2021-B-Mt 8, 5-17- samedi 12 semaine ORDINAIRE- à la recherche d'un expert
Année B : samedi de la 12e semaine ordinaire (litbo12s.21)
Mt 8, 5-17 ; Gn 18, 1-15 : à la recherche d’un expert en humanité.
Peut-être avons-nous écouté cette visite du centurion romain à Jésus de façon trop facile. Cette rencontre de Jésus avec un étranger inaugure quelque chose de neuf. Ce quelque chose définit ce qu’est la foi. Pour Jésus, la foi n’est pas une déclaration de ce que « je sais » ou de ce que « je connais ». Elle n’est pas une déclaration de mes connaissances. Elle se laisse voir dans l’impact qu’elle a sur le croyant. Dans la tempête apaisée, les disciples s’approchent de Jésus et le réveillent et lui parlent.
Ce qu’admire Jésus, c’est la capacité de ce chef d’armée de sortir de son enfermement sur son pouvoir, de se décentrer de lui-même pour se centrer sur les besoins de son serviteur. Le centurion reconnait qu’il ne peut plus rien faire pour son serviteur. Il a besoin de quelqu’un d’autre comme les marins ont besoin d’une boussole pour trouver la route, voilà pour Jésus ce qu’est l’essentiel de la foi. Elle prend forme en nous quand nous avons une vive conscience, le sentiment profond que nous avons besoin des autres, de l’Autre.
La foi du centurion l’a fait passer d’un homme d’autorité à quelqu’un qui exprime ouvertement qu’il a besoin des autres. Le centurion est en mode naufrage. En mode panique. Il a besoin de rencontrer un expert en humanité (Paul V1) qui peut l’accompagner sur son chemin. La foi commence quand nous ne nous suffisons pas à nous-mêmes, quand nous sentons le besoin d’un autre. Cela exige – pas facile- de vaincre la tentation de nous renfermer en nous-mêmes et d’accepter de se confier à un autre. Cela produit une petite merveille de mieux-être. Que de fois nous restons fixés à nos soucis, étouffés par la peur de les partager plutôt que de vivre une rencontre libératrice en les confiant à quelqu’un d’autre.
Le centurion offre un bel exemple que la foi guérit. Croire sera toujours une sortie de soi-même pour s’en remettre en toute confiance à quelqu’un d’autre. S’ouvrir à un autre est un chemin de guérison. Nous retrouvons ce même mouvement chez la Cananéenne, le Samaritain. Le centurion sort d’un terrain où il contrôle tout pour ne plus rien contrôler. Sa foi le fait bouger. Elle transporte même des montagnes (Cf. Mc 11, 2-24).
Étonnement, Jésus admire la confiance de cet homme à l’allure extérieure d’incroyant en qui habite une grande foi. Je n’ai trouvé personne en Israël avec une telle foi. Jésus reconnaît en lui un homme de foi alors que son entourage n’y voit qu’un chef d’armée autoritaire.
En présence du centurion, Jésus agit comme le Père prodigue (Cf. Lc 15, 11-32), comme ce roi qui prépare des noces à son fils en allant chercher toute sorte de monde dans la rue (Cf. Mt 22, 1-14), comme cette veuve qui donne tout ce qu’elle a, même le nécessaire (Cf. Mc 12, 41-44), comme ce samaritain qui s’arrête sans se préoccuper de son agenda (Cf. Lc 10, 25,37).
Croire ne rend pas plus facile la vie. Elle maintient ouvert un chemin, un espace qui ouvre sur une rencontre, sur une découverte d’une voix au plus intime de soi-même qui nous dit lève-toi et marche.
À votre contemplation, ces mots que le pape François prononce le 27 mars 2020 dans un moment extraordinaire de prière sur le parvis de Saint-Pierre devant une place vide au tout début de la tempête planétaire COVID. Le début de la foi, c’est de savoir que nous ne sommes pas autosuffisants ; seuls nous faisons naufrage. Nous avons besoin des autres comme les navigateurs anciens des étoiles[1]. La tempête démasque nos « ego » comme le confirme le centurion et manifeste notre appartenance commune : nous sommes tous en besoin des autres et de l’Autre. Et c’est ça la foi. AMEN.