2019-C-Mt 19,13-15- samedi 19e semaine ordinaire- programme du chrétien: voir
Année C : samedi 19e semaine ordinaire (litco19s.19)
Mt 19,13-15 : le programme du chrétien, c’est voir
On ne peut certes pas accuser Jésus de favoriser une société où l’exclusion est la règle. En invitant les enfants à venir à lui, Jésus appelle à une coexistence pacifique. Il confirme qu’il n’exclut personne dans sa vie. Il est créature nouvelle. Le monde ancien s'en est allé (2 Co 5, 17). Sa demande lance un appel à bâtir une société, dirions-nous aujourd’hui, inclusive. Notre comportement est la véritable écriture, la lettre du Christ (2 Co 3, 3) la plus parlante aujourd’hui.
Lors de sa visite en Roumanie (31 mai 2019), le pape François en précise le contour : une société où les plus faibles, les plus pauvres et les derniers ne sont pas vus comme des indésirables, comme des entraves qui empêchent la ‘‘machine’’ de fonctionner, mais comme des citoyens, comme des frères à intégrer de plein droit dans la vie civile ; […] plus une société se soucie du sort des plus désavantagés, plus elle peut se dire vraiment civilisée[1].
À la communauté des Roms, elle-même maltraitée dans le passé par l’Église, il demandait pardon au nom de l’Église parce que nous ne sommes pas chrétiens jusqu’au bout, ni même humains, si nous ne savons pas voir la personne avant ses actions, avant nos jugements et nos préjugés.[2]
Pour Jésus, et c’est le cœur de son message, la centralité de la personne humaine est inaliénable (cf. Evangelii gaudium, no 203). Aujourd’hui, la tentation de l’exclusion est partout. On envisage même d’autoriser le droit à mourir en dignité pour les malades d’Alzheimer. Ne pas tuer exige le courage du renoncement, la beauté du renoncement à cette mode d’exclure, de tuer. En appelant les enfants, Jésus définit que la mission de tout chrétien est de voir. Voyons-nous que notre époque souffre de cardiosclérose, cette maladie à l’origine de la culture du rejet[3]. Le programme de tout chrétien est de voir (cf. Benoît XVI, Deus caritas est, no 31).
Voir. Quand il s’agit de préserver ses propres intérêts, de soigner les apparences, de renforcir la logique de l’argent, nous répondons spontanément présents. Le seigneur «moi» rend aveugle, alourdit nos regards et nous fait perdre de vue les autres.
Par sa demande, laissez venir à moi, Jésus place tout le monde sur le même pied. Il refuse de se tenir avec des gens qui pensent comme lui. En voyant Jésus laisser venir à lui tout le monde, comme il serait beau d’être capables, nous aussi, de laisser venir à nous tout le monde. D’entrer en conversation avec tout le monde. Le refus du clivage fait partie de la signature de Jésus. Tous les êtres humains doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité, proclame l’article premier de la Déclaration universelle des droits de la personne.
Par sa demande, Jésus soulève une question fondamentale : quelle est la boussole qui dirige ta vie ? Ce laissez venir à moi n’est pas seulement un appel évangélique. C’est un appel humanitaire, une invitation universelle (pape François). C’est la chartre qui nous fait grandir en humanité, nous tient ensemble, nous empêche d’être ni chaud ni froid envers les autres. C’est l’héritage central de Jésus.
Laissez venir à moi, une demande pour éviter, comme vient de l’exprimer dans des mots très forts le rapport final de la commission sur les femmes et filles autochtones, un génocide collectif et culturel. Le psaume disait tantôt que le Seigneur nous apprend le chemin de la vie. Il nous sort, il sort l’humanité de cette maison de l’esclavage
(Jos 24, 18). Jésus se fait proche de ceux qui sont loin. Le grand théologien Balthasar écrit que ce laissez venir à moi, c’est le monde. Nous sommes les premiers bénéficiaires de cette demande de Jésus.
À votre contemplation : nous étions indignes qu’il eût compassion de nous, mais lui était digne d’avoir pitié de nous (Augustin). Prions pour que notre monde entende l’appel de Jésus d’aller vers lui. AMEN.
[1]http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/speeches/2019/may/documents/papa-francesco_20190531_romania-autorita.html