2019-C-Jn 15, 1-8- mercredi 5e semaine de Pâques- Dieu s'est uni à lui-même
Année C : mercredi de la 5e semaine de Pâques (litcp05me.19)
Jn 15, 1-8 : Dieu s’est uni à lui-même
Si nous acceptons de croire que cet homme [Jésus] est venu de Dieu, comme l’écrit le théologien Joseph Moingt, nous devons conclure en toute logique que l’humanité toute entière a sa place auprès de Dieu. En Dieu, depuis toujours, il y a de la place pour chacun de nous. Dieu en quelque sorte c’est uni à lui-même (Gaudium et Spes no 45, 2). Comment alors ne pas reprendre ces mots d’un très beau chant liturgique : mon Dieu, tu es grand, tu es beau.
L’apôtre Paul atteste cela quand il écrit que Dieu d'avance nous a connus et nous a prédestinés à être conformes à l'image de son Fils Jésus, afin que celui-ci soit le premier-né d'une multitude de frères et de sœurs (Rm 8, 29). En Jésus, Dieu a épousé la condition humaine pour que nous épousions la sienne.
Entendre cela et y adhérer est bouleversant parce que c’est reconnaître que depuis l’incarnation de Jésus, Dieu n’est plus pensable sans nous. Nous sommes de la race de Dieu (Ac 17,29; 1 Pi 2, 9). Nous venons de l’entendre, Jean affirme que Dieu nous a greffés à lui. Il est la vigne et nous sommes les sarments. Dieu est sorti de lui-même pour ne plus jamais nous dissocier de son existence. Quelle délectation que de contempler cela !
L’évangéliste exprime cela par le mot demeurer. Dans l’esprit de saint Jean, demeurer, c’est séjourner de façon permanente dans la vie même de Dieu. C’est vivre dans l’être de Dieu. Comme le berger, Jésus est sorti pour emporter chacun d’entre nous sur ses épaules jusque dans sa terre divine. Jésus est passionné de l’humain; il est donc descendu dans les profondeurs du shéol, dit la liturgie du samedi saint, pour parachever ce qui était inachevé en nous. La liturgie du temps pascal parle d’un pasteur venu chercher la brebis perdue.
L’être même de ce Dieu est de nous faire toute la place en lui. Il n’a pas méprisé l’humain. Il n’a pas méprisé le corps humain. Il s’est fait homme, dans un corps humain. Saint Irénée, l’évêque de Lyon, a combattu toute sa vie l’idéologie voulant qu’il soit indigne de Dieu de se faire humain, de prendre un corps d'homme. L’évêque Irénée affirme que Dieu s’est fait [humain] pour rétablir en lui l’ouvrage de ses mains. C'est dans la chair du monde, dans l'histoire du monde, dans les rencontres humaines fraternelles, dans les actions libératrices que Dieu est discrètement présent et à l'œuvre. C'est là qu’il demeure, que nous pouvons le rejoindre.
Vatican II, dans sa constitution majeure sur l’Église dans le monde, réécrit avec des mots différents ce qu’affirmait saint Irénée. Le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, s'est lui-même fait chair, afin qu’homme parfait, il sauve tous les hommes et récapitule toutes choses en lui (no 45, 2).
La grande nouvelle à extraire de l’image de la vigne, c’est qu’un jour du temps, Dieu, en Jésus, est sorti pour unir à lui notre nature qui s'était prostituée [et il l’a] restituée à son intégrité virginale (Grégoire de Nysse, IVe siècle). Redisons-le : Ô homme, que tu es grand!
Dans mon Royaume, dit le Christ dans le canon des matines orthodoxes du jeudi saint, je serai Dieu et vous serez Dieu avec moi (IVe Ode du IIIe Tropaire). Nous sommes image de Dieu, des appelés à participer à sa vie, à demeurer en lui. Nous sommes vraiment humains qu’en Dieu. Chacun de nous est déifié puisque Dieu est devenu homme pour que l'homme devienne Dieu en lui (saint Athanase).
En conclusion, je vous offre ces mots du pape François réfléchissant sur l’image de la vigne, prononcés lors du Regina Cæli du 29 avril 2018 : quand on est intime avec le Seigneur, comme le cep et les sarments sont proches, on est capable de porter des fruits de vie nouvelle, de miséricorde, de justice et de paix.
Que l’Esprit de Dieu nous soit donné pour que nous demeurions en lui et lui en nous. AMEN.