est nôtre au lieu de vivre dans la peur de la mort qui y mettrait un point final. Teilhard de Chardin disait que rien ici-bas n’est profane pour ceux qui savent voir.
Notre foi en Jésus ne signifie pas professer des dogmes et des croyances. Son avenir ne se situe pas de ce côté. Notre foi élève nos regards sur ce possible qui nous dépasse infiniment, sur un horizon qui dépasse notre entendement. Tout ce que nous pouvons en dire est inadéquat. Nous ne savons pas et nous ne pouvons pas savoir ce qu’il adviendra de nous après la mort. Personne ne peut en parler d’expérience. Cette veuve fait entrevoir l’infini déploiement d’un horizon possible, dit le poète Valente. Elle nous fait voir un autre monde. Une autre vie que la fascination pour le visible risque d’anéantir (Sg 4,12).
Pour décrire cet autre monde, Jésus utilise un mot de notre quotidien : vie. Notre vie humaine est une porte qui s’ouvre sur un monde invisible possible, mais qui nous dépasse infiniment. La vie est transformée, non enlevée. Il n’y a pas deux vies. Il n’y a pas une vie d’en bas ni de mort quand la réalité Dieu, le Dieu de la Vie est présent. Quand la vie extérieure et intérieure, d’en bas et d’en haut, s’unissent dans une plénitude de vie, le résultat est la joie.
La contemplation de cette scène nous fait entrer dans le mystère de la vie. Dans le mystère de l’Incarnation. Jésus a unifié la vie d’en haut à celle d’en bas et vice versa. François et Claire intuitionnait que l’au-delà n’était pas vraiment au-delà, mais se trouvait dans les profondeurs de l’ici (Père Richard Rohr ofm).
Si nous vivons pleinement notre vie, notre quotidien, si nous restons attentifs à ne pas laisser le temps nous filer entre les doigts, si nous prenons conscience du cadeau qu’est chaque instant de notre vie, si nous agissons en secourant le prochain qui a faim, qui a soif, qui est étranger, nu, malade, emprisonné, alors s’ouvrira une vie en plénitude. Nous aurons une demeure éternelle dans les cieux.
La vie qui est nôtre comporte une autre vie qui ne forme qu’une seule vie. Conscients ou pas, nous sommes des connectés à une vie qui nous dépasse infiniment. En incorporant la mort à notre vie, et c’est le message de cette veuve qui dépasse son pragmatisme de savoir avec quel amoureux elle vivra, nous vivons déjà le paradis sur terre.
Regardons au-delà du visible. Vivons notre quotidien connecté comme des amoureux avec cette vie que Jésus, chemin, unifie dans sa personne. Ce travail d’unification ne cessera jamais en nous. AMEN.