2021-C-Mt 15, 29-37 -mercredi première semaine AVENT- festin de miettes
Année C : mercredi 1er semaine Avent (litca01me.21) 1 déc.
Mt 15, 29-37 ; Is 25, 6-10a : un festin de miettes.
En ouvrant cette saison de l’Avent, monte en moi cette parabole des invités aux noces. Tout est prêt, venez aux noces (Cf. Mt 24, 42-51). Mais les invités s'excusèrent. Nous devons de toutes nos forces nous arracher à cette exubérance d'activité et de multiplicité pour éviter en célébrant Noël d’entendre le reproche de Jésus : mon ami, comment es-tu entré ici sans l’habit de la vraie charité ?
Un appel retentira quotidiennement ces prochains jours : venez, montons à la montagne du Seigneur et à la maison du Dieu de Jacob (Cf. Is 2,3). Nous sommes en permanence « en sortie » par nos cinq sens. Le « social », valeur positive de notre époque, ne doit pas nous emmurer à rester en dehors de nous-mêmes. Le bruit et le vacarme ont presque tout envahi. Nous vivons enfermés dans un château extérieur incapable d’entrer dans notre château intérieur. Nous n’avons plus cette mémoire ontologique (Jean de la Croix) que nous sommes de la race de Dieu.
Matthieu nous présente ce matin un festin qui attend ceux et celles qui entrent dans leur château intérieur. En y entrant, nous découvrirons quelque chose de bouleversant. Un Dieu nouveau (Joseph Moingt), un Dieu en moi et moi en lui. Un Dieu « miette » qui n’a rien que cela à partager avec nous.
Ce mot « miette » sera comme en toile de fond des lectures tout au long de ce temps qui nous prépare à recevoir la plus riche des « miettes » : Jésus. Ce mot est loin d’être une démonstration de l’écrasante toute-puissance divine. Il est révélation de l’accessibilité de Dieu. On amène à Jésus des « miettes » que sont ces malades qui ne sont pas très utiles à la société. Et Jésus en prend soin comme s’ils étaient des représentants de sa position dans la société.
« Miette ». Ce mot atteste que quelque chose arrive à Dieu. Les récits de la Nativité ne sont pas une démonstration de la toute-puissance divine. Ils soulignent l’humilité suprême de Dieu qui prend et se voit désormais sous les traits humains.
« Miette ». Ce mot montre que Dieu se présente et cela fait scandale (Cf. Jn 6, 60-69), comme une petite miette pour nourrir les faims du monde. Je suis pain (miette) de vie. Et Jésus demande : allez-vous me quitter vous aussi (Cf. Jn 6, 67) ? Ce geste de Jésus de nourrir une foule n’est pas seulement un geste humanitaire. C’est un geste signe, un geste exemple. C’est un exemple que je vous donne (Cf. Jn 13, 15).
Ce geste enthousiasme les uns et choque ceux qui ne voient en Jésus que le fils de Joseph. Ce geste est frugal, dérisoire aux yeux de ceux qui ont les moyens de faire plus sans pour autant partager leur avoir. Ce geste n’est et ne sera jamais qu’une miette et c’est heureux parce qu’avoir faim ça creuse l’appétit. Jésus a une immense faim de nos miettes. Il s’en nourrit abondamment.
Ce petit geste « miette » est plus qu’un geste mémoire de la façon dont Jésus vit. Il est plus qu’un geste du futur, annonçant une grande fraternité universelle. C’est un geste non pas à répéter, mais à inventer, ici et maintenant. Nous sommes des « maranatha » qui avons des miettes à offrir comme réponse à l’immense faim de Dieu, peu importe l’image qu’on s’en fait. Quelle mission que d’inviter à creuser la faim de Dieu en s’offrant comme miette de sa présence !
Jésus partage ce qu’il est : une miette qui ne s’épuise jamais. L'évêque d'Antioche, saint Ignace, se demande : comment pourrions-nous vivre sans Jésus-Christ, que les prophètes eux-mêmes ont attendu ? Comment pourrions-nous vivre sans lui ?
À votre contemplation : Ce Dieu avec nous, ce Dieu « miette » » n’est pas un ovni. Personne ne peut le voir (Cf. Jn 1, 18) en cette vie (Cf. Ex 33,20) parce que ce qui monte du cœur de l’homme, rien n’est comparable à ce que Dieu est (Cf. Is 64, 4). Notre imagination ne peut comprendre ce que cache et montre à la fois cette petite « miette », révélation que quelque chose arrive à Dieu. Il plonge au cœur de la tragédie humaine, se refuge de la dominer, de la conquérir, mais lui ouvre un horizon dont Pâques attestera sa grande et immense compassion pour atténuer nos faims. AMEN.