2019-C-Jn 3, 16-21- mercredi 2e semaine de Pâques- vous devriez être jour et vous êtes nuit.
Année C : mercredi de la 2e semaine de Pâques (litcp02me.19) 1 mai
Jn 3, 16-21 : vous devriez être jour et vous êtes nuit.
La lumière est venue dans le monde. Si nos yeux ne voient pas cette lumière, ce n’est pas parce qu’elle ne brille pas, mais plutôt parce que nos yeux ne la voient pas. Les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, reconnaît l’évangéliste. Hildegarde de Bingen, prophétesse et docteur de l’Église, dans une lettre au clergé de Cologne lui écrivait, et cela vaut aussi pour tout chrétien, vous devriez être jour et vous êtes nuit.
Ce passage qui suit la rencontre de Jésus avec Nicodème venu de nuit par crainte de réprimandes des leaders religieux, dont il faisait partie, inaugure un thème fort de l’évangéliste pour qui Jésus est venu dans le monde pour que celui qui croit [en lui] ne demeure pas dans les ténèbres (Jn 12, 46). Le Père du ciel a fait de son fils lumière des nations pour que le salut parvienne jusqu’aux extrémités de la terre (Ac 13, 47; cf. Is 49, 6).
Cette lumière je ne la vois pas parce qu’elle est trop éclatante pour moi […]; mais quel paradoxe de réaliser que tout ce que je vois, c’est par elle que je vois (saint Anselme). Notre intelligence est trop impuissante pour en saisir son rayonnement. Nous pouvons seulement saisir que c’est la force de cette lumière qui a fait sortir de nuit les apôtres de la prison dans l’attente de leur comparution devant le conseil suprême (cf. Ac 5, 17-26).
Pour comprendre cette lumière que je ne vois pas, monte en moi l’histoire de Robin, un aveugle de naissance. Grâce à une intervention chirurgicale, il voit. Quelle joie de découvrir avec ses yeux la pièce, la table, le manteau de la cheminée. Il attendait quelque chose de plus : voir la lumière. La lumière est visible, mais il ne la voit pas. Heureux de voir. Déçu de ne pas voir la lumière.
À travers cette histoire, l’écrivain britannique C. S. Lewis voit un paradoxe : tout est lumière, mais on ne la voit pas. Voir la lumière est quelque chose d’aveuglant comme le fut la lumière de la nuée sur la montagne de la transfiguration. Dieu est lumière, éblouissante et inaccessible (1 Tm 6, 16). Mais la lumière, Dieu, s’efface au profit de ce qu’elle éclaire. Jésus n’est pas visible à l’œil nu, sans les yeux de la foi.
Nicodème, en venant de nuit rencontrer Jésus, a fait cette expérience de ne pas voir son vrai visage. Il lui a pris du temps pour le reconnaître, pour exercer ses yeux à voir «l’invisible» Jésus.
Le chrétien est celui qui voit autrement la lumière. Reçois cette lumière, dit le rituel du baptême. Baptisés, nous sommes des «éclairés» par le Christ, toujours empressé à nous conduire sur des prés d’herbe fraiche (Ps 22). Nous sommes des appelés à arracher la lumière hors du ventre de l’obscurité, comme le rappelait le pape François en visite au Bangladesh en citant un poète national, Kazil Nazrul Islam[1]. Que c’est beau !
Notre identité est celle de la lumière. Vous n’êtes pas dans les ténèbres […]; vous êtes tous des fils de la lumière, des fils du jour ; nous n’appartenons pas à la nuit et aux ténèbres (1 Th 5,1-6, 9-11). Cette lumière est autre chose que l’artificielle de notre monde. Elle rayonne par le cœur plutôt que d’éblouir l’espace d’un éphémère instant comme un feu d’artifice.
En conclusion, je reprends ces mots du rituel du baptême. Que la lumière te permette de découvrir la beauté en toutes choses, qu’elle te donne espérance au milieu des difficultés que tu connaîtras. Rappelle-toi toujours que tu es entré dans un monde tourné vers l’avenir, j’ajoute un monde d’optimistes, car Jésus est la lumière du monde.
Que ce temps pascal nous donne des yeux de lumière. AMEN.